Opérationnel depuis 2012, le programme de télésurveillance Cardiauvergne, a inclus majoritairement des patients sortant d’hospitalisation cardiologique, principalement dans les départements du Puy-de-Dôme et de l’Allier. Il prend en compte de nombreuses informations, pouvant déboucher sur des alertes, a expliqué le Dr Marie-Claire d’Agrosa-Boiteux, cardiologue à Clermont-Ferrand : poids quotidien transmis par une balance connectée à la plateforme de suivi, données de traitements et de biologie fournies par le pharmacien et les laboratoires d’analyse, données provenant de la visite infirmière à domicile, des consultations des médecins généralistes et des cardiologues. Les résultats observés après 9 ans de fonctionnement, sur 2 500 patients d’âge moyen 76,7 ans, suivis en moyenne 13 mois, sont en faveur du programme. La mortalité chez les 1520 patients suivis un an était de 10,26 % alors que le taux en région Auvergne-Rhône-Alpes était de 25 % en 2013 et le taux d’hospitalisation était de 10,8 % contre 21,1 % pour le groupe historique de comparaison. Une étude sur 246 patients en 2013 a estimé le gain à 4 500 € par an par patient pour ce programme, dont le coût a été évalué à 600 € par an (contre 340 € pour le programme gouvernemental Étapes). Au vu de l’expérience, le Dr d’Agrosa-Boiteux estime que l’organisation et le matériel doivent être adaptés au profil des patients (balance connectée et recours à une infirmière à domicile chez les 65 % de patients âgés et avec des comorbidités, outils d’autosurveillance plus sophistiqués chez les plus jeunes). La durée optimale de la télésurveillance se situe entre 6 et 18 mois et celle-ci doit, pour faciliter prise en charge et observance, être mise rapidement en place après une hospitalisation ou un évènement aigu.
Osicat : résultats en demi-teinte Osicat est une étude ouverte randomisée multicentrique, qui a comparé les résultats de la télésurveillance à une prise en charge standard chez 937 patients, hospitalisés pour IC au cours des 12 mois précédents*. Le programme se fondait sur la surveillance quotidienne du poids et des symptômes d’IC. A 18 mois, le critère primaire d’évaluation (nombre moyen de décès et d’hospitalisations non programmées) n’a pas été significativement modifié (1,30 contre 1,46, p = 0,80), a admis le Pr Michel Galinier (Fédération de cardiologie, CHU de Toulouse), premier auteur de cette étude. « Cependant...
la télésurveillance semblait avoir, en analyse multivariée, une efficacité pour prévenir la première hospitalisation pour IC (- 21 %, p = 0,044) avec un effet plus marqué dans 3 sous-groupes prédéfinis de malades : ceux avec une IC de classe III ou IV (- 29 %, p = 0,02), ceux socialement isolés (- 38 %, p = 0,043), et enfin les malades adhérents, mesurant leur poids au moins 70 % des jours (- 37 %, p = 0,006)». D’autres études ont été négatives (Beat-HF) ou, à l’inverse, très positives en termes de mortalité et d’hospitalisations, telle l’étude allemande TIM-HF2, qui a pris en compte de nombreux paramètres pour la télésurveillance, dont l’ECG avec monitoring par des cardiologues. « Une des causes du semi-échec d’Osicat est peut-être liée au fait qu’en cas d’alerte l’infirmière de la plateforme conseillait au patient par téléphone de consulter son médecin traitant et on ne sait bien ce qui s’ensuivait », a considéré le Pr Galinier. Depuis lors, les cardiologues du CHU de Toulouse ont développé un autre programme dans le cadre du dispositif Étapes recourant à un algorithme fondé sur le poids et un questionnaire clinique avec accompagnement individualisé par des infirmières et intervention des cardiologues en cas d’alerte nécessitant une adaptation thérapeutique. Les résultats observés sur les 119 premiers patients monitorés sont positifs, car une téléconsultation a permis de régler le problème le plus souvent sans que le patient consulte à l’hôpital et seulement 18 patients (15 %) ont dû être hospitalisés pour IC aiguë.
La télésurveillance peut être mise en place dans le cadre du programme gouvernemental Étapes dès lors que les patients sont à risque de complications, et d’hospitalisations récurrentes. En pratique, l’acte de télésurveillance est rémunéré 110 euros pour le semestre au médecin cardiologue ou généraliste titulaire du DU d’insuffisance cardiaque la réalisant, tandis que le médecin accompagnant le malade reçoit 60 euros et le fournisseur 300 euros pour 6 mois, a expliqué le Dr Remi Sabatier (CHU de Caen). Seize solutions de télésurveillance déclarées conformes sont actuellement disponibles en France, lesquelles diffèrent par le nombre d’interactions avec le patient, le temps d’éducation. Mais, les patients doivent obligatoirement avoir une consultation d’une heure pour établir le diagnostic éducatif partagé. Les paramètres suivis sont le poids, et, suivant les systèmes, les symptômes, la fréquence cardiaque et la pression artérielle, la saturation en oxygène, avec parfois couplage à la pose de pacemakers.
Trois grands modèles de télésurveillance sont développés en France dans l’IC. L’une où le médecin gère à la fois télésurveillance et l’accompagnement thérapeutique. L’autre où il gère la télésurveillance et une infirmière de son équipe ou de l’équipe du fournisseur l’accompagnement du patient. Enfin un troisième modèle est souvent utilisé par les équipes hospitalières, dans lequel l’infirmière assure l’accompagnement thérapeutique, mais aussi la télésurveillance soit par protocolisation (algorithme) soit par délégation de tâche, le cardiologue et le médecin généraliste interagissant selon les besoins. Pour le Dr Sabatier, « les généralistes devraient probablement être davantage impliqués dans l’identification des patients à risque, et la télésurveillance en cardiologie libérale doit s’appuyer sur une coopération renforcée avec les infirmières, notamment pour gagner du temps médical ». Une étude réalisée sur la période 2009-2016 en Normandie a montré que les 66,7 % des patients qui interagissaient le plus avec le système SCAD* insuffisance cardiaque ont eu une meilleure survie à 5 ans que le tiers de malades ayant mal adhéré à la télésurveillance. « Il est essentiel de veiller à la motivation des patients pour qu’ils utilisent le système », a souligné le Dr Sabatier.
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