Lors d’une conférence organisée par le CNPS, le directeur général de l’Assurance maladie a été la cible des critiques des professionnels de santé libéraux, qui s’estiment les oubliés du Ségur et du PLFSS 2021. Thomas Fatôme leur a répondu, en substance : attendez les prochaines négos conventionnelles. Le Centre national des professions libérales de santé (CNPS) organisait sa rentrée le 8 octobre, en présence de nombreux représentants des syndicats et fédérations de professionnels de santé libéraux. Il avait invité le Dr Thierry Houselstein, directeur médical de la MACSF, le Pr Jean-François Delfraissy, président du conseil scientifique Covid-19, et Thomas Fatôme, le directeur de la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam). Le thème du jour : les libéraux à l’heure de la pandémie. Et, sans grande surprise, c’est du côté du nouveau chef de l’Assurance maladie que les échanges ont été les plus virulents avec les représentants des professionnels. Ceux-ci ne comprennent pas pourquoi, après les efforts exceptionnels auxquels ils ont consenti depuis le mois de mars, les intentions présentées par le Projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) 2021 et le Ségur de la santé semblent les laisser de côté (300 millions d’euros dévolus, contre 8 milliards pour l'hôpital). La crise pèse sur la santé des soignants Thierry Houselstein a rappelé le tribut payé par les professionnels en présentant les chiffres de la MACSF pour le début d’année 2020, à travers l’état de santé des professionnels du point de vue de la mutuelle. Depuis le mois de mars, le nombre de dossiers d’incapacité ouverts est entre deux et trois fois plus important que pendant la même période en 2018 et 2019. Ce qui représente 5347 cas (1244 médecins, 659 généralistes), menant à trois décès, concentrés notamment dans l’Île-de-France et le Grand Est. Une hausse sensible des accidents est à noter, mais c’est surtout les arrêts de travail pour affections psychiatriques qui ont augmenté : leur nombre a été été multiplié par cinq. Qu’ils soient chirurgiens-dentistes, pharmaciens, infirmiers, médecins ou autres, les professionnels présents ont fait des constats similaires. En plus de la période de confinement durant laquelle ils ont tous été impactés, la crise continue de les affecter. Les mesures sanitaires leur imposent un ralentissement du rythme de consultations qui leurs prennent plus de temps, des missions supplémentaires ont été attribuées (dépistage, distribution des équipements de protection individuels, etc.), et des questions émergent face à des régularisation du dispositif de compensation d’activité, ou encore une possibilité de défiscalisation de ces revenus. La Cnam a répondu présente ? À ces critiques, Thomas Fatôme fait valoir les dispositifs mis en place par la Cnam et pour lesquels les retours ont été positifs. Il s’agit par exemple de l’ouverture de la téléconsultation, ou encore les nouvelles tarifications mises en place, pour les tests ou les interventions dans les Ehpad, par exemple. « Nous avons montré une capacité d’adaptation et pris en compte la chute d’activité », rappelle-t-il. « Deux cent mille professionnels de santé ont bénéficié d’un accompagnement financier, pour un montant d’1,1 milliard d’euros ». Il a aussi insisté sur le fait que la crise avait mis en lumière la nécessité d’une construction de la prise en charge sanitaire au niveau territorial, dans un esprit de coordination des acteurs, en accord avec la politique déployée dans le cadre de Ma santé 2022. Il encourage une construction s’appuyant donc sur les CPTS, qui se sont révélées efficaces pour faciliter la mise en place des dispositifs de réponse à l’épidémie (centres Covid, équipes mobiles, etc.). Les CPTS auront besoin d’être consolidées, en y mettant « plus de moyens humains et financiers », estime-t-il. « Nous sommes prêts à le faire. » Donner des outils (et de l’argent) La discussion sur le numérique a également pris de la place dans les échanges. Dans la feuille de route du Gouvernement, la mise en place de la e-prescription et de l’espace numérique de santé figurent en bonne place. Thomas Fatôme souhaite « faire sauter des verrous » de la téléconsultation ; Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF et Philippe Vermesch (SML) lui répondent qu’il y a un problème sur les tarifs de télé-expertise : 5 euros pour le requérant et 12 euros pour le médecin requis, c’est inadmissible pour le premier. « Ca ne fonctionne pas », estiment-ils à l’unisson. « Comment peut-on se reposer sur le premier recours en ville quand les moyens mis en œuvre sont si disproportionnés ? », s’interroge Jean-Paul Ortiz. « Je comprends les impatiences », répond le DG de la Cnam. « La crise a retardé les discussions, mais elles sont ouvertes », rassure-t-il. En attendant, François Blanchecotte, président du Syndicat des biologistes et du CNPS, demande comme ses confrères une réponse plus rapide. « Il est crucial d’assurer la continuité des soins, mais nous avons besoin d’aide. » Il en appelle à une modernisation du système, avec un minimum de complexité. Elle passera par les outils digitaux, certes, mais aussi par une révision du financement des actes, conclut-il.
La sélection de la rédaction
Limiter la durée de remplacement peut-il favoriser l'installation des médecins ?
François Pl
Non
Toute "tracasserie administrative" ajoutée ne fera que dissuader de s'installer dans les zones peu desservies (et moins rentables)... Lire plus