Une étude chinoise publiée le 18 mars portant sur 199 patients atteints du Covid-19 n’a observé aucun bénéfice à utiliser la combinaison lopinavir/ritonavir (antirétroviraux contre le VIH présents dans le médicament Kaletra) en comparaison d’un traitement symptomatique de la maladie. Alors que des scientifiques du monde entier s’affairent à trouver un remède au Covid-19 le plus rapidement possible en cherchant parmi les médicaments déjà disponibles de potentiels candidats capables de lutter contre Sars-Cov-2, une des pistes les plus sérieuses envisagée jusqu’alors, l’association lopinavir/ritonavir employée contre le VIH, semble prendre l’eau. Ces deux molécules appartiennent à la classe des inhibiteurs de protéase : en empêchant la maturation des protéines virales, elles peuvent stopper la multiplication et la propagation du pathogène. Ce mode d’action pouvait en théorie s’appliquer contre le Sars-Cov-2, virus à ARN (ARN positif, et non négatif comme pour le VIH) qui utilise une protéase dans son cycle de développement. De premiers résultats encourageants avaient été obtenus par la combinaison lopinavir/ritonavir contre le SRAS et le MERS, deux coronavirus proches de Sars-Cov-2. Mais ces essais étaient entachés par un manque de données in vivo, et par l’absence de randomisation et de groupe contrôle lors des essais chez l’homme. Autant de lacunes à élucider avant de se lancer dans un traitement du Covid-19 par ces deux antirétroviraux. Une équipe chinoise vient de publier le 18 mars dans The New England Journal of Medicine de premières données sur l’effet de la combinaison lopinavir/ritonavir chez 199 patients adultes gravement malades du Covid-19 (pneumonie confirmée par imagerie et hypoxémie (SaO2 < 94%)). Cette étude randomisée a inclus 100 patients soignés par traitements symptomatiques (oxygène, ventilation, ECMO…), et 99 autres qui recevaient 400 mg/jour de lopinavir et 100 mg/jour de ritonavir pendant 14 jours en plus des traitements symptomatiques.
Les résultats sont mitigés : la mortalité à 28 jours des patients n’est pas significativement plus faible chez ceux ayant pris les antirétroviraux. De même, la proportion de patients positifs à l’ARN viral dans les deux groupes est restée comparable à différents points de prélèvements de l’expérience. A noter : en décomptant de l’analyse trois morts précoces dans le groupe des personnes traitées par antiviraux, une analyse en intention de traiter a montré une durée moyenne jusqu’à l’amélioration clinique réduite d’un jour chez les individus sous lopinavir/ritonavir. Ces résultats plutôt décevants interviennent alors que Kaletra (AbbVie) a été choisi parmi la batterie de médicaments qui seront testés dans l’essai clinique national lancé à partir du 20 mars par REACTing. Ce consortium de recherche de l’Inserm planche sur des pistes de lutte contre le Covid-19, notamment par le biais d’un essai clinique sur le repositionnement de médicaments. Il va notamment tester l’effet de quatre traitements sur le virus : remdesivir (Gilead) (médicament à l’essai, cet analogue de ribonucléotide capable de perturber la réplication virale a initialement été développé contre Ebola), Kaletra (AbbVie), et Kaletra + interferon béta, aux propriétés antivirales (Merck), et la chloroquine. Les résultats de REACTing confirmeront-ils ceux des chinois ? Rendez-vous dans quelques semaines pour le savoir…
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