Dans Libération, la ministre de la Santé fait le bilan de ses six premiers mois d'exercice, pointe les chantiers à venir mais annonce, sur la pertinence des soins, l'hôpital "qui n'est pas une entreprise" ou la retraite, des mesures qui ne seront pas toutes faciles à prendre.
Au bout de six mois d'exercice avenue de Ségur, Agnès Buzyn semble assez satisfaite du chemin accompli. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale "marque la priorité donnée à la prévention". En outre, pour l’accès aux soins dans les territoires, la ministre se félicite d'avoir proposé "une approche radicalement différente, concrète, pragmatique qui se fonde notamment sur les moyens que nous donnons aux acteurs sur le terrain d’agir pour construire leurs solutions. Je ne plaque pas le même modèle partout." Estimant qu’il n’y a pas eu assez "de choix courageux qui ont été faits par le passé", les choses vont devoir être transformées "en profondeur", annonce-t-elle. Lire aussi: Agnès Buzyn : "Il ne faut pas tout miser sur l'installation d'un médecin par village" Parmi les défis qui attendent le gouvernement, la ministre cite la pertinence des soins et une "indispensable" restructuration de nos hôpitaux. "Il va falloir recentrer leur activité sur leur valeur ajoutée et la médecine de recours, en renforçant leur capacité à accueillir tout le monde. Il faut surtout redonner confiance aux équipes de l’hôpital et du sens à leur mission", a-t-elle précisé. "Le système est à bout de souffle", juge la ministre, qui annonce une "réforme structurelle des retraites, pour qu'enfin on ait confiance dans notre système (…) Globalement, nous devons repenser l'ensemble."
Regrouper les plateaux techniques
Pour les hôpitaux, "nous sommes arrivés au bout d'une histoire, d'un système (…) ce sont des choix stratégiques et organisationnels qu'il faut faire". La ministre condamne la T2A sans appel. "Ce système a fait croire à l’hôpital public qu’il devait se concentrer sur des activités rentables, qu’il devait se sentir une âme d’entreprise." Mais tel n'est pas le cas pour la ministre, ce qui ne veut pas dire que l'hôpital ne doit pas être attentif à ses budgets. Mais "l’hôpital apporte aussi autre chose, en termes de service public, d’accueil, de compétence. Nous avons risqué de faire perdre le sens de la mission de l’hôpital aux équipes en leur faisant croire qu’elles ne devaient faire que la rentabilité. Les équipes hospitalières ont été malheureuses de ce virage. Et cette logique est arrivée à son terme." Que faire alors, interroge Eric Favereau, le journaliste de Libération ? "Il faut changer la place de l’hôpital public dans notre système. C’est une urgence. Nous allons nous y atteler dès l’année prochaine avec tous les acteurs concernés, y compris pour traiter de la bonne articulation entre la ville, la médecine de ville, et l’hôpital", explique Agnès Buzyn. L'installation des GHT va se poursuivre, car ils permettront de "mieux organiser les filières de soins, en faisant en sorte que les établissements ne soient pas en concurrence, mais complémentaires les uns des autres". Il va falloir "regrouper les plateaux techniques plutôt que les disperser", explique-t-elle.
La HAS donnera des indicateurs de qualité
La pertinence des actes est un axe majeur du discours de la ministre. "Des opérations chirurgicales ne devraient pas avoir lieu. Quand vous regardez les pratiques en cardiologie, vous voyez des différences entre certaines villes, entre certains départements, qui n’ont pas de sens. En 2012, à l’Institut national du cancer, nous avons analysé les prises en charge de cancers du sein et nous avons noté des pratiques très hétérogènes et problématiques (..) Nous ne pouvons plus nous les permettre." Pour contrer cette tendance, la ministre fait appel à la "responsabilité collective" (…) à l'information des patients et demande à la Haute autorité de santé de définir "ce qui est pertinent ou pas". La HAS "donnera des indicateurs de qualité, et ensuite il s’agira d’embarquer professionnels de santé et malades autour de ces parcours de santé très efficients". Agnès Buzyn estime que l'on doit "rééquilibrer l’activité vers ces parcours, où plusieurs professionnels se retrouvent et se coordonnent. Et d’ailleurs, nous allons avoir besoin de beaucoup plus de personnels non-médecins. Tout cela nécessite de repenser notre système de tarification".
Nouveau rapport sur la faisabilité du tiers payant généralisé
La ministre de la Santé se dit par ailleurs confiante dans l'acceptabilité du dispositif de tiers payant par les médecins, dès lors qu'il sera applicable et faisable. Un rapport sur la montée en charge prenant en compte des publics prioritaires, notamment les jeunes, lui sera remis le 31 mars. "Ma politique, en tout cas, est de prendre pour modèle ce qui s’est passé avec les pharmaciens, qui ont réussi à mettre en place un outil fonctionnel, avec un tiers payant réalisé dans 99 % des cas, sans obligation légale. Quand la technique est au rendez-vous et qu’elle est simple, tout le monde l’adopte. J’ai bon espoir que les médecins fassent de même." Interpellée sur son rôle de "caution de gauche" que les médias lui accolent souvent, Agnès Buzyn ne s'est pas dérobée, précisant tout de même qu'elle participait à un gouvernement qui voulait dépasser les clivages. "Je suis là pour protéger les gens, en particulier les populations vulnérables. Je suis personnellement touchée par cette vulnérabilité, c'est ce qui m'a animée comme médecin et c'est ce qui m'anime aujourd'hui comme ministre. Mais, prévient-t-elle, il va aussi falloir prendre des décisions qui ne seront pas toutes faciles." [Avec Libération]
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