Elle cartonne aux ECN et choisit la MG : "Il faut être très bon pour être généraliste"
Si elle a fait médecine, c'est pour la médecine générale, et son excellent classement aux ECN n'y changera rien. A 24 ans, Bérénice Hoppenot s'est classée 114ème aux ECNi en juin dernier et s'apprête à commencer un internat de médecine générale à Lyon avec une conviction inébranlable.
"A la base, j'ai vraiment fait médecine parce que j'étais attirée par la médecine générale. Dans ma famille, il y a surtout des infirmiers et des infirmières, mais pas de médecins. Ce n'est pas le côté familial qui m'a poussée dans cette voie. Je ne voulais pas trop me spécialiser, je trouvais que c'était très frustrant de se concentrer sur un aspect de la médecine et oublier toutes les autres spécialités. Je me suis dit à un moment que j'allais faire médecine interne, mais même là on vous demande de vous surspécialiser.
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J'ai fait un stage en médecine générale de trois mois en cinquième année. A Lyon Sud, on a tous un stage obligatoire chez un généraliste. Je dépendais même de deux généralistes, pour voir un peu toutes les possibilités. L'un travaillait avec un confrère, l'autre était tout seul. Ils sont installés en périphérie sud de Lyon, mais avec deux populations différentes. L'un voyait une population plutôt défavorisée, dont les soucis médicaux sont parfois beaucoup plus importants qu'une population d'un quartier plus résidentiel, avec un meilleur accès aux soins. On voit vraiment la différence. "Les généralistes sont souvent dénigrés" Je me disais qu'en médecine générale, on voyait un peu toujours la même chose. Et en fait c'est très varié. Ce qui est surtout intéressant, c'est que les patients doivent passer par le médecin généraliste avant d'aller chez le spécialiste. Et c'est très gratifiant de voir tout un éventail de diagnostics différents, de savoir bien orienter… J'ai trouvé ça très intéressant. J'ai aussi aimé le suivi des patients par le médecin. Il y a vraiment un lien. Le médecin, avec le système des comptes rendus, a un retour de la part du spécialiste. Il sait ce qu'il s'est passé après sa consultation. Je pense qu'aujourd'hui, ce sont les généralistes qui vont être mis en avant, dans la mesure où c'est eux qui orientent. Je pense que c'est un des côtés les plus difficiles de la pratique, de bien orienter… "Certaines personnes de ma famille ont été un peu déçues" Les médecins généralistes sont souvent dénigrés, on choisit rarement la médecine générale quand on est bien classé. Mais en réalité, il faut être très bon pour être généraliste. C'est ça que les gens ne comprennent pas. La médecine générale, c'est la partie la plus dure de la médecine. On se retrouve tout seul face au patient, on se retrouve en première ligne et si on oriente mal le patient, il perd des chances. Les généralistes ont beaucoup de mérite. L'importance de leur rôle n'est pas assez mise en avant. J'ai même hésité à faire médecine générale en me demandant si j'allais être capable de bien orienter mes patients, seule face au patient, face au problème. Quand je disais que je voulais faire médecine générale, les gens autour de moi me disaient "tu verras quand tu auras ton classement tu pourras avoir mieux". Mais non, depuis le début c'est ce que je veux faire. Certaines personnes de ma famille ont été un peu déçues, ils s'attendaient à ce que je fasse une spécialité. Mais je suis restée sur ma positon de départ. Etre bien classée n'a pas changé grand-chose sur ma décision. Mais ça me rassure par rapport à l'internat. Le classement me conforte sur mes connaissances. Je suis plus confiante pour mes futurs stages, dans ma pratique. "Le côté libéral m'inquiète" Si je m'installe, je ne serai pas seule. Je serai en groupe. On assiste au développement des maisons de santé, c'est intéressant. On a tellement l'habitude de travailler en groupe, que c'est rassurant pour des jeunes médecins. On a aussi beaucoup de libertés, de possibilités d'exercice. Le côté libéral m'inquiète quand même. Je pourrais être salariée dans un centre de santé. J'ai un projet de vie, je suis fiancée, la famille, c'est important pour moi… Etre salariée, c'est une protection importante. D'ici trois ans, il y aura peut-être eu des changements, mais si demain je dois m'installer, je préfèrerai clairement être salariée. Quand j'étais en stage en médecine générale, j'ai mieux compris les débats sur la politique de santé. Les médias ne comprennent pas toujours le problème. L'idée du médecin généraliste dévoué à ses patients, qui n'a pas de temps pour lui, est bien ancrée. Sur le tiers payant par exemple, j'ai mieux compris les problèmes. On met quand même beaucoup de bâtons dans les roues des médecins généralistes et après on se demande pourquoi les jeunes ne s'installent pas… Quoiqu'il arrive, il faut que les choses changent. Bon, je dis ça, mais je n'envisage pas d'engagement militant. Tout ce qui se rapproche de la politique, ce n'est pas du tout mon truc." (DR)
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