"Mercenaire" ou missionnaire? Les exigences de ce généraliste pour s'installer dans un désert vous ont fait réagir

25/11/2021 Par Marion Jort
Démographie médicale

Dans la petite commune balnéaire de Barneville-Carteret dans la Manche, un maire cherche désespérément un nouveau généraliste pour compenser de futurs départs à la retraite. Contacté par un praticien parisien, prêt à venir s’installer à condition que la commune satisfasse cinq exigences relatives à la rémunération, aux primes et à de l’équipement, l’édile à dénoncé une “surenchère intolérable”, allant même jusqu’à qualifier les généralistes de “rois du pétrole”. Une réaction qui lui a valu de nombreuses critiques… et qui a aussi suscité le débat chez les lecteurs d’Egora.    Prime à l'installation, logement gratuit pendant deux ans, une voiture de fonction, un terrain constructible et enfin, un salaire de 6.770 euros net après impôts.... telles étaient les cinq exigences d’un médecin parisien pour accepter de venir s’installer à Barneville-Carteret (Manche), où le maire cherche désespérément un nouveau généraliste.  Dans cette commune balnéaire qui passe de 2.300 habitants à l’année à 12.000 pendant l’été et où 60% des habitants ont plus de 60 ans, seuls trois médecins exercent actuellement et deux d’entre eux vont partir à la retraite. Malgré cela, le maire refuse de céder à la “surenchère” et au “chantage” des médecins. Pour lui, les généralistes sont devenus “les rois du pétrole”.  Lecteurs d’Egora, vous avez été nombreux à réagir, approuvant ou non l’attitude de votre confrère et la réaction du maire et en vous interrogeant sur la bonne manière d’attirer des médecins dans les déserts médicaux. Voici une sélection de vos commentaires. 

"Ces confrères se comportent comme des mercenaires"

Par dvddrnd 

Navrant à tout point de vue. D'abord, ces confrères qui se comportent comme des mercenaires : je trouve ça assez choquant et je comprends la colère de cet édile. Que la consultation soit sous-payée, on est bien d'accord. Mais de là à réclamer de payer jusqu'aux croquettes du chat, il y a de quoi tomber de sa chaise. D'autant que sur un plan fiscal, ces "aides" seront rapidement considérées comme des revenus de type avantage en nature ou autres et ça risque de faire (très) mal au moment de l'impôt. Ensuite, certains des commentaires qui semblent abonder dans le sens de ce comportement complètement scandaleux et portant atteinte à l'image du médecin et dont les politiques (et les médias) ne vont bientôt pas se priver pour donner une image de profiteur voire de pilleur de notre profession. Merci bien ! Enfin, la remarque du maire avec le bon vieux "l'Etat leur a payé leurs études" : vieille rengaine, qui montre que lui non plus, comme beaucoup de responsables politiques n'a rien compris, et là je suis complètement d'accord avec les commentaires déjà faits à ce sujet. Navrant décidément...  

"Je ne vois pas ce qu’il y a de scandaleux à ce que la profession ait certaines exigences"

Par MarcusVinicius 

Bof, vu les contraintes du métier, demander 6770 € nets + voiture de fonction… ça n'a rien de mirobolant. Nombre de fonctionnaires sont rémunérés bien au-dessus de ça et personne ne moufte (et ils sont loin d'avoir les responsabilités et le temps de travail d'un généraliste). Je ne vois vraiment pas ce qu'il y a de scandaleux à ce que la profession se réveille et ait certaines exigences avant d'aller s'enterrer dans des coins perdus. C’est la loi de l'offre et de la demande, que certains édiles refusent de comprendre...    

"Nous sommes devenus un produit de consommation"

Par synacthene 

Honnêtement, si ce médecin généraliste s'installe, il va travailler au moins 60h/ semaine... Le salaire demandé est tout à fait correct pour au moins 9 ans d'études. Ça n'est pas notre problème si l’Etat n'a pas fait le nécessaire...

avant concernant le faible nombre de médecins généralistes. Les élus et les citoyens peuvent râler, ils ont raison. Mais ils râleront encore plus quand le monde médical sera en burn out compte tenu des exigences actuelles venant aussi bien des patients que des charges à régler et les comptes que nous devons rendre à la Sécurité sociale. Oui, nous sommes devenus un produit de consommation, comme dans les hypermarchés, et il n’y a plus aucun respect de la part de certains. Oui, nos études sont financées par l'Etat, mais quid de toutes nos heures faites durant des années à moindre coût ? Toutes nos heures cumulées de manque de sommeil ? Le risque augmenté d'infarctus ? D’ulcère ? D’AVC ? Et le reste... Qui accepterait ça aujourd'hui ? Tout ça pendant que d'autres dorment tranquillement sur leurs deux oreilles, avec au bout de 3 à 5 ans d'études une meilleure rémunération qu'un pauvre interne...  Nous méritons ce que nous gagnons, et nous devons encore nous battre pour avoir plus.  Pour ma part, je ne peux plus entendre ce genre de discours. Vraiment navrée.  

