L'essai clinique européen Discovery, lancé le 22 mars dernier, en pleine polémique sur l’intérêt de l’hydroxychloroquine, prend du retard du fait de difficultés d’inclusion de patients. Il s’agit de « difficultés réglementaires » qui l’empêchent de se développer aussi rapidement que prévu, a expliqué mercredi l'infectiologue Florence Ader (hôpital de la Croix-Rousse, Hospices Civils de Lyon), qui pilote cet ambitieux projet. « Nous ne rencontrons pas de mauvaise volonté, nous rencontrons des difficultés réglementaires », a-t-elle assuré au cours d'une audition par la commission des Affaires sociales du Sénat à Paris. Coordonné par l'Inserm, cet essai vise à évaluer avec une méthodologie rigoureuse, quatre traitements déjà existants (remdesivir, association lopinavir et ritonavir, ces deux derniers associés ou non à l’interféron bêta, et hydroxychloroquine), auprès de 3 200 patients atteints d'une forme grave de Covid-19 hospitalisés dans au moins sept pays européens.
Or il compte « actuellement 740 patients » dans trente hôpitaux, dont « un seul hors de France », au Luxembourg, a indiqué la chercheuse. Initialement, le Royaume-Uni, l'Allemagne, l'Espagne ou encore la Belgique souhaitaient également participer à l'étude. Pourtant cette participation est nécessaire car le rythme des inclusions dans l'essai a considérablement ralenti en France », du fait du recul du nombre de nouveaux patients après sept semaines de confinement. Si « aucun pays ne s'est formellement retiré des discussions » pour participer à l'étude...
« on met beaucoup de temps pour comprendre les circuits de gestion réglementaire d'un pays à un autre », a souligné la Pr Ader, appelant à davantage d' « harmonisation des procédures européennes » en matière d'essais cliniques. Pour certains pays, les 4 500 à 5 000 euros que coûte chaque patient inclus dans l'étude peuvent aussi être un problème, a-t-elle ajouté, évoquant des discussions en cours avec l'Union européenne pour débloquer une enveloppe dédiée.
« Ça ne veut pas dire que ça n'avance pas, mais ça avance lentement », a pour sa part indiqué le patron du consortium de recherche Reacting, Yazdan Yazdanpanah (hôpital Bichat, Paris), qui avait déploré vendredi dans Le Monde ces blocages européens. « On est en train de commencer » les inclusions de patients « en Autriche et au Portugal, et j'espère l'Allemagne », a-t-il assuré. Une probable efficacité « partielle » Emmanuel Macron avait annoncé le 4 mai, que certains résultats de l’essai seraient rendus publics le 14 mai. Un comité indépendant doit se réunir lundi pour analyser les données recueillies et dire si un "signal d'efficacité" se dégage pour l'un des traitements testés. Mais "la probabilité" que rien n'émerge encore et qu'il recommande simplement de poursuivre les inclusions de nouveaux patients "est la plus importante", estime le Pr Yazdan Yazdanpanah. On s'attend à ce qu'ils aient une efficacité « partielle », a expliqué mercredi Florence Ader.
L'essai Discovery n'est pas concurrent de l'étude Solidarity lancée par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) mais il en est une « émanation », les données ayant in fine vocation à être partagées, a également expliqué Florence Ader. « Il y a actuellement un peu plus de 1 800 patients dans Solidarity (et) la France est le pays qui a le plus inclus dans ce protocole ».
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