Une fois par mois, l’interne en médecine générale et star des réseaux sociaux Et ça se dit Médecin livre, pour Egora, sa carte blanche sur un sujet qui fait l’actualité. Aujourd’hui, c’est contre la multiplication de "fake news" autour du vaccin contre le Covid-19, qu’il a voulu pousser un coup de gueule. Médecin remplaçant en cabinet et à la tête d’une communauté de 88.000 abonnés sur Instagram, il tente de concilier pédagogie et déconstruction d’idées reçues.
“Sur les réseaux sociaux, c’est très difficile de lutter contre les fake news. Que ce soit au cabinet ou en centre de vaccination, les patients nous sortent toujours ces mêmes appréhensions d’être des cobayes, que le vaccin rend stérile, qu’ils ont vu une vidéo d’un pompier affirmant que le vaccin provoque des AVC, qu’ils ont vu tourner des vidéos de gens qui arrivent à faire tenir des cuillère sur leur peau... C’est très compliqué pour nous, soignants, de gérer tout cela et de voir qu’ils ne vont pas se faire vacciner à cause de bêtises sur les réseaux sociaux.
Ça m'embête particulièrement parce que j’ai envie que mes patients et ma communauté soient en bonne santé. Sauf que c’est difficile de lutter contre des vidéos virales, qui font le buzz. Comme je suis très présent sur les réseaux sociaux et que j’ai une communauté avec moi, j’essaie de réagir. Lorsque j’ai vu cette vidéo d’un homme avec des téléphones qui tiennent sur ses épaules, ou même des cuillères en disant que c’est aimanté, j’ai voulu en faire une moi aussi pour montrer que c’est normal et que n’importe quoi peut coller avec la transpiration. Sauf que je reçois encore des messages de personnes me disant de regarder telle ou telle vidéo, image…
Je pense que l’ignorance mène à la peur. Il y a globalement beaucoup d'appréhensions.
Les vidéos de fake news n’aident pas à les rassurer. Le 20 mai, j’ai été contacté dans le cadre de la campagne de dénigrement de Pfizer. J’ai posté un message pour alerter sur les réseaux sociaux qu’un projet comme cela existait, mais ce n’est que quatre jours plus tard, quand Léo Grasset en a parlé, que tout s’est emballé. Je dois reconnaître que sur le coup, je pensais qu’on se moquait de moi et que ce n’était pas vrai. Que quelqu’un soit prêt à payer autant pour diffuser de fausses informations, ça me semblait fou. Comme je trouvais ça dangereux, j’ai quand même...
préféré prévenir sur Twitter et Instagram.
L’important, c’est de vaincre la peur et de ne pas rester dans l’ignorance. Quand on ne sait pas quelque chose, quand on doute, il ne faut pas chercher n’importe comment. Il faut aller vérifier auprès de sources fiables, la vérité. C’est pour ça que j’essaie de me rendre le plus disponible possible. Ça me prend du temps, ce n’est pas toujours gratifiant mais je ne peux pas le faire. Et je ne peux pas admettre que des gens ne vont pas se faire vacciner parce qu’ils pensent que l’injection va les rendre stériles, ou qu’ils vont avoir un AVC.
L’appréhension des patients, je la sens surtout quand je remplace en cabinet. Quand on pose des questions, il y a soit les réticents à la vaccination, soit ceux qui y sont clairement idéologiquement opposés. Au début, je l’avoue, j’essayais de discuter. Mais avec l’expérience, je me rends compte que ça ne mène malheureusement à rien. Lorsque vous avez, en face de vous, un patient qui vous affirme que c’est un complot, et que le Pr Raoult est un dieu, j’abandonne. Je ne peux pas lutter contre ça. Par contre, les personnes hésitantes, j’essaie de leur apporter une bonne information.
Mon but, ce n'est pas qu’ils se fassent vacciner à tout prix. Mais qu'ils fassent un choix éclairé, avec les bonnes informations. Si, en ayant connaissance des risques, des risques de la maladie, ils choisissent de ne pas se faire vacciner, c’est leur choix. Mais ce qui m’embête, c’est quand ils le font en croyant qu’ils vont faire un AVC ou qu’on leur injecte une pile dans le bras.
Je pense que les autorités sanitaires font bien leur travail. Le problème, c’est que ceux qui luttent contre la vaccination, qu’on appelle les “antivax”, ils vont être anti-système et donc se servir de leur campagne pour rejeter le vaccin. S’ils doutent, qu’ils aillent se renseigner afin que la bonne information leur parvienne. Or, quand on ouvre les réseaux sociaux, il n’y a que des vidéos d’antivax à la Une, qui sont sensationnelles. Les fausses informations se diffusent plus vite que les vraies, c’est dommage. "
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