L’IGAS vient de publier un rapport commandé par le ministère de la Santé, évaluant la mise en pratique de la "sédation profonde et continue jusqu’au décès", autorisée en février 2016, par la loi Claeys-Leonetti sur la fin de vie. Cette pratique s'avère très peu répandue.
La loi autorise la sédation profonde et continue jusqu’au décès dans trois cas : si le patient "présente une souffrance réfractaire aux traitements alors qu’il est atteint d’une affection grave et incurable et que le pronostic vital est engagé à court terme" ; si, atteint d’une affection grave et incurable, il décide d’arrêter un traitement et que cette décision engage son pronostic vital à court terme et est susceptible d’entraîner une souffrance insupportable" et si "le médecin (…) arrête le traitement de maintien en vie d’un patient dans l’incapacité d’exprimer sa volonté". Il a même alors l’"obligation" de mettre en œuvre la sédation profonde et continue, "sauf si le patient s’y est opposé antérieurement". La ministre de la Santé avait demandé ce rapport, au moment où les Etats généraux de la bioéthique" avaient annoncé leur intention de se pencher sur la fin de vie. L’IGAS reconnaît que "les patients sont de plus en plus conscients de l’existence de leur droit à la sédation profonde et continue" et que ce nouveau droit a permis "d’ouvrir le dialogue avec les patients". Pourtant, le rapport constate que très peu de patients ont recourt à cette sédation ultime : à l’institut Gustave-Roussy, premier centre anticancéreux de France, seuls deux cas ont été référencés depuis février 2016. A la maison Jeanne-Garnier, spécialisée en soins palliatifs, une dizaine de cas sur 300 décès. Un seul cas dans les Hôpitaux de Paris, qui gèrent environ 18 000 morts par an et cinq cas à l’hôpital Paul-Brousse de Villejuif, sur les 400 décès survenus dans l’unité de soins palliatifs. L’IGAS alerte sur des statistiques inquiétantes, pointant des recours à la sédation "très variables d’un médecin et d’un établissement sanitaire ou Ehpad à un autre" sans trouver d’explications à cette hétérogénéité… De plus, il fait état d’un manque de formation criant parmi les personnels confrontés à la fin de vie, qui peinent à "apprécier des concepts essentiels comme ceux de souffrance réfractaire, de souffrance insupportable, de pronostic vital engagé à court terme"… Une "situation peu claire" et des pratiques "confuses" qui poussent l’IGAS à s’inquiéter "de la mise en œuvre de cette sédation qui ne lui paraît pas suffisamment rigoureuse". En outre, l'inspection des affaires sociales a déploré "l’insuffisant déploiement des soins palliatifs sur le territoire national, le manque de formation des professionnels, d’information du grand public, et surtout de données scientifiques pouvant permettre aux chercheurs de travailler dans ce domaine". Dans une recommandation, l’IGAS propose aux familles, de désigner un médecin "qui puisse prendre part aux décisions collégiales, par exemple lorsqu’il est question d’un arrêt des traitements ou de la mise en place d’une sédation profonde et continue jusqu’au décès". Pour le docteur Claire Fourcade, médecin à la polyclinique du Languedoc (Narbonne) et vice-présidente de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (Sfap), "ce serait un outil pour renforcer la confiance entre l’équipe médicale et les patients. Une manière de montrer que l’on agit en toute transparence". Elle déplore par ailleurs que le budget alloué aux soins palliatifs ait diminué de 20% au début de l’année. Enfin, parmi les trente recommandations émises pour améliorer la loi, les inspecteurs de l’IGAS excluent la possibilité de légaliser l’euthanasie ou le suicide assisté. "Quels que soient la législation et le souci d’assurer sa mise en œuvre, il n’y aura toutefois jamais de “bonne mort”, de “mort zéro défaut” ni de “bonne solution à la mort” : il faut toujours garder à l’esprit le caractère profondément singulier, douloureux et complexe de chaque situation de fin de vie." [Avec genetique.org]
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