Smur sans docteur, régulation de l’accès aux urgences… Face à la crise, le député urgentiste Thomas Mesnier veut "secouer les tabous"
Co-rapporteur d’une mission sur les urgences en 2019, qui avait débouché en septembre sur le Pacte de refondation des urgences, le Dr Thomas Mesnier n’est pas à court d’idées. Dans une interview accordée au JDD, l’urgentiste-député de Charente, candidat du mouvement Horizons à sa réelection, estime que la crise actuelle "peut nous permettre de secouer les tabous". "Pour passer le cap de l’été, il faut se remettre en mode gestion de crise, avec un pilotage par les ARS, des personnes dédiées à la recherche de lits disponibles au niveau de chaque département, voire un appel aux jeunes retraités de la réserve sanitaire pour juillet-août."
A l’instar du Pr Philippe Juvin, du syndicat MG France ou de la Conférence nationale des URPS-médecins libéraux, Thomas Mesnier propose de généraliser la régulation de l’accès aux urgences par le 15, solution mise en place la nuit aux urgences du CHU de Bordeaux. "Ça fonctionne. C’est en place au Danemark depuis des années. Je l’évoquais en 2018. Généralisons-la pour recentrer les urgences sur leur vrai métier : les urgences vitales !"
Se gardant de jeter la pierre aux médecins de ville, qui "assurent déjà la majorité des soins non programmés en ville", l’urgentiste rejette la solution de l’obligation de garde qui risque de "faire fuir" les médecins. "Pourquoi ne pas organiser des gardes de télémédecine, dans les maisons médicales, pour épauler le médecin d’astreinte sur place ?", avance-t-il. Le député loue par ailleurs le concept de "Smur paramédical" mis en place à Château-du-Loir, dans la Sarthe, pour pallier l’absence de médecins. "Le Smur sans docteurs, ça existe partout dans le monde et ça marche. Même si ça heurte un dogme français."
"J’ai reçu une offre d’emploi à 10.000 euros pour une semaine"
Pour qu’en ville "la charge de travail soit mieux répartie", Thomas Mesnier suggère de "s’appuyer davantage sur les autres professionnels de santé" que sont les kinés (pour les entorses) et les pharmaciens (pour les infections urinaires) comme la loi le prévoit, en organisant un accès direct. "La crise peut nous permettre de secouer les tabous, les habitudes, les corporatismes." Les infirmières en pratique avancée doivent pouvoir "s’implanter partout" et "se substituer aux médecins pour un nombre plus important de tâches", plaide-t-il encore.
Enfin, le médecin considère qu’ "il est temps de casser la spirale inflationniste de l’intérim médical et infirmier". "J’ai reçu une offre d’emploi à 10.000 euros pour une semaine de travail de 9 heures à 18 heures dans un établissement du centre de la France ! Comment les hôpitaux peuvent-ils rester attractifs pour les jeunes praticiens face à de tels tarifs ?", s’insurge Thomas Mesnier. "La loi limitant le paiement des contrats courts doit être appliquée. Faisons-le dès la rentrée, appelle-t-il. Les médecins mercenaires arrêteront peut-être d’exercer un temps, mais ils sont comme tout le monde, ils ont besoin de travailler et reviendront dans les services."
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