La production de BCG a été drastiquement réduite et va être définitivement interrompue dans un peu plus d’un an. Les urologues étudient des solutions alternatives.
Les instillations endovésicales de BCG sont le traitement adjuvant de référence après une résection endoscopique d’une tumeur de vessie, lorsque celle-ci est à haut risque de récidiver. Il s’agit d’une situation fréquente puisque qu’elle représente environ un tiers des 12 000 nouveaux cas de cancer de la vessie diagnostiqués chaque année en France. Chez ces patients, la BCG-thérapie a démontré une supériorité par rapport à l’alternative consistant à instiller une chimiothérapie avec la mitomycine C dans la vessie. Ces deux traitements sont les seuls à disposer d’une AMM française pour les instillations endovésicales. Or, à l’échelle mondiale, mais plus particulièrement en France pour de multiples raisons, il existe une pénurie de BCG utilisable pour les instillations endovésicales. La pénurie trouve son explication dans le mode de production particulier de ce médicament. Suite à des déboires industriels, la production de BCG de la principale souche utilisée en France (la souche Connaught) a été drastiquement réduite et va être définitivement interrompue dans un peu plus d’un an. La complexité de la production du BCG et sa faible rentabilité commerciale n’ont pas suscité l’intérêt d’un industriel et le marché français n’est actuellement fourni que par de faibles quantités de BCG de souche Connaught et une quantité limitée de BCG de souche danoise. Du fait de ces quantités réduites, l’usage du BCG a été règlementairement limité par l’Agence National de Sécurité du Médicament (ANSM). "Alors que le traitement recommandé en raison de son efficacité comprend six instillations hebdomadaires d’induction, suivi d’un traitement d’entretien de trois instillations hebdomadaires à 3 mois, 6 mois, 12 mois, puis tous les 6 mois jusqu’à la 3ème année, la réglementation contraint actuellement les patients à ne recevoir que les 6 instillations d’induction, sans traitement d’entretien", explique le Dr Yann Neuzillet, chirurgien urologue à l’hôpital Foch (Suresnes) et membre du Comité de Cancérologie -Vessie de l’AFU. "Or, il a été démontré que sans ce traitement d’entretien, l’efficacité du BCG est fortement diminuée". Les urologues étudient donc des solutions alternatives à la BCG-thérapie, qui reposent toutes aujourd’hui sur la mitomycine C. Au premier rang de ces alternatives, la chimiothérapie endovésicale par cette molécule. L’efficacité de la mitomycine C comparativement au BCG n’a jamais été démontrée de manière directe, dans le cadre d’un essai clinique. Néanmoins les méta-analyses des études comparant la BCG-thérapie sans traitement d’entretien à la chimiothérapie ont montré une augmentation de 28% du risque de récidive chez les patients traités par BCG. "Cette première alternative paraît donc envisageable à proposer aux patients", estime le Dr Neuzillet. La mitomycine C à la particularité d’avoir un effet potentialisé par l’hyperthermie. Ainsi, une seconde alternative, toujours basée sur l’administration endovésicale de chimiothérapie, consiste à augmenter la température dans la vessie à 42°C- 43°C. Cette hyperthermie peut être obtenue au moyen de plusieurs dispositifs. Une récente méta-analyse a montré une réduction de 59% du risque de récidive avec la chimio-hyperthermie endovésicale comparée à la chimiothérapie endovésicale "standard". Cette deuxième alternative est actuellement limitée par la disponibilité des dispositifs dont le coût n’est pas pris en compte dans le forfait couvrant les dépenses de soins des patients. Une troisième alternative, moins développée bien qu’ayant des premiers résultats encourageants, est l’administration endovésicale toujours de mitomycine C associée cette fois à l’application d’un courant électrique passant entre deux électrodes, placées respectivement dans la sonde vésicale et sur la paroi abdominale du patient. L’effet du passage du courant électrique dans la paroi vésicale augmente la pénétration de la mitomycine C. Les rares équipes à s’y être intéressées ont rapporté une diminution de l’ordre de 45% du risque de récidive à 3 et 6 mois. Cependant, cette alternative nécessite là encore des dispositifs coûteux et les preuves de son efficacité demeurent actuellement limitées. L’utilisation d’autres chimiothérapies a été recherchée. Cependant, les résultats avec la doxorubicine ou l’épirubicine (des agents intercalants, comme la mitomycine) n’ont pas montré de supériorité ni même de non-infériorité par rapport au BCG. Idem avec la gemcitabine. Ainsi, les alternatives aux instillations endovésicales de BCG pour le traitement adjuvant des tumeurs de vessie n’infiltrant pas le muscle à haut risque de récidives sont très peu nombreuses.
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