Classé dans les 100 premiers aux ECN, il a choisi la médecine générale dans un désert

20/10/2018 Par Sandy Berrebi-Bonin
Témoignage

Il est de ceux qui réussissent tout ce qu'ils entreprennent. Et avec humilité en plus. A 32 ans, Rémi Croquet, père de deux enfants de 3 ans et demi et 4 mois est un carabin comblé. Il vient de se classer 92ème aux dernières ECNi. Une reconversion réussie pour cet ancien docteur en ingénierie.

  "Choisir entre des études de médecine et d'ingénieur avait été un dilemme au lycée. Sur le moment j'ai eu un peu peur des études de médecine, peur de ne pas savoir gérer le côté relationnel, le rapport à la souffrance. Comme je me plaisais bien dans les sciences dures, je m'y suis dirigé.  

Job plus humain

  J'ai donc fait des études d'ingénieur en mathématiques appliquées et j'ai passé une thèse de mécanique. Je me suis rendu compte que l'ingénierie n'était plus ce qu'elle avait été. Il s'agit plus de gestion de projets que de sciences. Ce dernier point ne me plaisait pas du tout. Même en poursuivant en thèse, le fait de devoir rester devant son ordinateur toute la journée n'était pas très épanouissant. J'ai alors cherché un job qui pourrait être plus humain. Je me suis fait des expériences dans le monde associatif, j'ai essayé de rencontrer des médecins pour qu'ils me parlent de leur boulot. J'ai compris que c'était ce qui me plaisait. A l'issue de ma thèse j'ai réintégré un cursus de médecine en Paces. Je n'ai pas pu bénéficier des passerelles parce qu'ils n'ont pas voulu de moi. Comme j'étais motivé je suis allé jusqu'au bout et je me suis inscrit en première année de médecine. La Paces s'est assez bien passée parce que dès le début on s'est retrouvé avec deux autres personnes, un peu plus âgées, qui étaient aussi en reconversion. On a vite formé un petit groupe de travail efficace puisque nous avions les mêmes méthodes de travail. Ça a été une année de boulot intense, mais dans une bonne ambiance. Il faut dire aussi que la fac de Rouen est assez loin des stéréotypes sur la Paces et ses coups bas entre carabins pour gagner des places. C'était une ambiance respectueuse.  

Deuxième de la Paces

  Je suis passé en deuxième année du premier coup. J'avais fini deuxième du classement de Paces. En ayant fait 8 ans d'études avant, je partais avec un avantage sur les autres. Dès le départ j'ai su que je voulais faire de la médecine générale, mais avec une hésitation sur le mode d'exercice entre les urgences et le cabinet. Finalement il y a eu une réforme entre les deux donc j'ai tranché pour le cabinet. C'est le blog de Jaddo qui m'a donné envie de choisir ce métier et ce mode d'exercice. Elle parlait très bien de son métier, du relationnel et du rôle social du médecin. Je ne connaissais pas bien la médecine générale et cela m'a fait prendre conscience que c'était plus que des renouvellements d'ordonnances. Le côté "au chevet du patient", la gestion des cas compliqués, les prises en charge sociales complexes, tout cela raconté au travers d'anecdotes, ça m'a donné envie. Dès la deuxième année de médecine, j'ai signé un contrat d'engagement de service public* (CESP). C'était cohérent avec mon projet de faire de la médecine générale. J'avais envie de m'installer dans un coin plutôt tranquille. Je n'avais pas envie de faire de la médecine de centre-ville, à 100 mètres du CHU. Le CESP correspondait à un mode d'exercice qui me convenait, cela me permettait de rémunérer mes études. Je n'ai pas beaucoup hésité. Je touchais 1 100 euros nets, plus les petits compléments des gardes pendant les études, cela me faisait des revenus confortables pour avoir une vie normale.  

Ce n'est pas parce que l'on fait de la médecine générale que l'on a le droit de rien savoir

  Je ne m'attendais pas à être classé 92ème aux ECN. J'avais travaillé de façon assez tranquille cette année. Je bossais avec méthode mais sans me mettre une grosse pression. J'avais le sentiment d'avoir géré. Je voulais être bien classé parce que ce n'est pas parce que l'on fait de la médecine générale que l'on a le droit de rien savoir. Je visais les 1000 premières places, mais je ne m'attendais pas à être dans les 100 premiers. C'était la bonne surprise. J'ai choisi de poursuivre mes études à Rouen. Je me rapprocherai peut-être de la mer pour mon installation. Le CESP n'est pas une contrainte. Cela ne me fait pas peur. En revanche, ce qui pourrait me faire peur, dans mon futur exercice, c'est la surcharge de travail. Ne plus savoir m'arrêter au détriment de ma vie de famille. J'imagine exercer plus tard dans une maison de santé pluridisciplinaire d'une ville de petite taille. Je veux pouvoir adresser des patients et avoir un travail en collaboration avec d'autres spécialistes. Travailler en maison de santé pourra me permettre de travailler avec d'autre généralistes et pouvoir parler des cas compliqués ou de nos pratiques par exemple. C'est important aussi de travailler avec des paramédicaux. Le côté médecin tout seul dans son cabinet ne m'attire pas du tout. L'intérêt de travailler en collaboration avec d'autres médecins généralistes permet aussi de répartir la charge de travail dans les périodes un peu critiques. Le côté isolement en termes d'acquisition de nouvelles connaissances pourrait me faire peur aussi. Mais je pense qu'à travers l'exercice en maisons pluridisciplinaires, on échange pas mal avec les collègues, on reçoit des étudiants. Il y a aussi les DPC. J'en ai discuté avec les médecins généralistes lorsque j'étais en stage et cela m'a rassuré. Ils étaient à jour de leurs connaissances." * Le CESP propose aux étudiants et aux internes en médecine une allocation mensuelle de 1 200€ bruts mensuels. En échange, les bénéficiaires s’engagent – pendant un nombre d’années égal à celui durant lequel ils auront perçu l’allocation et pour 2 ans minimum – à choisir une spécialité moins représentée ou à s’installer dans une zone où la continuité des soins est menacée.

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Mais quelle mentalité de geôlier, que de vouloir imposer toujours plus de contraintes ! Au nom d'une "dette", largement payée, co... Lire plus

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