"Les dirigeants prennent les généralistes pour des cons depuis 40 ans"

Par Alain_D_8 

Les dirigeants ont pris les généralistes (en particulier) et les médecins (en général) pour des cons depuis 40 ans. La situation s'inverse.  Des consultations à 23 euros grassement réévaluées à 25. Et encore… quand nos dirigeants pratiquaient l'aumône c'était "oui, mais pas tout de suite, dans six mois ou un an" : c’était toujours ça de gagné pour l'Etat. C'est une honte absolue. La France est le seul  pays, ou l’un des très rares pays occidentaux, où les honoraires des médecins sont ridicules. Bientôt, nous devrons payer pour exercer puisque nous faisons ce métier par altruisme. Et pendant ce temps, les politicards qui se la coulent douce se gavent.   

"Entre chantage et conciliation il y avait peut-être moyen de trouver un terrain d'entente"

Par julienh59

Bon… et dix balles et un mars. Entre chantage et conciliation il y avait peut-être moyen de trouver un ''terrain'' d'entente. Les incitations à l'installation sont monnaie courante. Tenir cette position de ''vous avez signé pour en chier et devez...

rembourser votre dette en sacrifiant certains aspects de votre vie'' n'est pas tolérable non plus et plutôt insultante. Au final ce maire se retrouve perdant...  Que je sache, l'inscription à la fac, les livres, mes loyers ne m'ont jamais été payés par l'Etat...    

"Pourquoi ne pas réformer les études de santé"

Par Sandrine_M_7 

Et pourquoi pas reformer les études de santé ? Avec un vrai salaire pour les internes, des horaires acceptables… Mais à ce moment-là, avec une obligation d'installation dans les zones sous-denses sur une période de 5 ans, comme pour les étudiants de l'ENS [École normale supérieure, ndlr]. Il faut quand même de la cohérence.      

"Les déserts ne sont pas médicaux mais sociétaux"

Par amoraillon

Toujours la même rengaine des déserts médicaux. Les élus sont vissés à leur fauteuil. Les déserts ne sont pas médicaux mais sociétaux. Alors, les maires peuvent bien construire des palais médicaux, il n'y aura aucun candidat si la population locale est de 2500 habitants, avec 60% de personnes du troisième âge. On peut prévoir 1500 habitants 10 ans plus tard  et une migration des jeunes du village vers de plus grandes villes. C'est ce que veulent aussi les médecins, comme tous les jeunes. Alors, villages de France, regroupez-vous en communauté d'au moins 5000  habitants, avec au moins un collège et quelques loisirs. Rions, rions, car pour arriver à cela, il faudra plus de 10 ans. Les élus ne sont que de petits adjudants aboyeurs mais vissés à leur siège même si le village n'a que 300 habitants... La médecine libérale n'existe pas puisque le paiement est planifié par le système de santé et que tous les médecins à 99% en sont satisfaits, puisqu'ils restent dans le système. Alors, élus dirigeants, ayez le courage des Anglais, nationalisez la santé, et salariez les médecins. Si vous ne le faites pas, c'est que le système et ses déserts vous conviennent... Enfin, notre collègue parisien est excellent, car il a envoyé à ce maire une bonne tarte à la crème en pleine poire. Monsieur le Maire, commencez le travail de fusion avec les communes proches, organisez les transports de patients isolés dans des villages qui seront de plus en plus déserts vers les soignants regroupés en maison de santé dans la ville la plus proche. Aider vos administrés est de votre compétence. Soigner est de notre compétence, et vous devrez nécessairement vous plier à nos compétences... Vociférer ne sert qu’à vous écorcher la gorge, car votre voix ne rencontre que du vide. Mais vous serez réélu, Dieu merci...et c'est ce qui compte !

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Michel Rivoal

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