Après la colère, les explications. Prévenus au dernier moment par un “Urgent” de la Direction générale de la santé (DGS) qu’ils ne pourraient pas commander de doses la semaine du 8 mars afin de satisfaire “les besoins propres des officines”, les médecins libéraux ont tempêté, chaque jour de la semaine, allant même jusqu’à demander la démission de Jérôme Salomon ou dénoncer un “summum de la sottise technocratique”. Dès mardi, le ministère de la Santé assurait pourtant le service après-vente de cette décision, indiquant que 1,2 millions de doses étaient encore à disposition des médecins de ville, une marge “pas anodine à écouler” et que la réservation de doses serait à nouveau ouverte pour la semaine du 22 mars. Pas suffisant toutefois, pour les syndicats, qui pointent du doigt une opacité dans la gestion réelle des commandes et des livraisons. Pour tenter d’apaiser les tensions montantes, le Premier ministre a ainsi décidé d’organiser, mercredi 10 mars, une réunion impromptue avec tous les représentants des médecins libéraux, le ministre de la Santé et le directeur de l’Assurance maladie. “C’était une réunion d’explication. Le Premier ministre et le ministre de la Santé avaient senti qu’il y avait un mouvement de colère, de fronde et qu'il fallait calmer le jeu du côté des libéraux et leur faire entendre qu’il y avait une sorte de malentendu de leur point de vue. De notre point de vue, c’est un peu plus complexe que ça…", explique à Egora le Dr Jacques Battistoni, président de MG France. “Nous, on leur a expliqué que les médecins, en ville, fonctionnaient avec un approvisionnement en flux régulier. Et si on met le pied sur le tuyau d’approvisionnement, on va se retrouver avec un trou d’air”, s’agace-t-il encore en espérant avoir un état des lieux clair et limpide de la part du Gouvernement.
Mais l'argument a vite été balayé par Jean Castex, qui garde le cap : il n’y aura pas de médecins sans doses, car tout n’a pas été écoulé. Et dans le cas où cela arriverait, MG France a obtenu la garantie que tous ceux qui se retrouveraient sans doses pourraient se réapprovisionner en pharmacie. “Comment ? On ne sait pas bien, mais cela nous a été confirmé”, lâche le Dr Battistoni. Présent également à cette réunion, le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF, regrette la lourdeur du dispositif en général. “On est obligés de commander avant le mercredi en semaine 1, pour être livré en fin de semaine 2 et vacciner en semaine 3. Jean Castex nous dit qu’il y a 400.000 vaccins des premières commandes pas encore administrés par les médecins sur le terrain. Bien sûr, vu la lourdeur du système administratif et bureaucratique mis en place…”, dénonce-t-il. Bien que saluant la volonté de dialogue de la part du Premier ministre, il n’en reste pas moins dubitatif par les explications données. “Il faut absolument lever toutes les lourdeurs à la vaccination”, soupire-t-il. Un scepticisme partagé par le SML. “Les médecins libéraux n’ont pas vocation à être la variable d’ajustement des errements logistiques et encore moins des caprices des pharmaciens qui auraient pu attendre une semaine de plus, que les quantités de vaccins suffisantes soient réunies pour s’engager dans la vaccination. Le SML a entendu les arguments du chef du Gouvernement mais n’a pas été convaincu, d’autant que le ministre de la Santé persiste à maintenir sa logique d’approvisionnement en flux tendu. Une stratégie qui maintient les vaccinateurs dans l’incertitude du lendemain”, dénonce le syndicat dans un communiqué envoyé à l’issue de la réunion.
Quant à la Fédération des médecins de France, sa présidente, le Dr Corinne Le Sauder, exige un courrier d’excuses à l’adresse de tous les médecins “pour les erreurs de communication qui les ont rendu responsables d'un ralentissement de la vaccination lors même qu'on a constaté leur forte mobilisation mais des défauts de stock”. “Cette réunion se voulait sans doute d'accalmie. Elle témoigne in fine, une fois de plus, d'un réel mépris par la vacuité des propos et de l'absence totale de réelle stratégie vaccinale en phase avec une réelle absence de stratégie sanitaire”, assène-t-elle dans un communiqué co-signé avec le président d’honneur de la FMF, le Dr Jean-Paul Hamon.
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