Poursuivi par Jean-Marie Bigard et Francis Lalanne, le Dr Jérôme Marty sanctionné d'un blâme

15/02/2024 Par Louise Claereboudt
Déontologie
Fin mai 2021, le président de l'UFML publiait une lettre ouverte dans laquelle il s'en prenait à l’humoriste et au chanteur à qui il reprochait de véhiculer des thèses complotistes. Visé par deux plaintes, le généraliste vient d'être sanctionné d'un blâme par la chambre disciplinaire de première instance d'Occitanie de l'Ordre des médecins.   
 

"Vous êtes le nez rouge et purulent des manipulateurs et des profiteurs de crise. Vous êtes la partie grossière du corps du complotisme, son orifice béant et malodorant." Dans une lettre ouverte publiée sur son compte X (à l'époque Twitter) fin mai 2021, le Dr Jérôme Marty dénonçait avec véhémence les propos anti-vaccin et anti-pass vaccinal de Jean-Marie Bigard et de Francis Lalanne, devenus durant l'épidémie de Covid-19 des figures emblématiques de la sphère complotiste. Le président de l'UFML n'hésitait pas à qualifier l'humoriste et le chanteur de "résistants d'opérette", de "Jean Moulin à vent", de "trouillards" et de "planqués" aux "idées dégueulasses".  

Cette charge lui avait valu d'être visé par deux plaintes devant l’Ordre départemental de Haute-Garonne. Jean-Marie Bigard et Francis Lalanne estimaient, en effet, que le Dr Marty s'était exprimé "en des termes grossiers", assimilés comme "des injures personnelles, contraires aux obligations déontologiques auxquelles les médecins sont tenues". Les plaignants considéraient en outre que, par cette lettre, le généraliste de Fronton avait déconsidéré sa profession. Une réunion de conciliation avait été organisée le 27 juillet 2021, mais Jean-Marie Bigard et Francis Lalanne ne s'y étaient pas rendus.  

Dans sa décision, rendue publique le 12 février et qu'Egora a pu consulter, la chambre disciplinaire de première instance d'Occitanie a finalement donné raison à Jean-Marie Bigard et Francis Lalanne, en sanctionnant le Dr Jérôme Marty d'un blâme. "L'emploi d'un tel vocabulaire pour un médecin s'exprimant dans un média de large diffusion, fût-ce pour répondre à des adversaires de la politique sanitaire officielle et convaincre le grand public de la dangerosité de leurs positions, et qui disposait pour ce faire d'arguments scientifiquement étayés, est de nature à déconsidérer sa profession", a-t-elle estimé. 

Outre le blâme, la chambre a également condamné le généraliste à verser 2 000 euros aux deux plaignants. 

Décision "liberticide"

Dans un communiqué publié sur X, Francis Lalanne a salué "une victoire pour la justice et l'intégrité". "Cette décision démontre que la vérité finit toujours par triompher, et que personne n'est au-dessus des lois, même pas ceux qui occupent des positions de pouvoir ou de notoriété", a-t-il écrit.  

 

Contacté par Egora, l'avocat du Dr Marty, Me Douchez, dénonce quant à lui une "décision scandaleuse" compte tenu des propos tenus par les deux plaignants dans le cadre de la crise sanitaire. "L'un a fait une comparaison nauséabonde entre le pass sanitaire et l'étoile jaune, et l'autre a tenu des propos d'une violence inouïe contre le corps médical, en disant notamment que les médecins français tuent en vaccinant, dans le but de ramener la population mondiale à 500 millions d'habitants."  

De fait, la chambre disciplinaire "légitime les propos de Jean-Marie Bigard et Francis Lalanne, dans la mesure où elle ne les reprend pas", insiste l'avocat, qui qualifie cette décision de "liberticide" : cela signifie qu'"il est interdit dorénavant aux médecins sur le fondement de l'article R4127-31 de dire le moindre mot même à l'égard de personnes qui vous attaqueraient. Jérôme Marty aurait été un citoyen lambda, il aurait été comptable, architecte, notaire, salarié d'une société, il aurait pu dire ce qu'il voulait. Il est médecin, donc il doit fermer sa gueule." 

"J'ai joué mon rôle à plein"

Pourtant, tient à rappeler Me Douchez, le Dr Jérôme Marty "a défendu la vaccination, le port du masque, le pass sanitaire. Il est allé dans le sens du Gouvernement. Il a pris pendant huit mois des gardes du corps parce qu'il recevait des balles de 9 millimètres par la Poste. On n'en a pas tenu compte…" L'avocat annonce à Egora qu'il fera appel de cette décision. "On va aller devant l'Ordre national, on ira devant le Conseil d'Etat et, s'il le faut, devant la Cour européenne des droits de l'homme." 

"J'ai joué mon rôle à plein, je continuerai à le jouer à plein, a réagi le Dr Marty, dans une vidéo publiée ce jeudi sur ses réseaux sociaux. Je ne peux pas accepter que l'on mette en danger les médecins, que l'on mette en péril la médecine, […] et que l'on fasse prendre des risques aux patients." "Je ne baisserai ni les yeux ni les bras, je vais mener le combat, rendre les coups, sanctionné pour n’avoir pas accepté la mise en danger de mes consœurs et confrères, sanctionné pour n’avoir pas accepté les torrents de boues sur ma profession… Sanctionné pour avoir usé de mots crus 'je déshonore ma profession'", écrit-il dans un texte accompagnant sa vidéo. 

"Je compte sur vous pour être auprès de moi et pour ne jamais, jamais, accepter que l'on salisse à ce point notre métier", appelle solennellement le généraliste. 

28 commentaires
1 débatteur en ligne1 en ligne
Photo de profil de Jacques Briand
2,3 k points
Débatteur Passionné
Médecine générale
il y a 9 mois
Même si le Dr Marty a été condamné sur la forme et non pas sur le fond, la justice a été bafouée dans ce jugement. Il n'y avait aucune raison de condamner le Dr Marty à verser 2 000 euros à chacun
Photo de profil de Philippe Pizzuti
852 points
Débatteur Renommé
Médecins (CNOM)
il y a 9 mois
Décision absolument honteuse !  "L'emploi d'un tel vocabulaire pour un médecin s'exprimant dans un média de large diffusion, fût-ce pour répondre à des adversaires de la politique sanitaire offic
Photo de profil de Thierry Lemoine
2,2 k points
Débatteur Passionné
Médecins (CNOM)
il y a 9 mois
C'est une décision honteuse pour l'ordre auquel je n'arrive plus à mettre de majuscule, l'utilité de cette institution apparaissant de plus en plus minuscule.... Déjà, sur la forme, rien que le fait d
 
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