Selon les prévisions de la Fédération hospitalière de France (FHF), le déficit des établissements publics pourrait tripler en 2017. Face à cette perspective, le gouvernement rassure les personnels tout en planchant sur une évolution des tarifs et une meilleure régulation des soins de ville.
"On répète depuis des années qu'on va dans le mur ; eh bien ça y est, on a heurté le mur !". Frédéric Valletoux, le président de la Fédération hospitalière de France (FHF), est furieux, rapportent Les Echos. Les chiffres des hôpitaux publics sur les neuf premiers mois de l'année sont très mauvais : en extrapolant sur un an, le déficit pour 2017 se monte à 1,5 milliard d'euros (hors budget annexe), trois fois celui de l'année précédente. Même si le déficit effectif devrait plutôt atterrir autour de 1,2 ou 1,3 milliard, selon plusieurs sources, le coup est dur. "On paie sept ans d'inaction, dénonce-t-il. C'est ce qui arrive quand on veut faire des économies sans réformer. Un peu comme si on demandait aux dirigeants hospitaliers de courir le 100 mètres avec un sac de pierres !" Les Echos font le point sur les économies qui ont été demandées au secteur ces dernières années : 1,1 milliard en 2017, après 995 millions en 2016 et 730 millions en 2015. Une paille par rapport à l'effort demandé pour 2018 : 1,6 milliard, a calculé la FHF en mesurant l'écart entre la progression de l'enveloppe budgétaire (+2 %) et l'augmentation des charges (+3,2 à +3,3 %). Les hospitaliers sont d'autant plus furieux qu'ils redoutent qu'il y ait anguille sous roche. Une partie de leurs ressources votées pour 2017 ne leur a pas encore été attribuée et les 450 millions d'euros de dotations pour les missions d'intérêt général et pour les soins de suite et de réadaptation qui leur sont dus subiront, à n'en pas douter, un coup de rabot. On demande également au secteur, au nom de la solidarité ville-hôpital, de reboucher le trou creusé par le dérapage des dépenses en ville (indemnités journalières, spécialistes, transports sanitaires...) Déjà, fin novembre, les hôpitaux n'ont récupéré que 150 millions d'euros sur les 412 millions de crédits mis en réserve au début de l'exercice, alors qu'ils ont respecté les objectifs financiers qui leur avaient été assignés. Hôpitaux publics et privés sont unis pour cette revendication unanime. La ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a reconnu dans Libération la semaine dernière qu" une restructuration de nos hôpitaux est indispensable". Néanmoins, interrogée par Sud Radio ce mardi, la ministre a minimisé la portée de ces réformes sur le personnel. Reconnaissant l'importance du déficit, lié à un "effet de ciseau" : la masse salariale a "augmenté de façon mécanique", du fait de diverses revalorisations, alors que "l'activité baisse". "Pour autant, je pense qu'on ne peut pas baisser les effectifs de soignants", a-t-elle souligné, car les équipes subissent "d'énormes tensions" et font "un métier très difficile". Dans un contexte de dégradation des conditions de travail à l'hôpital, "on ne peut pas aujourd'hui imposer aux soignants dans les hôpitaux un rythme encore plus élevé d'activité", a insisté la ministre. Pour Agnès Buzyn, qui présentera une réforme des hôpitaux en 2018 "la construction même du financement des hôpitaux", avec la tarification à l'acte, est un système "pervers", qui "a entraîné progressivement des dérives puisqu'on a demandé aux hôpitaux d'être rentables". "L'hôpital a une mission de service public", a-t-elle rappelé, selon des propos rapportés par l'AFP. D'après une source au sein de l'exécutif qui s'est confiée aux Echos, un plan d'action devrait être présenté rapidement, peut-être en janvier. "Il n'y aura pas de pose dans l'impératif d'économies. Mais nous sommes conscients du problème et nous devons continuer à faire évoluer l'organisation des soins", a-t-elle ajouté. Pistes : la prochaine campagne tarifaire en mars pourrait ainsi inciter les hôpitaux à développer la médecine ambulatoire, sur le modèle de ce qui a été fait en chirurgie. Le gouvernement réfléchit aussi à de nouveaux outils pour réguler les soins de ville, y compris en cours d'année, comme pour les soins hospitaliers. Des mesures pourraient figurer à l'automne dans le budget de la Sécurité sociale pour 2019, révèle le quotidien économique. L'accord prix-volume qui vient d'être signé avec les prestataires de services de santé à domicile est une piste de réflexion : les tarifs ne sont revalorisés que si l'activité reste contenue. Un modèle qui pourrait, par exemple, s'appliquer aux transports sanitaires. [Avec Les Echos et l'APF]
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