Diabète et Covid-19 : le risque mieux évalué

20/10/2020 Par Corinne Tutin
Diabétologie

La pandémie Covid-19 est toujours un important sujet de préoccupation en diabétologie. Après le diabète de type 2, c’est au tour du diabète de type 1 d’inquiéter. Une étude du National Health Service (NHS) britannique, réalisée sur les 23 698 personnes décédées à l’hôpital de l’infection Covid-19 entre le 1er mars et le 11 mai 2020, vient en effet de montrer que le risque relatif de décès est multiplié, après ajustement, par 3,5 chez les patients diabétiques de type 1 tandis qu’il est doublé chez les diabétiques de type 2 en comparaison des non diabétiques, a expliqué le Pr Juliana Chan (The Chinese University, Hong Kong)*. Au Royaume-Uni, 0,4 % de la population a un diabète de type 1 et 4,6 % un diabète de type 2. Dans cette série, 1,5 % des patients décédés avaient un diabète de type 1 et 31,4 % un diabète de type 2. Le Pr Catarina Limbert (Hôpital Dona Estefania, Lisbonne) a cependant insisté sur le fait que « les diabétiques de type 1 à risque sont une population spécifique ». « Ce sont plus volontiers des patients de plus de 50 ans, avec un diabète de type 1 évoluant dans 80 % des cas depuis plus de 15 ans, très mal équilibré (taux d’HbA1C > 10 %) et s’accompagnant dans plus de 60 % des cas de comorbidités comme un infarctus du myocarde, un accident vasculaire cérébral, une insuffisance rénale ». L’âge moyen des diabétiques de type 1 décédés à la suite de la Covid-19 était d’ailleurs de 72 ans dans cette série britannique et celui des diabétiques de type 2 de 78 ans. Ces décès semblent avoir des causes multifactorielles. Mais, un bon contrôle glycémique constitue un facteur de protection contre les infections Covid-19 sévères. Dans le diabète de type 2, l’accroissement du risque associé à la Covid-19 était relevé, dans l’étude du NHS, dès que le taux d’HbA1c s’élevait au-delà de 7,5 %, avec un poids des comorbidités moindre que dans le diabète de type 1 mais encore très marqué. Cet élément est source d’inégalité de santé car « beaucoup de ces comorbidités, comme l’obésité, se rencontrent plus souvent au sein des catégories sociales défavorisées ou des minorités ethniques », a rappelé le Pr Chan.

Les données des CDC (Centers for Disease Control) américains sont plus rassurantes pour les patients les plus jeunes car seulement 1,7 % des 149 082 infections Covid-19 relevées aux États-Unis concernaient des moins de 18 ans, et le diabète ne figurait pas parmi les risques associés aux comorbidités. Une étude américaine conduite chez 64 jeunes patients suggère que la présentation clinique de la Covid-19 est, chez les enfants et adolescents diabétiques de type 1, assez proche de celle vue dans les autres infections respiratoires avec comme premier signe clinique l’hyperglycémie (50 %) puis la fièvre (41 %) et une toux sèche (38 %). Un autre fait rassurant est que les jeunes diabétiques parviennent tout de même à...

 poursuivre les mesures continues du glucose. La Pr Limbert s’est félicitée que l’infection Covid-19 ait fait rapidement évoluer la prise en charge du diabète infantile, avec le développement de la télémédecine, « parents et jeunes diabétiques s’impliquant davantage dans le suivi des données digitales ».   De possibles interactions médicamenteuses, cardio-métaboliques Le Sars-CoV-2 utilise le récepteur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine 2 (ACE2) membranaire pour entrer dans la cellule. Une question encore controversée aujourd’hui est de savoir s’il pourrait favoriser l’apparition d’un diabète en se fixant sur des récepteurs présents au niveau des cellules bêta-pancréatiques, puis en les détruisant. Pour le Dr Daniel Drucker (Mount Sinaï Hospital, Toronto, Canada), la réponse est plutôt négative. Selon ce chercheur, « l’expression de l’ACE2 est en effet limitée à l’endothélium et aux canaux pancréatiques sans s’étendre aux cellules bêta ». Malgré tout, l’infection Covid-19 pourrait avoir un retentissement métabolique. En effet, l’ACE2 intervient, à côté de la pression artérielle, sur la sécrétion d’insuline et l’action de cette hormone. Le récepteur de la dipeptidyl peptidase-4 (DPP4), qui constitue une cible de certains médicaments antidiabétiques oraux, est aussi un récepteur pour le Sars-CoV-2. « Or, la DPP-4 module les effets de nombreuses molécules pro-inflammatoires », a expliqué le Dr Drucker. « Pour l’instant, aucun antidiabétique n’a mis en évidence clairement ni d’effet délétère ni d’effet bénéfique au cours de l’infection Covid 19. Des études prospectives sont en cours pour analyser plus précisément leur impact », a mentionné le Dr Drucker. Des analyses conduites chez des diabétiques traités par la metformine infectés par la Covid-19 ont écarté un surrisque de mortalité, mais comme attendu, retrouvé un risque accru d’acido-cétose. « Il pourrait être judicieux d’arrêter ce médicament chez les diabétiques avec une infection Covid-19 sévère, en particulier en cas d’altération de la fonction rénale qui augmente le risque d’acido-cétose », a conseillé le Dr Drucker. Un pronostic plus sévère a, par ailleurs, été observé chez les patients sous insuline dans plusieurs études rétrospectives. « Mais, la présence de nombreux facteurs confondants (diabète plus grave, autres médicaments pris) complique l’interprétation des données ». Chez les patients avec une infection sévère mis sous dexaméthasone, le traitement devra, en tout cas, être adapté pour améliorer le contrôle glycémique, lequel peut être altéré par la corticothérapie, avec passage éventuel à l’insuline. Enfin, élément positif, la réponse anticorps (IgM et IgG) des obèses et des diabétiques infectés par la Covid-19 est aussi bonne que celle des non diabétiques. « Ce qui suggère qu’un vaccin pourrait être efficace chez eux ».  

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