Hépatite C : les moyens de l’élimination du virus

24/11/2020 Par Marielle Ammouche
Hépato-gastro-entérologie
Le poids de l’hépatite chronique C reste encore majeur dans le monde. La maladie concernait, en 2016, près de 71 millions de personnes. Elle est responsable de 400 000 décès annuels. En outre, elle constitue l’une des principales causes d’indication à la transplantation hépatique en Europe, avec l’alcoolisme et la non alcoholic steato hepatitis (Nash). Selon de nouvelles données publiées dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH, Y. Kudjawu et coll.) du 24 novembre, le VHC est le facteur de risque du carcinome hépato-cellulaire (CHC) dans près de 17% des cas en France.

  Pourtant, la prise en charge de la maladie a été révolutionnée, il y a quelques années, par la mise à disposition des antiviraux à action directe (AAD) qui permettent « en 8 à 12 semaines de guérir, sans effet secondaire, plus de 99,8% des patients entre les traitements de première et de deuxième ligne », rappellent le Pr Nathalie Ganne-Carrié (Hôpital Avicenne, Bobigny) et le Dr Marc Bourlière (Hôpital St Joseph, Marseille) dans l‘éditorial du BEH. Outre l’impact virologique, ils permettent de réduire la morbimortalité qui y est associée, comme le montre une autre étude parue dans ce BEH (F. Carrat et coll.). Ce travail met en évidence que le traitement par AAD est associé à une réduction du CHC et de la mortalité globale. Près de 10 000 patients, issus de la cohorte Hepather, ont été inclus dans cette étude : 7 344 traités par AAD et 2 551 non traités. Le suivi médian était de 33 mois. Les analyses ont mis en évidence que, chez les sujets traités, la mortalité était réduite de 52%, et l’incidence du CHC de 34%, après ajustement sur les facteurs potentiellement confondants, par comparaison aux sujets non traités. Et ces résultats étaient similaires, que les patients présentent une cirrhose ou non. En outre, aucune augmentation du risque de CHC au cours du traitement par AAD n’a été montrée dans cette étude.

« Ces progrès thérapeutiques spectaculaires permettent d’envisager l’élimination du virus C à l’horizon 2030 proposé par l’OMS », assurent Nathalie Ganne-Carrié et Marc Bourlière. Pour y arriver, la stratégie doit s’appuyer aussi, outre le traitement pour tous les malades, sur la prévention et le dépistage.   L’enjeu du dépistage En matière de dépistage, il reste beaucoup à faire. D’après des études récentes, il reste environ 90 000 personnes porteuses du VHC à dépister et à traiter. La Haute Autorité de santé (HAS) tablait, dans ses recommandations de novembre 2019, sur l’intensification du dépistage des populations à risque, mais non sur un dépistage généralisé, contrairement à l’association française d’étude du foie (Afef), qui souhaite un dépistage universel. Cette stratégie apparaissait, en effet, comme la meilleure option sur le plan coût-efficacité, dans une récente étude de modélisation (Deuffic-Burban S et al. J Hepatol. 2018;69(4):785-792). Dans ce contexte, un programme innovant de dépistage universel a été réalisé à Montpellier auprès de personnes pouvant avoir été infectées par le VHC (personnes se présentant directement au laboratoire, sans ordonnance pour l’hépatite C ; personnes présentant une exposition à risque d’infection par le VHC, identifiée par un médecin). Cette campagne a été menée pendant trois mois, de mi-septembre à mi-décembre 2019. Une analyse des données a été publiée dans le BEH (A. Guinard et coll). Au total, plus de 10 000 tests ont été réalisés, dont 8,7% chez des patients sans ordonnance. Les résultats ont mis en évidence un faible taux de séropositivité, de 0,89%. Les deux tiers des patients avec une sérologie positive étaient âgés de 40 à 90 ans et la plupart déclaraient ignorer leurs facteurs de risque. « Cette stratégie d’aller-vers et la coordination de toutes les chaînes, du dépistage au traitement, sont un gage d’efficacité qui répond à l’objectif d’élimination du VHC », concluent N. Ganne-Carrié et M. Bourlière.

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