L'étrange installation de trois cabinets en plein désert

23/02/2018 Par Catherine le Borgne

En avril, trois cabinets de télémédecine seront en fonctionnement dans trois communes du Loiret qui ne comptent plus qu'un seul médecin généraliste sur leur territoire. ARS, région et élus ont cassé la tirelire et se sont unis pour réinsuffler une vie médicale à une région totalement délaissée.

  Pour les communes de La Selle-sur-le-Bied, Saint-Maurice-sur-Fessard et Chatillon-Coligny, dans le Loiret, il n'y a plus qu'un seul médecin généraliste, installé à Chatillon-Coligny pour tous les habitants. Et le pauvre praticien, débordé, se voit contraint de refuser des patients. L'installation de trois cabinets de téléconsultation, début avril, dans les communes pré-citées, avec le soutien de la Région et de l'ARS Centre-Val de Loire, devrait lui tirer une sacrée épine du pied. Si tout va bien, deux autres cabinets sont également prévues à Courtenay et Corbeilles, un peu plus tard.  

Encourageant le recours à la télémédecine

  Evidemment induit par la désertification médicale, le projet a vu le jour en 2017, alors que le gouvernement annonçait un plan de lutte contre les déserts médicaux s'articulant autour d'un millier de maisons de santé et encourageant le recours à la télémédecine. C'est ainsi que le concept de cabinet de téléconsultation Healphi, une jeune start-up marseillaise, a été présenté pour la première fois en février 2017 au président de l'agglomération montargeoise et maire de Montargis, le Dr Jean-Pierre Door, cardiologue de formation. De la réflexion menée entre les communes et la start-up, est sorti un dossier, qui a été validé par l'ARS et le conseil régional fin 2017. Le lancement des premières cabines est prévu en avril prochain. Le partenaire technologique d'Healphi est Cegedim. Ensemble, ils vont réaliser plusieurs campagnes de validation techniques sur le terrain. L'entreprise participe également au recrutement et à la formation des médecins et déjà plusieurs médecins retraités ont fait savoir qu'ils étaient intéressés.  

"C'est exactement comme chez le médecin"

  Une simulation vient d'être organisée pour la population de La Selle-sur-le-Bied, les officiels et les professionnels de santé des territoires, dans la maison paramédicale. La République du Centre relate cette première séance, où le maire du village Pascal Delion, s'est allongé sur la table d'examen et a tendu son bras vers l'infirmière du jour, tandis qu'un médecin de Boulogne Billancourt, dont on aperçoit le visage sur un ordinateur, après divers examens, dirige ensuite le geste de l'infirmière munie d'un otoscope connecté. "C'est exactement comme chez le médecin", s'est félicité le Dr Door, aux commandes du projet avec Lionel de Rafélis, son homologue du pays gâtinais, tous deux créateurs de l'Association de télémédecine du Montargeois en Gâtinais, explique La République du Centre. La Région a financé l'installation des cabinets de télémédecine, d'un coût unitaire de 27 000 euros, dans des locaux mis à disposition par les mairies. "Nous avons voulu reproduire les conditions d'un cabinet, dans une maison de santé, avec un chariot de télémédecine", raconte Jean-Sébastien Gras, de Healphi. En pratique et pour respecter le parcours de soins, le patient doit prendre rendez-vous selon des créneaux horaires pré-établis, soit par téléphone, soit auprès de la plateforme internet (à défaut de médecin traitant, les urgences ne font pas partie du cahier des charges). Le patient est ensuite examiné en visio-conférence par un médecin libéral rémunéré à l'acte, en présence d'une infirmière salariée (rémunérée à l'heure par l'ARS), dans une discussion à trois. L'installation permet d'accéder au DMP du patient, de le compléter et de délivrer une ordonnance. Le médecin généraliste est rémunéré par le patient muni de sa carte Vitale, sur la base d'une consultation à 25 euros, remboursée par l'assurance maladie, (mais avec un reversement du praticien de 2 euros pour le fonctionnement de la structure, précise La République du Centre).  

"Nous travaillons sur une base dérogatoire"

  Les discussions étant encore en cours entre la CNAM et les syndicats médicaux, pour finaliser un avenant conventionnel sur la télémédecine, qui n'a quitté la sphère expérimentale que depuis le 1er janvier dernier seulement, on peut se demander sur quelle base ces financements ont lieu.  "Nous travaillons sur une base dérogatoire, comme le permet l'article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale 2018", répond Jean-Sébastien Gras. Conformément aux orientations ministérielles, les premiers patients visés sont les malades en ALD qui sont parfois obligés de se rendre aux urgences de l'hôpital pour un simple renouvellement d'ordonnances. Sont ultérieurement prévues, des consultations en dermatologie et en cardiologie. Après le démarrage officiel sur les trois communes, en avril prochain, la start-up a deux autres projets dans ses cartons, en Auvergne et en Rhône-Alpes.

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