La Société française d’hypertension artérielle conseille d’utiliser des tensiomètres électroniques, avec mesure automatique de la pression artérielle. La mesure de la pression artérielle en dehors du cabinet médical est préconisée plus largement que dans les récentes recommandations européennes.
Le Dr Thierry Denolle (Dinard), qui préside la Société française d’hypertension artérielle (SFHTA), a présenté le 14 décembre dernier, lors des 38es Journées de l’HTA à Paris, de nouvelles recommandations sur la mesure de la pression artérielle (1). "La publication de ce texte participe à l’objectif, d’obtenir un taux de contrôle de 70 % des patients hypertendus, et ce, alors, que l’étude Esteban a révélé que le contrôle de l’HTA reste insuffisant en France, notamment chez la femme, avec des chiffres tout au plus stables ou même en diminution", a déploré le Dr Denolle. L’un des axes des propositions émises en 2017 par la SFHTA à destination des instances de santé concernait déjà l’amélioration du diagnostic de l’HTA, en particulier grâce à la facilitation de l’automesure et de la mesure ambulatoire de la pression artérielle (Mapa), "la SFHTA préconisant l’utilisation de l’automesure chez tous les patients hypertendus, en particulier chez ceux de plus de 65 ans et les femmes enceintes hypertendues, le remboursement tous les 5 ans sur prescription médicale d’un appareil d’automesure, l’inclusion de la Mapa dans la nomenclature des actes médicaux remboursés, et la prise en charge de consultations d’HTA complexes", a rappelé le Dr Denolle (2). Depuis, un groupe multidisciplinaire de la SFHTA a élaboré, à partir de la littérature médicale, 13 recommandations pratiques pour la mesure de la pression artérielle. Un des points clef de ce texte est de souligner l’importance d’utiliser pour le diagnostic et le suivi de l’HTA, au cabinet médical et en ambulatoire, un tensiomètre électronique (recommandation de classe 1 et de niveau B), "la mesure auscultatoire n’étant recommandée qu’en cas de doute sur la fiabilité de la mesure électronique, par exemple en cas d’arythmie, de prééclampsie, chez l’enfant" (1B), a expliqué le Dr Denolle. "Certains appareils électroniques permettent d’ailleurs une mesure auscultatoire". Les tensiomètres devront aussi avoir obtenu le marquage CE, avoir été validés sur le plan métrologique (1B), et il faudra recourir à un brassard huméral, "les tensiomètres au poignet même homologués exposant à davantage d’erreurs d’utilisation" (1B). "Un travail important d’information doit donc être effectué auprès des patients et des pharmaciens, plus de la moitié des tensiomètres vendus actuellement en pharmacie étant encore des appareils au poignet", a déploré le Dr Denolle. Bien entendu, le brassard devra être adapté à la circonférence du bras. Ce qui nécessite de disposer d’au moins 3 brassards au cabinet. "Dans le cas des tensiomètres oscillométriques, on n’emploiera que les brassards spécifiques à l’appareil", a signalé le Dr Denolle. (1B). En consultation, la pression artérielle sera mesurée en position assise ou couchée après quelques minutes de repos, idéalement sans parler et sans avoir fumé (1B), et ce, initialement aux deux bras pour dépister une asymétrie, puis au bras avec la pression artérielle la plus élevée (1B). Cette mesure, sera répétée au moins 3 fois à 1 minute d’intervalle (1A) (moyenne des 2 dernières mesures retenue, 1B), et de préférence réalisée avec un appareil avec déclenchement automatique de la mesure (2B). Cette préconisation a été faite, "alors qu’il existe encore peu d’appareils capables de faire ces mesures automatiques", a admis le Dr Denolle, qui espère leur multiplication. Par ailleurs, "il est conseillé de dépister l’hypotension orthostatique, et ce tout particulièrement chez les sujets âgés, diabétiques, polymédicamentés" (1A).
Privilégier l’automesure à la Mapa
Bien que l’on ne dispose pas encore d’études démontrant son intérêt vis-à-vis du pronostic cardiovasculaire, le groupe de travail de la SFHTA a décidé de mettre en avant l’automesure tensionnelle pour des raisons pratiques : facilité d’accès, moindre coût, disponibilité d’un appareil d’automesure chez aujourd’hui plus d’un tiers des patients hypertendus français. L’automesure sera ainsi, sauf indications spécifiques, préférée à la Mapa (2C), "une préconisation spécifiquement française, car la Mapa est mise sur le même pied d’égalité que l’automesure dans la plupart des recommandations internationales", a reconnu le Dr Denolle. Cette mesure sera effectuée, de préférence après utilisation d’aides et de supports (2B), et éducation du patient "selon la méthodologie française qui n’a pas été modifiée", soit 3 mesures en position assise le matin et le soir à 1 minute d’intervalle pendant 3 jours (1B). "Une alternative, si le patient ne peut effectuer l’automesure, est de la faire réaliser par un aidant selon le même protocole" (2C). "Les appareils avec mémoire sont utiles, a estimé le Dr Denolle, certaines études ayant montré que le recueil des mesures n’est bien fait que par 3 patients sur 4". La réalisation d’une Mapa reste recommandée pour poser le diagnostic d’HTA en l’absence d’automesure (1A), évaluer la pression artérielle nocturne (1A), "qui a une forte valeur pronostique", ainsi qu’en cas de suspicion d’hypotension artérielle (1B), de grande variabilité tensionnelle (1B), ou d’HTA non contrôlée par au moins une trithérapie (1A). Il est aussi conseillé de réaliser des mesures en dehors du milieu médical avant de débuter un traitement antihypertenseur (1A), ou d’en modifier la posologie (1B) ("ce qui va plus loin que les recommandations récentes de la Société européenne d’HTA"). Cela est aussi recommandé en cas de suspicion d’HTA résistante pour éliminer un effet blouse blanche (1A), avant une consultation dans le cadre du suivi de l’HTA traitée (1B) ("ce qui dépasse de beaucoup les préconisations européennes") (1B), et pour le suivi des patients avec une HTA blouse blanche afin de dépister l’apparition d’une HTA permanente (1B).
Le risque particulier de l’HTA masquée
Au vu des données de plusieurs études, dont Sheaf (3), il est aussi suggéré de considérer l’HTA masquée (HTA bien équilibrée en consultation mais mal équilibrée en automesure ou en Mapa) comme une HTA non contrôlée et d’adapter le... traitement antihypertenseur en conséquence (2C). "Récemment, une étude a d’ailleurs confirmé que l’HTA masquée s’associe à un risque de mortalité plus élevé qu’une HTA contrôlée", a précisé le Dr Denolle (4). Enfin, la SFHTA considère que, faute d’argument formel en faveur de son intérêt, "l’usage de la pression centrale doit demeurer, pour l’instant, limité au cadre de la recherche clinique" (2C). Une étude est en cours pour préciser l’impact de ce paramètre tensionnel.
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