"Fichage" des Gilets jaunes : face aux révélations du Canard, l'AP-HP admet des "utilisations inappropriées"

24/04/2019 Par Aveline Marques
Déontologie
Alors que Le Canard enchaîné publie ce jour un extrait accablant du fichier SI-VIC, l'AP-HP a reconnu que certaines informations médicales sur les manifestants blessés avaient pu y être inscrites, à tort.

"Tuméfaction ORL : plaie oreille", "traumatisme main gauche", "plaie œil et trauma mâchoire", "chaussettes vertes à petits pois, cheveux courts, manque petit orteil pied droit"… Les extraits du fichier SI-VIC, utilisé à la demande des autorités sanitaires pour recenser les blessés lors de situations sanitaires exceptionnelles et en l'occurrence lors de rassemblements de Gilets jaunes à Paris, ne laissent guère de place au doute : contrairement à ce qu'avaient affirmé samedi l'ARS et l'AP-HP dans un communiqué, le fichier contient bien des informations médicales. Suite aux révélations de l'hebdomadaire la semaine dernière, un patient opéré après avoir eu la main arrachée par une grenade lors d'une manifestation, Sébastien Maillet, avait porté plainte contre l'Hôpital européen Georges Pompidou pour "collecte illicite de données à caractère personnel" et "violation du secret professionnel". Il dénonce un fichage politique des militants à destination des services du ministère de l'Intérieur, ce que démentent les autorités sanitaires.

Dans un nouveau communiqué diffusé ce mercredi, l'AP-HP reconnaît toutefois, après "investigations", avoir constaté des "cas d'utilisations inappropriées". Dans les hôpitaux publics parisiens, le dispositif a été déclenché onze fois depuis le début de l'année, dont trois fois pour des manifestations de Gilets jaunes, précise l'institution. "Dans l’immense majorité des cas, les informations renseignées dans SI-VIC comportent comme commentaire le mode d’entrée ("amené par les pompiers") ou le mode de sortie ("retour à domicile") ou des éléments évitant les erreurs d’identification des victimes", insiste l'AP-HP. Mais "il apparaît que les onglets 'commentaire' de l’application ont pu être utilisés pour mentionner des éléments de nature médicale", confirme le communiqué. "Cette pratique n’a été identifiée que de façon marginale ; à ce stade de nos investigations (trois services concernés un ou deux samedis) la case 'commentaires' a été remplie de manière inappropriée pour rajouter des informations que les équipes pensaient utiles sur la nature de la blessure." La faute au mémo rédigé à l'attention du personnel, stipulant à tort que cet onglet permettait d'ajouter "toutes les informations utiles concernant la pathologie ou le type de blessure, l’intitulé exact du service". [avec Le Canard Enchaîné et Francetvinfo.fr]

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