"Il est désormais clair que le Gouvernement a donné à monsieur Fatôme [directeur général de la Caisse nationale d’Assurance maladie] un mandat pour asphyxier la biologie médicale", dénonce l’Alliance de la biologie médicale (ABM) dans un communiqué diffusé mardi 8 novembre. Hier, les représentants des biologistes libéraux étaient reçus au siège de la Cnam pour tenter de trouver un compromis sur les baisses de tarifs que veut leur imposer le Gouvernement par le biais du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2023. Mais ces derniers "se sont heurtés à un mur". Le PLFSS prévoit d’imposer 1 milliard d'euros d'économies au secteur sous la forme de baisses de tarifs d'ici à 2026, dont 250 millions dès 2023. Se disant prêts à participer à l’effort collectif, les quatre syndicats membres de l’alliance étaient venus réclamer que cet effort porte uniquement "sur les actes Covid et sur la seule année 2023". "Thomas Fatôme a d’emblée fermé la porte à toute négociation", dénoncent les membres de l’ABM. "Pire, [il] est revenu avec une nouvelle proposition de rabot plus salée encore que celle envisagée initialement", alertent-ils.
Alors que la Cnam tablait sur 180 millions d’euros d’économies sur le secteur pour 2023 dans son rapport Charges et Produits, publié en juillet, "nous avons ensuite appris que le couperet passait à 250 millions d’euros en lisant le PLFSS, rappelle l’Alliance. Et après des semaines à alerter le Gouvernement et la Cnam sur les risques d’un tel projet, voilà que l’addition s’envole désormais à 280 millions d’euros sur 2023", puis 332 millions d’euros chaque année jusqu’en 2026. Soit au total, "1,276 milliards d’euros qui seront ponctionnés sur la biologie de proximité d’ici à 2026". "Ce n’est rien de moins qu’un projet d’asphyxie programmé de la biologie médicale que prévoit la Cnam", s’insurgent les représentants de la profession, qui préviennent : "les pouvoirs publics s’entêtent à agir en comptables et prennent sciemment le risque qu’aux déserts médicaux s’ajoutent demain les déserts des laboratoires". Car un tel "rabot" provoquera selon l’ABM la fermeture des labos de proximité, en particulier dans les zones rurales et les déserts médicaux, et "augmentera les inégalités d’accès à la santé de nombreux patients". Face à la "folie austéritaire de la Cnam" et au "refus des pouvoirs publics" de les entendre, les représentants de la profession ont ainsi officialisé l’entrée en grève reconductible de tous les laboratoires de biologie médicale, et ce à compter du 14 novembre prochain. Tous les réseaux de l’Alliance devraient suivre le mouvement, prévient-elle, alertant les ministres de la Santé et des Comptes publics face au "risque d'une mobilisation générale des libéraux de santé". Depuis le 27 octobre, les biologistes médicaux ont cessé de transmettre les données de dépistage du Covid sur la plateforme Sidep. Le directeur général de la Cnam et les ministres François Braun et Gabriel Attal ont aussitôt dénoncé une "attitude inconsciente" et une "prise en otage" du suivi de l’épidémie les rendant aveugles. Depuis, le conflit entre le secteur et le Gouvernement ne cesse de s’enliser…
Dans un communiqué diffusé peu de temps après celui de l'Alliance de la biologie médicale, la Caisse nationale d'Assurance maladie a déploré la réaction des représentants de la profession et assuré vouloir privilégier le dialogue. Elle a tenu par ailleurs à s'expliquer sur sa nouvelle proposition d'économies. "L'Assurance maladie a proposé pour l’année 2023 de répartir les économies à réaliser sur la biologie médicale entre les actes classiques (180 millions d'euros au travers notamment d’une baisse d’un centime de la valeur du B) et ceux en lien avec le Covid-19 (70 millions d'euros) comme le demandaient les représentants des biologistes libéraux", a-t-elle justifié. La Cnam a ajouté avoir proposé "pour les prochaines années" de conserver la logique de régulation pratiquée entre 2014 et 2022 à travers la définition d’une trajectoire garantissant les dépenses de biologie médicale. Et ce, afin de "donner de la visibilité au secteur". L'Assurance maladie a également maintenu qu'elle considérait que ces propositions étaient "pleinement soutenables" par le secteur, "compte tenu du niveau de rentabilité constaté en 2019 et des effets de la crise sanitaire qui a encore fortement soutenu l’augmentation de cette rentabilité".
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