Les défaillances du secteur de la santé en Grèce, où les dépenses pharmaceutiques restent particulièrement élevées, laissent le champ libre aux pratiques déloyales de l'industrie, relèvent des experts, sur fond d'enquête en cours contre Novartis. La firme aurait gonflé ses tarifs pour corrompre politiques et officiels, par des rétro commissions.
Le groupe suisse est soupçonné en Grèce d'avoir grevé les finances publiques en obtenant une position privilégiée sur le marché et des tarifs gonflés, via le versement présumé de pots-de-vin à des responsables du privé et du public. Le parquet grec anti-corruption mène depuis 2016 une enquête portant sur la période 2006-2015, soit avant l'explosion de la crise de la dette mais aussi lors de son pic. A la demande du parquet grec, l'Inspection générale de l'administration publique (GEDD) passe au crible d'éventuelles sur tarifications de médicaments pour la période incriminée et les possibles responsabilités de hauts fonctionnaires. "Le secteur de la santé laissait dans le passé une grande marge de manœuvre, en raison des procédures de contrôle laxistes et défaillantes", commente Maria Papaspyrou, qui dirige la GEDD. Outre Novartis, d'autres sociétés auraient, selon des experts, participé par des pratiques illégales à ce que les médias qualifient de "fiesta des médicaments". Depuis 2015, Novartis a déjà été condamné à de lourdes amendes pour corruption aux Etats-Unis, en Chine et en Corée du sud. Au total, les pertes pour l'Etat grec résultant de ces abus sont estimées à 23 milliards d'euros, dont des dommages de 3 milliards imputés à Novartis seul. Les dépenses pharmaceutiques en Grèce sont particulièrement élevées par rapport à la moyenne en Europe : représentant 23,6% des dépenses de santé en 2006, elles atteignaient 30,7% en 2011, au pic de la crise, avant de redescendre, sous la pression des créanciers, à 25,9% en 2015, selon l'OCDE. Le secteur, production et vente, pèse lourd dans l'économie, avec 13.000 employés. Le nombre de pharmacies par habitant est aussi record : 95 officines pour 100.000 habitants contre une moyenne de 31 dans l'UE. Et si pour cause de crise, les Grecs ont réduit leurs dépenses de santé, la part de la consommation pharmaceutique y a augmenté : de 19,2% en 2009 elle est passée à 33,7% en 2015, selon des données officielles. Le secteur de la santé était l'espace privilégié de corruption "en raison des intérêts enchevêtrés entre sociétés pharmaceutiques, decision-makers (décideurs politiques, ndlr) et la fonction publique", relève une experte ayant requis l'anonymat. En matière de corruption, le secteur de la santé est comparable à ceux de l'armement, des travaux publics, ou du sport, ajoute cette source. [Avec l'AFP]
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