"Le déficit en vitamine D est très fréquent à tous les âges et touche 50 à 60 % des Européens", selon le Pr Justine Bacchetta, chef de service néphrologie-rhumatologie-dermatologie pédiatriques aux Hospices civils de Lyon. Les causes sont multiples : le surpoids, la sédentarité, l’utilisation d’écran total, le phototype foncé, une alimentation pauvre en vitamine D. Les carences sévères peuvent conduire au rachitisme. "L’incidence mondiale est en augmentation, de 3 pour 100 000 en Europe et en Amérique, principalement chez les nourrissons", indique le Dr Anya Rothenbühler, endocrinologue pédiatrique à l’hôpital Bicêtre (AP-HP). En France, une étude conduite sur 38 patients, âgés en moyenne de 23 mois, montre une plus forte prévalence chez les garçons (74 %), originaires d’Afrique subsaharienne (50 %), d’Afrique du Nord (34 %) ou du Moyen-Orient (11 %). 78 % étaient nourris exclusivement au sein, et chez les enfants de deux ans ou plus, 22 % suivaient un régime pauvre en calcium. "Les motifs de consultation étaient la déformation des membres (63 %), des convulsions hypocalcémiques (21 %) ou un retard de croissance (11%)", rapporte le Dr Rothenbühler. Privilégier une supplémentation quotidienne
Les nouvelles recommandations de la Société française de pédiatrie, en cours de publication, visent une "simplification et un alignement sur l’Europe", annonce le Pr Bacchetta. Elles conseillent un apport de 400 à 800 UI par jour de vitamine D2 ou D3 pour les 0-2 ans et pour les 2-18 ans sans facteur de risque, et de 800 à 1 600 pour les 2-18 ans avec un ou plusieurs facteurs de risque. Ceux-ci sont la malabsorption, la maldigestion, l’insuffisance rénale chronique, le syndrome néphrotique, la cholestase, l’insuffisance hépatique, la mucoviscidose, la fragilité osseuse secondaire, une pathologie inflammatoire chronique, l’anorexie mentale, une pathologie cutanée, la prise de traitements contre l’épilepsie ou de corticoïdes au long cours. La diminution de la disponibilité ou de la prise de vitamine D nécessite une adaptation des doses. "La vitamine D reste un médicament, rappelle le Pr Bacchetta. Des questions se posent avant d’en prescrire : antécédents d’hypercalcémie, de lithiase, de néphrocalcinose, alimentation ou utilisation de compléments alimentaires." Attention aux surdosages 12 cas ont été rapportés de surdosages sévères chez des nourrissons. "Les signes cliniques sont principalement des signes digestifs (anorexie avec stagnation pondérale, vomissements, nausées, constipation, douleurs abdominales), une polyuro-polydipsie, des signes neurologiques (hypotonie, agitation, difficultés de concentration, confusion, troubles de la conscience, somnolence), de la fièvre chez le nourrisson", décrit le Dr Elodie Fiot, endocrinologue-diabétologue pédiatrique à l’hôpital Robert-Debré (Paris). "Quatre cas de complications cardiaques ont été observés (HTA, anomalies de l’ECG, arythmie), sept cas de néphrocalcinose et deux cas de complications osseuses." Le traitement consiste en l’arrêt de la vitamine D, une alimentation pauvre en calcium (arrêt ou diminution transitoire de l’allaitement, lait et eau pauvres en calcium), une hyperhydratation PO ou IV, l’administration de biphosphonates IV et de kétoconazole. "L’évolution est bonne, avec une normalisation de la calcémie sous une semaine et de la vitamine D sous deux mois." Ces intoxications peuvent être dues à des erreurs de prescription, d’administration, de fabrication ou d’étiquetage des produits, ou au mésusage de compléments alimentaires, notamment achetés sur internet. Aussi, il est conseillé d’interroger les parents sur les compléments donnés et de formuler des recommandations "claires et écrites". Evaluer les apports en calcium Pour le calcium, les recommandations sont de trois à quatre portions de produits laitiers par jour chez les 1-18 ans. Une supplémentation de 500 à 1 000 mg/jour doit être prescrite chez ceux consommant moins de 300 mg/jour. Le questionnaire de Fardelonne permet d’évaluer les apports, qui doivent être adaptés selon l’âge. "Le diagnostic de carence nécessite une évaluation des apports calciques alimentaires, des radios des poignets et des genoux, et une mesure du taux plasmatique de phosphatases alcalines (PAL), de parathormone (PTH), de 25(OH)D2, de calcium et phosphate, et l’excrétion urinaire de calcium", détaille le Pr Bacchetta. "Mais plus l’enfant est jeune, plus la phosphatémie est élevée. Attention aux erreurs de diagnostic !"
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