Déconventionner les médecins qui ne coordonnent pas : la proposition choc du CAP 22
Supprimer les allocations familiales pour les 30% des ménages les plus aisés, mettre fin au paiement en espèces, mettre en place un péage urbain dans les grandes métropoles, évaluer les établissements scolaires… Pour générer 30 milliards d'euros d'économies et tenir les objectifs budgétaires à l'horizon 2022, une quarantaine d'économistes et de personnalités des secteurs privés et publics (dont le directeur de la Cnam Nicolas Revel) se sont penchés sur 21 politiques publiques, de la santé à l'emploi, en passant par l'éducation, la défense et la dépendance.
En matière de santé, il s'agit de réduire les inégalités sociales et territoriales de santé, de mieux répondre aux enjeux que sont le vieillissement de la population et le développement des maladies chroniques. "Les symptômes de ces difficultés sont connus : délais d'attente, engorgement des urgences des hôpitaux à défaut de solutions de proximité en matière de soins primaires et d'urgence, renoncement aux soins et épuisement des professionnels concernés", listent les experts. Une "transformation structurelle" qui passe aussi par une maîtrise de l'évolution des dépenses : "Notre système reste plus coûteux que celui de ses principaux voisins européens (la dépense publique de santé est supérieure de 1.3 point de PIB par rapport à la moyenne européenne) et les leviers que nous avons utilisés pour contenir les dépenses commencent à montrer leurs limites", constatent les experts. Pour lever "les barrières institutionnelles et administratives inutiles entre les différents pôles de soins", CAP 22 propose notamment d'inciter financièrement les acteurs à la coordination en ne conventionnant que les professionnels de santé de ville qui sont "inscrits dans un système de coordination entre les acteurs". Dans le cas contraire, "leurs actes ne pourraient donc pas donner lieu à remboursement par la Sécurité sociale". Le comité propose également de faire évoluer les systèmes de tarification (en ville comme à l'hôpital) de manière à ce qu'ils favorisent la coordination, mais aussi la qualité et la pertinence des soins. Une qualité des soins qui devra être mieux évaluée, sur la base de l'expérience et de la satisfaction du patient, et d'indicateurs. Ces indicateurs seront utilisés "pour piloter notre système de santé, y compris sur le plan financier (dotations des hôpitaux, niveau de remboursement des soins de ville", souhaitent les experts. Le comité appelle par ailleurs à développer les référentiels et les outils numériques qui permettront aux professionnels de mieux comparer leurs pratiques et aux patients d'être mieux informés.
Pour plus de souplesse, le rapport préconise de "déconcentrer" l'essentiel des actes de gestion des 50.000 agents des établissements publics de santé relevant du niveau national (directeurs, praticiens hospitaliers…) "en matière de recrutement, de mobilité et d'avancement". Il encourage par ailleurs au développement de la médecine ambulatoire, des pratiques avancées et à renforcer les GHT. Les experts appellent enfin le Gouvernement à "saisir les opportunités offertes par le numérique", qu'il s'agisse de l'exploitation des données de santé (recherche, innovation, qualité des soins, prévention, pharmacovigilance, évaluation en vie réelle des produits de santé…) ou du déploiement de la télémédecine. CAP 22 recommande ainsi de généraliser "en priorité" la télémédecine à tous les citoyens vivant dans un désert médical, d'augmenter le recours à la télésurveillance à domicile "pour un meilleur suivi des maladies chroniques" et de donner accès aux actes de télémédecine "à toutes les professions médicales".
Autant de propositions qui, l'espèrent-ils, permettront de dégager 5 milliards d'euros d'économies, de réduire de 10.000 le nombre de décès évitables par an et d'améliorer les conditions de travail des personnels, grâce au désengorgement de l'hôpital. La balle est dans le camp du Premier ministre.
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