Six mesures pour écraser le virus en dix semaines : les préconisations d’un expert américain
Alors que les Etats-Unis connaissent actuellement une flambée des cas et des décès dus au coronavirus, au point de constituer dorénavant l’épicentre de l’épidémie, un célèbre médecin américain de 74 ans, le Pr Harvey V. Fineberg, président de la Gordon and Betty Moore Foundation et ancien président de l'Institut de Medicine (équivalent de l’l’Académie nationale de médecine), souhaite "gagner la guerre" contre ce virus. Selon lui, cela serait possible en 10 semaines, à condition de ne pas se perdre avec des "allers et retours" et "des demi-mesures" inefficaces, comme celles qui ont été pratiquées ces dernières semaines. Il s’agit non seulement de limiter les conséquences sanitaires de la crise – probablement de plusieurs mois – , mais aussi économiques, qui pourraient s’étendre sur une période encore plus longue. "Il est possible non pas 'd'aplatir la courbe', mais de 'l’écraser'", estime ainsi le Pr Fineberg dans un éditorial du New England of Medecine, paru le 1er avril. "La Chine a fait ça à Wuhan. Nous pouvons le faire dans ce pays en 10 semaines", affirme-t-il.
Comment ? Selon HV Fineberg, cela passe par 6 mesures fortes : un commandement de crise sanitaire ; l’élargissement des tests diagnostiques ; des équipements de protection pour tout le personnel soignant ; le classement de la population en cinq groupes en fonction de leur statut par rapport au Covid-19 ; la mobilisation du public ; et la recherche. Selon le Pr Fineberg, il est tout d’abord nécessaire de nommer un "commandant" de crise qui devrait avoir à la fois "la pleine confiance du Président et celle des Américains". Il ne s’agit pas de coordonner les agences, mais de "mobiliser tous les moyens civils et militaires nécessaires pour gagner la guerre". Cette autorité serait déclinée dans les différents états. Cela passe ensuite par...
la mise à disposition massive et rapide - dans les deux prochaines semaines - de millions de tests de diagnostic, non pour l’ensemble de la population mais pour tous ceux qui présentent des symptômes. "Cela a été la clé du succès en Corée du Sud", rappelle le spécialiste. Il faut organiser des sites dédiés. La troisième mesure est de fournir des équipements de protection aux personnels des hôpitaux. "Nous n’enverrions pas des soldats au combat sans gilets pare-balles ; les personnels de santé en première ligne dans cette guerre ne méritent rien de moins." Un redéploiement des matériels de ventilation apparaît aussi nécessaire vers les zones qui en ont le plus besoin. Isolement accru des personnes infectées et exposées La stratégie du Pr Fineberg consiste, par ailleurs, à répartir la population en cinq groupes et à adapter la prise en charge à chacune de ces catégories. Il s’agit : des personnes infectées ; de celles présumées infectées (c'est-à-dire présentant des signes et des symptômes compatibles avec une infection dont le test était initialement négatif) ; des sujets exposés ; de ceux pour lesquels il n’y a pas de notion d’exposition ou d’infection ; et enfin, de ceux remis d'une infection et suffisamment immunisés. "Nous devons agir sur la base des symptômes, des examens, des tests (actuellement, tests PCR, pour détecter les virus ARN), et des expositions, pour identifier ceux qui appartiennent à chacun des quatre premiers groupes", précise l’expert américain.
Il faut hospitaliser les personnes atteintes d'une maladie grave ou à haut risque ; utiliser des centres de convention vides, par exemple, pour soigner les personnes ayant une maladie légère ou modérée et celles à faible risque ; isoler tous les patients pour réduire la transmission intrafamiliale, convertir des hôtels vides en centres de quarantaine pour héberger les sujets exposés et les séparer de la population générale pendant 2 semaines. Concernant le cinquième groupe, cela nécessite le développement, la validation et le déploiement des tests basés sur les anticorps. "Cela changerait la donne au moment de la relance de certaines parties de l’économie plus rapidement et en toute sécurité", estime HV. Fineberg. Masques et gel pour toute la population La mobilisation du public est, bien sûr, une condition nécessaire de la sortie de crise. "Tout le monde a un rôle à jouer". La créativité et l’intelligence de chacun sont fortement mises à contribution dans tous les domaines. Et "tout le monde peut aider à réduire le risque d’exposition et soutenir...
amis et voisins en cette période critique". Une fois les personnels soignants équipés, il pourrait être utile de mettre a contribution la Poste et des services privés pour fournir à l’ensemble de la population des masques chirurgicaux et du gel hydroalcoolique. "Si tout le monde porte un masque chirurgical à l'extérieur, ceux qui sont présymptomatiques et infectés seront moins susceptibles de propager l'infection. Et si tout le monde porte un masque, il n’y aura pas de stigmatisation." Enfin, le dernier point concerne la recherche fondamentale, pour un traitement, mais aussi pour des marqueurs de sévérité et de détérioration de la maladie. De meilleures données sur l’incidence de l’épidémie, et sur les personnes immunisées seront aussi nécessaires pour le retour à l’emploi. De même, plusieurs paramètres devront être pris en compte concernant le retour à la vie normale des personnes non immunisées : le niveau d'infection toujours en cours, la nature des expositions possibles sur le lieu de travail, les possibilités de dépistage et de détection rapide de nouveaux cas. Les écoles peuvent-elles rouvrir en toute sécurité? "Cela dépend de ce que nous apprenons sur les enfants en tant que transmetteurs de le virus à leurs enseignants, parents et grands-parents", répond le Pr Fineberg. De nouvelles informations sur la survie du virus dans diverses conditions environnementales et sur les différents matériaux apparaissent aussi indispensables.
Ne pas persister avec des "demi-mesures" Selon ce médecin, une telle approche "concertée et déterminée" et "guidée par la science", associée à des mesures économiques (protection des petites entreprises, libération des crédits…) pourrait permettre de relancer les entreprises, une fois la crise sanitaire derrière nous. En revanche, "si nous persistons avec des demi-mesures contre le coronavirus, nous risquons de ralentir l'économie à long terme", avec un impact majeur sur le plan médico-social, conclut-il. Mais "si nous agissons immédiatement, nous pouvons faire du 6 juin 2020, jour de l’anniversaire du jour J, le jour de la victoire de l’Amérique sur la coronavirus".
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