Certains émulsifiants alimentaires associés à un surrisque de cancer
De plus en plus de données mettent en évidence l’impact négatif sur la santé des aliments ultratransformés. Des études ont ainsi souligné une augmentation des risques d’obésité, de troubles du métabolisme, des événements cardiovasculaires, ainsi que de certains cancers. Et au sein de ces aliments ultratransformés, les additifs alimentaires apparaissent particulièrement en cause. Pour approfondir cette question, des chercheurs de l’Inserm, de l'Inrae, de l’Université Sorbonne-Paris nord, de l'Université Paris Cité et du Cnam, regroupés au sein de l’équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle (Cress-Erenont), ont décidé d’analyser, à partir de la cohorte NutriNet-Santé, les liens potentiels entre les émulsifiants et le risque de cancer. Ces additifs utilisés pour améliorer la texture, le gout et la durée de conservation des aliments préparés et emballés sont, en effet, très couramment utilisés par l’industrie agroalimentaire, en particulier dans les pâtisseries, gâteaux et desserts, glaces, barres chocolatées, pains, margarines et plats préparés. Ils comprennent notamment les mono- et diglycérides d’acides gras, les carraghénanes, les amidons modifiés, les lécithines, les phosphates, les celluloses, les gommes et les pectines. Les chercheurs se sont basés sur les données de 92 000 adultes (âge moyen 45 ans ; 79 % de femmes) qui ont participé à l’étude de cohorte NutriNet-Santé entre 2009 et 2021, et qui ont donné des renseignements très précis sur leur alimentation (marques, quantité, …). Au cours du suivi (7 ans en moyenne), 2 604 cas de cancer ont été diagnostiqués chez les participants. Après élimination des nombreux facteurs confondants, les analyses ont alors monté que les personnes qui consommaient le plus de monoglycérides et diglycérides d’acides gras (E471) avaient un risque de survenue de cancers (tous confondus) augmenté de 15 % par rapport aux plus faibles consommateurs. Le risque le plus important était celui de cancer de la prostate (+46%), ainsi que celui de cancer du sein (+ 24 %). Chez les femmes, le risque de cancer du sein augmentait aussi (+32%) en cas d’apports plus élevés en carraghénanes (E407 et E407a). Les auteurs insistent sur le fait que cette première étude observationnelle en la matière ne peut pas établir de liens de cause à effet. En outre, elle comprend certains biais de sélection : proportion élevée de femmes, niveau d’éducation élevé, comportements globalement plus soucieux de la santé. « Si ces résultats doivent être reproduits dans d’autres études à travers le monde, ils apportent de nouvelles connaissances clés au débat sur la réévaluation de la réglementation relative à l’utilisation des additifs dans l’industrie alimentaire, afin de mieux protéger les consommateurs », expliquent Mathilde Touvier, directrice de recherche à l’Inserm, et Bernard Srour, professeur junior à l'Inrae, principaux auteurs de l’étude.
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