Les nouvelles recommandations du Gina insistent sur la nécessité de coupler d’emblée les corticoïdes inhalés aux bêta-2 mimétiques. Le dernier rapport de la Global initiative for asthme (Gina), qui a été réactualisé au printemps 2019, fait évoluer notablement le traitement pharmacologique de l’asthme, en particulier de ses formes légères, a expliqué le Pr Helen Reddel (Université de Sydney), qui a présidé le comité scientifique à l’origine de ce texte*. Une des principales différences avec le texte Gina précédent est que les bêta2-mimétiques de courte durée d’action (Saba) ne sont plus recommandés en monothérapie chez les adultes et les adolescents de plus de 12 ans. Les dernières études ont, en effet, montré que les SABA en monothérapie augmentent la probabilité d’exacerbations sévères et la mortalité qui leur est liée, et il est donc conseillé d’ajouter des corticoïdes inhalés (CI) aux Saba pour réduire ce risque. « Même à faibles doses, les corticoïdes inhalés, réduisent la probabilité d’hospitalisations d’un tiers et la mortalité de moitié », a insisté le Pr Reddel. « Cette classe thérapeutique est souvent insuffisamment utilisée, et beaucoup de patients considèrent à tort que les SABA sont un très bon traitement de l’asthme ». Dès le niveau 1 (symptômes moins de 2 fois par mois) et 2 (symptômes au moins 2 fois par mois) de l’asthme, les patients devront utiliser de préférence la combinaison corticoïdes inhalés-formotérol à faible dose à la demande pour soulager leurs symptômes et si besoin avant un exercice, ou éventuellement (niveau 2) une faible dose de CI chaque jour avec des Saba à la demande. « Dans les nombreux pays où l’association CI-formotérol n’est pas disponible à la demande, les patients pourront utiliser SABA et corticoïdes inhalés séparément. Même lorsqu’on utilise deux inhalateurs, cette stratégie est efficace », a déclaré le Pr Reddel, qui a ajouté que « les membres de Gina allaient se battre pour faciliter l’accessibilité de l’association CI-formotérol ». Dès le niveau 2 on pourra aussi ajouter des inhibiteurs d’anti-leucotriènes. Le Pr Reddel a admis que « la recommandation Gina d’associer d’emblée les corticoïdes inhalés dès le premier niveau de l’asthme reposait sur des preuves indirectes, établies à partir du niveau 2 ». Mais, elle a insisté...
sur le fait que des asthmes même légers peuvent parfois déboucher sur des complications graves. « Des études ont révélé que 15 à 20 % des adultes décédant d’asthme présentaient des symptômes moins d’une fois par semaine ou seulement à l’occasion d’un effort ; et les facteurs favorisant les exacerbations (infection, pollution, allergènes) sont variables et souvent imprévisibles », a-t-elle souligné. « Les études expérimentales et humaines à doses thérapeutiques suggèrent que les bêta-2 mimétiques induisent la production bronchique de cytokines pro-inflammatoires comme l’IL6, notamment en cas d’infection par un rhinovirus, et probablement aussi de mucines », a complété le Pr Sebastian Johnston (Imperial College, Londres). Ce qui pourrait expliquer la surmortalité par asthme en cas d’abus de Saba. « Ces effets délétères disparaissent lorsqu’on ajoute des corticoïdes inhalés comme la fluticasone aux bêta-2 mimétiques ». Aux stades suivants de l’asthme, on passera à une association CI-bêta-2-mimétiques à longue durée d'action (Laba) à faible dose (niveau 3 ; asthme avec des symptômes gênants, des réveils nocturnes plus d’1 fois par semaine) puis à une association CI-Laba à dose modérée (niveau 4) ou à dose forte (niveau 5). Lorsque c’est possible, cette combinaison CI-Laba ne sera cependant administrée que pour quelques mois seulement à ces posologies élevées et on surveillera les effets secondaires des corticoïdes inhalés. Le tiotropium pourra être envisagé dès le stade 4 et sera proposé notamment en raison de son coût moindre au stade 5 avant les biothérapies (anti-Ig E : omalizumab ; anti-IL5 ou récepteurs d’IL5 : mépolizumab, reslizumab, benralizumab ; anti-récepteurs d’IL4 : dupilumab). Formes sévères : prudence avec les corticoïdes oraux A la différence, des recommandations précédentes, le traitement de fond par corticoïdes oraux n’est plus privilégié au niveau 5 en raison de ses effets secondaires. Les nouvelles recommandations GINA considèrent aussi...
que la prescription d’azithromycine, bien que dénuée d’autorisation de mise sur le marché (AMM), peut-être une option thérapeutique, chez les patients demeurant symptomatiques en dépit d’une dose modérée ou élevée de CI-Laba. « Les anti-IgE sont destinés préférentiellement aux patients avec un asthme allergique sévère, les anti-IL5 ou anti-IL5R chez ceux avec un asthme sévère éosinophilique, les anti-IL4R chez les patients avec un asthme sévère de type 2 notamment pour épargner les doses de corticothérapie orale », a précisé le Pr Guy Brusselle (Université de Gand, Belgique). « Néanmoins, il est urgent de disposer d’études comparatives molécule contre molécule ». Un essai européen pragmatique multicentrique, Predictumab, va d’ailleurs être mis en place pour comparer mépolizumab et omalizumab dans des asthmes sévères allergique ou éosinophilique.
Le Pr Guy Brusselle (Université de Gand) a insisté sur la nécessité de vérifier l’observance du traitement et la bonne utilisation des dispositifs d’inhalation avant de retenir le diagnostic d’asthme sévère requérant une biothérapie. Il faudra aussi veiller au bon usage de la corticothérapie orale, qui est utile dans les asthmes sévères, mais peut en cas de doses excessives « diminuer paradoxalement le contrôle de l’asthme en déprimant le système immunitaire, ce qui peut faciliter les infections respiratoires, ou en entraînant un surpoids et en favorisant reflux gastro-œsophagien, apnée du sommeil ».
Une étude récente entreprise à l’université d’Amsterdam, à partir de bases de données pharmaceutiques, conforte cette recommandation. Sur 929 asthmatiques identifiés comme recevant des corticoïdes inhalés à forte dose, seuls 21,9 % utilisaient correctement et régulièrement leurs médicaments inhalés, et 29 % prenaient une dose trop forte de corticothérapie orale. « Ce qui montre que la majorité des patients considérés comme des asthmatiques sévères peuvent bénéficier d’une optimisation thérapeutique », a insisté le Dr Katrien Eger. Pourtant, dans cette série, 46,1 % des malades recevaient une biothérapie.
*Global initiative for asthma. Global strategy for asthma management and prevention (2019 update). https://ginasthma.org
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