Dénonçant la gestion de l’affaire Daraï, deux médecins démissionnent du Collège national des gynécos
Un "colloque de la honte". C’est ainsi que le collectif Stop aux violences obstétricales et gynécologiques avait décrit le colloque Paris Santé Femmes organisé par le CNGOF à partir de ce mercredi, appelant à la mobilisation devant le Convention Center de la porte de Versailles à Paris, où l’événement a lieu. Cet appel avait été déclenché à la suite de l’invitation du Pr Emile Daraï, spécialiste de l’endométriose et chef de service de l’hôpital jusqu’en octobre dernier, en ouverture de ce colloque, l’un des plus importants sur le sujet. Le praticien est en effet visé par une information judiciaire pour "violences par personne chargée d’une mission de service public". 25 plaintes d’anciennes patientes ont été déposées contre lui. Elles l’accusent de viols et de violences lors des examens, notamment de pénétrations non consenties ou encore de touchers douloureux, etc. A l’issue d’une enquête interne, l’AP-HP et l’université de la Sorbonne avaient annoncé mi-décembre la mise en retrait définitive de ses responsabilités de chef de service et de responsable pédagogique.
Le CNGOF avait justifié l’intervention du Pr Daraï – qui continue par ailleurs d’exercer – en mettant en avant la présomption d’innocence et ajoutant que ce dernier est un spécialiste reconnu de gynécologie qui "continue à publier et à être invité dans les congrès internationaux". Mais face à la polémique, le CNGOF a finalement annoncé hier que le praticien n’y participerait pas. "En accord avec le bureau du Collège national des gynécologues et obstétriciens français, pour préserver le plus grand congrès annuel français consacré à la santé des femmes, le Pr Emile Daraï a décidé d'annuler sa participation." Selon franceinfo, la participation du Pr Daraï au colloque avait pourtant suscité de fortes tensions au sein du CNGOF depuis plusieurs mois. Deux membres de l’institution avaient même décidé de démissionner pour contester la gestion de cette affaire : la présidente de la commission Probité et bienveillance, Amina Yamgnage, qui avait démissionné en février ; et le vice-président de l’institution, Pierre Panel, plus récemment – le 7 mai, soit quelques jours avant l’ouverture du colloque Paris Santé Femmes. Dès la parution de l’enquête de franceinfo en septembre, qui dévoilait alors les accusations de violences, le Dr Amina Yamgnage affirme avoir affiché sa désapprobation concernant la ligne de conduite du conseil d’administration. "La ligne qui émerge à ce moment-là c'est de s'empresser de ne rien faire", raconte-t-elle au site d’information ce mercredi. "À partir de cette date, je n'ai jamais plus été convoquée à aucune réunion sur le sujet. Donc à partir de ce moment-là, les mots sont forts, mais moi je considère avoir été excommuniée." Cette dernière dit avoir appris l’invitation du Pr Daraï au colloque Paris Santé Femmes quelques mois plus tard. L’événement, qui était initialement prévu en janvier 2022, avait finalement été repoussé à cause de l’épidémie de Covid-19. Alors qu’elle avait fait entendre son désaccord concernant l’intervention du spécialiste de l’endométriose, elle apprend que le Pr Daraï figure de nouveau parmi les orateurs du colloque, reprogrammé en mai. Pourtant, son intervention avait été déprogrammée, soulève franceinfo. "Quand […] l'AP-HP démet de ses fonctions de chef de service un tel médecin, le Collège des gynécologues de France doit avoir de la retenue quant au fait de laisser cet homme continuer de diffuser [sa parole]", explique la gynécologue, qui a claqué la porte du CNGOF en février. De son côté, le collectif Stop VOG dénonce, par voie de communiqué, le "mépris affiché officiellement par le CNGOF de toutes les victimes de violences obstétricales et gynécologiques en reprogrammant cette intervention". Il a ainsi décidé de maintenir son rassemblement ce mercredi matin. Et réclame "des excuses à toutes les patientes dont il faut enfin prendre en compte la parole", "de s’engager à ce qu’à l’avenir plus aucun médecin visé par une procédure judiciaire ne soit invité à s’exprimer au congrès" et "d’émettre un avis en faveur de la suspension du Pr Daraï". [avec franceinfo]
La sélection de la rédaction
Limiter la durée de remplacement peut-il favoriser l'installation des médecins ?
François Pl
Non
Toute "tracasserie administrative" ajoutée ne fera que dissuader de s'installer dans les zones peu desservies (et moins rentables)... Lire plus