"La crise du Covid a montré que plus aucun pays ne pourra prétendre être une grande puissance s’il n’est pas doté d’une industrie de recherche et de production en santé de tout premier plan", a souligné Frédéric Collet, président du Leem (les entreprises du médicament), lors d’un "grand débat" organisé le 23 mars à Paris. Le syndicat patronal a émis 27 propositions réunies en quatre objectifs. Le premier vise à "faire de la France le leader européen du médicament en soutenant massivement la recherche et l’innovation". "La course à l’innovation thérapeutique n’est pas la priorité des candidats", remarque Chloé Morin, spécialiste de l’analyse de l’opinion publique, et directrice générale de Societing.
Soutien à la recherche
"Emmanuel Macron veut appliquer le CSIS 2021 [Conseil stratégique des industriels de santé] et le Plan Innovation santé 2030", relève Chloé Morin. Valérie Pécresse projette de lancer un "programme France-Recherche-Excellence" et des "projets d’innovation avancée", pilotés par un ministère de l’Innovation, de l’Industrie et de l’Énergie. Eric Zemmour entend simplifier le CIR (Crédit impôt recherche) et porter effectivement la dépense de R&D à 3% du PIB. Même promesse de la part d’Anne Hidalgo qui définit la santé comme une de ses "quatre odyssées stratégiques". Chez Jean-Luc Mélenchon, "une partie du plan massif de 200 milliards d’investissement écologiquement et socialement utile concerne la santé", note Chloé Morin. Fabien Roussel compte donner "un nouvel élan à la recherche publique" via notamment l’embauche "immédiate" de 15.000 enseignants-chercheurs. Et Yannick Jadot annonce "un plan d’investissement public de 25 milliards d’euros par an" dans les filières d’avenir.
Autonomie sanitaire
Le Leem souhaite également "faire de l’industrie pharmaceutique un fer de lance de la réindustrialisation". "80 à 85% des Français approuvent l’idée de relocalisation", relève Brice Teinturier, directeur général délégué d’Ipsos. "Cet objectif fait l’unanimité chez les candidats mais les programmes vont peu dans les détails", ajoute Chloé Morin. Le chantier a commencé lors du quinquennat en cours. Marine Le Pen ambitionne d’axer toute sa politique économique sur la production et de faire de la "souveraineté alimentaire et sanitaire" un de ses "grands projets d’avenir". Eric Zemmour dit vouloir "recréer un puissant ministère de l’Industrie", "chef d’orchestre de la réindustrialisation de la France", avec des productions de principes actifs dans des clusters d’activité et des zones franches industrielles. Anne Hidalgo prévoit un "fonds pour la réindustrialisation et l’emploi local" doté de 3 milliards d’euros. Jean-Luc Mélenchon prépare "un plan de reconstruction industrielle dans les domaines stratégiques", la création d’un "pôle public du médicament" et des réquisitions d’entreprises d’intérêt général envisageant de fermer ou de délocaliser des activités. Fabien Roussel évoque lui aussi un pôle public du médicament, une loi d’orientation et de programmation pour l’industrialisation et la nationalisation de groupes stratégiques. Yannick Jadot s’engage à mettre en place "un fonds de soutien aux mutations et à l’innovation industrielle" et à "lever des monopoles sur certaines productions essentielles lorsque cela est nécessaire". "On a délocalisé les productions polluantes. Il faudra innover vers la chimie verte", commente Florence Allouche, startuppeuse présidente de Myrpharm Advisors. La réindustrialisation permettra aussi faciliter l’accès des patients à l’innovation, selon Frédéric Collet. "L’accès aux soins est le sujet sur lequel il y a le plus de propositions, mais il s’agit surtout de l’accès aux professionnels de santé plutôt qu’aux médicaments", relève Chloé Morin.
Refonte de la gouvernance
Enfin, le Leem plaide pour une réforme la politique du médicament. "Le pilotage dépend d’une douzaine d’administrations", déplore son président. Là, "il y a plus de propositions à l’extrême gauche", estime Chloé Morin. "Pôle public du médicament" pour Jean-Luc Mélenchon et Fabien Roussel, ou, pour Yannick Jadot, obligation de "transparence" des laboratoires sur les ventes de médicaments, les remboursements et les prix pratiqués à l’étranger afin de "réguler le marché en fonction d’objectifs de santé publique et de souveraineté sanitaire". Tandis qu’à droite, les principales mesures sont des baisses d’impôts.
"Il est urgent de reconnaître que le médicament est un investissement et pas un coût", conclut Frédéric Collet. Sera-t-il entendu ? Réponse les 10 et 24 avril.
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