Ce qui se cache derrière les lenteurs des nominations des praticiens hospitaliers
L’un des principaux syndicats de PH accuse les directions hospitalières de trahir l’esprit de la réforme du statut de PH de 2022 en ne nommant pas assez vite les lauréats du concours. Explications.
« Les administrations ne jouent pas le jeu de l’attractivité des carrières médicales. » Telle est l’accusation portée par le Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes-réanimateurs élargi (SNPHARE), dans un communiqué publié au début du mois. En cause, les nominations sur les postes de PH, qui continuent selon l’organisation à traîner en longueur malgré la réforme de 2022 qui avait notamment supprimé le délai de deux ans de post-internat avant de pouvoir présenter le concours, et qui avait rendu possible les recrutements tout au long de l’année, au lieu des deux « fournées » annuelles qui prévalaient jusqu’alors. Voilà qui, toujours selon le SNPHARE, pourrait inciter les jeunes médecins à fuir l’hôpital pour choisir « d’autres modes d’exercice plus rémunérateurs et plus stables ».
Car si la réforme de 2022 n’enchantait pas outre-mesure le syndicat membre de l’intersyndicale « Avenir hospitalier », elle avait au moins le mérite à ses yeux d’accélérer l’accès pour les jeunes médecins à un statut stable, et de réduire la précarité qui prévaut souvent en début de carrière. « Le problème, c’est qu’on peut passer le concours après l’internat, mais que celui-ci est valable quatre ans, comme auparavant, décrypte le Dr Anne Wernet, présidente du SNPHARE. Et nous sommes de plus en plus sollicités par des gens à qui on dit qu’on a toujours fait attendre les médecins pour être nommés, et qu’ils vont donc attendre aussi. Si on veut faire partir les gens, il n’y a pas de meilleure idée. »
Une affaire de sous
Car l’accès au statut de PH n’est pas uniquement une affaire d’égo et de titres. Tant qu’on n’est pas nommé, on ne peut notamment pas toucher l’Indemnité d’engagement de service public exclusif (IESPE), qui s’élève à 1010 euros mensuels, souligne l’anesthésiste. Le SNPHARE affirme par exemple avoir été sollicité par une lauréate « qui doit être nommée sur un poste actuellement vacant, mais qui ne le sera pas… tant qu’elle est en congé maternité : son poste de praticien contractuel est prolongé d’autant ». Pas d’IESPE pour cette femme médecin jusqu’à la reprise du travail, note le syndicat.
Malheureusement, par souci de confidentialité, le SNPHARE n’a pas souhaité communiquer à Egora les coordonnées des personnes qui avaient sollicité son appui. Mais il affirme être « régulièrement sollicité par des lauréats au concours de PH qui ne sont pas nommés sur des postes de praticiens hospitaliers titulaires, non pas parce que ces postes n’existent pas […] mais parce que, le concours étant valable quatre ans, ils seront nommés à l’échéance de validité du concours. » Et pour Anne Wernet, la raison de cette tendance des directions hospitalière à faire traîner les nominations en longueur est limpide. « C’est principalement financier, et je trouve cela extrêmement insultant, car nous avons des études longues, nous travaillons 60 à 70 heures par semaine, notre temps de travail n’est pas compté, et tout cela s’inscrit dans l’absence de reconnaissance du travail que fournissent les PH », s’indigne la responsable syndicale.
Circulez…
Sollicitée par Egora, la Fédération hospitalière de France (FHF), qui représente les intérêts des hôpitaux publics, affirme ne pas avoir « d'information spécifique à communiquer sur les situations individuelles évoquées » par le SNPHARE, et invite « à la plus grande prudence quant à la description de ces situations », qui ne correspondent selon elle « à aucune pratique remontée ». La fédération rappelle que la réforme du statut des praticiens participe selon elle à une « revalorisation de la carrière hospitalière », et que « les établissements s'engagent quotidiennement pour favoriser l’inscription des médecins dans la carrière de PH, piliers de nos équipes hospitalières ».
Anne Wernet reconnaît d’ailleurs que les remontées évoquées par le SNPHARE ne concernent « pas tous les établissements », et que la pratique consistant à continuer à faire attendre les lauréats n’a rien d’illégal : c’est selon elle moins la lettre que l’esprit de la réforme du statut de PH qui est trahi. Et selon elle, l’hôpital se tire une balle dans le pied. « L’armature de l’hôpital, ce sont des gens qui s’engagent sur la durée, avec lesquels on peut faire des projets d’équipe », constate-t-elle. Il est vrai qu’affaiblir l’armature, c’est apporter de l’eau au moulin de ceux qui prédisent l’effondrement de l’hôpital…
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