Infections à cytomégalovirus : pas de dépistage chez la femme enceinte

16/09/2019 Par Corinne Tutin
Infectiologie
[CONGRES FRANÇAIS DE PEDIATRIE] Dépister le cytomégalovirus (CMV) n’est pas recommandé durant la grossesse, car son rapport bénéfices-risques est jugé défavorable par le Haut Conseil de la santé publique.

  En général bénigne chez l’enfant et l’adulte, l’infection à cytomégalovirus (CMV) peut être grave chez le fœtus, et source de surdités, d’atteintes cognitives persistantes. Autour de 3 400 fœtus sont infectés chaque année. Parmi ceux-ci, environ 40 à 50 développeront des séquelles neurodéveloppementales ou une surdité bilatérale profonde, et 400 à 500 des séquelles modérées (surdité légère). Chez les enfants infectés mais asymptomatiques, le développement est comparable à celui des enfants non infectés, mais 10 % d’entre eux pourront développer une surdité jusqu’à l’âge de 5 ans. Malgré ces risques, il ne semble pas utile de dépister les femmes enceintes, a considéré le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) en 2018. Et ce, pour plusieurs motifs, rappelés par le Dr Agathe Billette de Villemeur (HCSP, Paris)*. En premier lieu et fort malheureusement, on n’est pas sûr que les traitements disponibles - médicaments antiviraux ou immunoglobulines anti-CMV - soient efficaces ou suffisamment bien tolérés durant la grossesse. Ensuite, l’information à délivrer aux femmes enceintes pourrait être bien plus complexe que pour d’autres maladies atteignant les fœtus. A la différence de la toxoplasmose ou de la rubéole, où être séropositive pour la mère confère une protection à l’enfant, les études montrent, en effet, que le risque d’infection de ce dernier est équivalent que les femmes enceintes soient séronégatives (primo-infection) ou séropositives avant la conception (possibilité de réactivation du virus ou de réinfection par une nouvelle souche de CMV). Par ailleurs, une infection maternelle n’est pas forcément suivie d’une infection fœtale (taux de transmission variant entre 5 et 70 % en cas de primo-infection) et le risque de transmission et de séquelles varie en cours de grossesse. Si un dépistage était mis en place, beaucoup de femmes risqueraient de pratiquer une interruption médicale de grossesse (IMG) par précaution, alors que l’enfant ne serait pas forcément touché.   Des mesures d’hygiène vis-à-vis des jeunes enfants Absence de dépistage ne signifie pas pour autant absence de prévention. Le virus se transmet par la salive, les urines, les larmes et les sécrétions génitales. Certaines mesures d’hygiène, parfois encore mal connues, permettent de diminuer de moitié le risque d’infection durant la grossesse comme ne pas partager la nourriture ou les boissons des enfants de moins de 3 ans ou sucer leur cuillère ou leur tétine, ne pas les embrasser sur la bouche ou les larmes,  laver les jouets, bien se laver les mains après chaque change ou tout contact avec la salive, ou les sécrétions nasales d’un jeune enfant. Chez les nouveau-nés, il faudra penser à rechercher l’infection à CMV en cas de signe d’appel comme une hypotrophie (même en présence d’une cause obstétricale) et un test de surdité anormal ou douteux, même sur une seule oreille. Mais, on n’instaurera pas de traitement antiviral chez un enfant asymptomatique, en l’absence de démonstration à ce jour de son efficacité thérapeutique et de sa bonne tolérance.   *Haut Conseil de la santé publique : Avis relatif à la prévention de l’infection à cytomégalovirus chez la femme enceinte et le nouveau-né. 18 mai 2018. www.hcsp.fr

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