L'alerte a été lancée sur Twitter ce week-end par le Dr Gérald Kierzek. De garde à l'Hôtel-Dieu (AP-HP), l'urgentiste a découvert avec stupeur que les patients blessés au cours des rassemblements de gilets jaunes étaient inscrits nominativement dans le fichier Sivic. Il dénonce un "fichage politique" et une atteinte au secret professionnel. Direction et autorités tempèrent. "J’étais de garde pour la première fois un samedi. J’ai entendu un coup de fil, où la cadre de santé, c’est-à-dire l’infirmière en chef, disait 'comme d’habitude, vous appelez l’administrateur de garde quand c’est un gilet jaune'", témoigne le Dr Gérald Kierzek sur Liberation.fr. Renseignements pris, le médecin urgentiste apprend que depuis décembre, l'administrateur de garde doit entrer les données nominatives de ces patients dans le fichier Sivic (Système d'information pour le suivi des victimes). Indigné, le médecin sonne l'alarme sur Twitter.
#LTUrgences Consignes à l’instant de d’appeler l’administrateur de garde si patients #GiletJaune aux urgences...Et puis quoi encore?! Les soignants soignent et ne dénoncent pas @ordre_medecins
— Dr Gérald KIERZEK (@gkierzek) 13 avril 2019
Le Dr Marty, président du syndicat UFML, relaie cette alerte et dénonce une "dérive grave".
Suspicion de fichage de patients l’UFML-S demande des éclaircissements à la Ministre de la Santé .#fichage pic.twitter.com/2J3LWR3wSf
— DrMartyUFML-S (@Drmartyufml) 13 avril 2019
Prévu initialement pour les attentats, le dispositif Sivic a été activé des "centaines de fois" depuis sa création, en juillet 2016, indiquait la direction générale de santé (DGS) sur Médiapart en janvier dernier : catastrophe climatique, accidents de bus et, depuis décembre donc, violences urbaines dans le cadre des rassemblements de Gilets jaunes. Le but : "quantifier l’impact du nombre de blessés sur l’offre de soins et anticiper la mise en place, le cas échéant, des mesures de régulation des flux de blessés ou de renforcement capacitaire des établissements de santé", précise la DGS. Mais pour le Dr Kierzek, ce n'est ni plus ni moins qu'un "fichage politique", qui "contrevient au code de déontologique des soignants et vient rompre la base de la relation médecin-malade, qui est le secret professionnel".
Un décret de mars 2018 précise que "seuls les agents des agences régionales de santé, du ministère chargé de la santé et des ministères de l’intérieur, de la justice et des affaires étrangères nommément désignés et habilités à cet effet par leur directeur sont autorisés à accéder aux données mentionnées […] dans la stricte mesure où elles sont nécessaires à l’exercice des missions qui leur sont confiées." Les agents du ministère de l'Intérieur n'y ont accès qu'en cas d'attentat, assure la DGS. "On y enregistre aussi bien les manifestant que les forces de l’ordre, et comme ça, on peut faire remonter le nombre de blessés dans le cadre des manifestations, mais on ne transfère rien de nominatif", affirme de son côté Martin Hirsh, directeur de l'AP-HP, en réponse à Libération. Dans sa délibération datée de juillet 2016, la Cniil indique pourtant que sont transmis les "nom, prénom, date de naissance, sexe, nationalité", ainsi que les "caractéristiques de prise en charge hospitalière : date d’entrée, établissement, état (décédé, grave, hospitalisation conventionnelle, léger) sans précisions sur les pathologies". [avec Liberation.fr]
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