Délégation aux pharmaciens : "Les taux de reconsultation ne semblent ni anormaux ni inquiétants"
En France, les pharmaciens voient peu à peu leurs missions s'élargir. Dans quels pays les pharmaciens exercent-ils déjà de telles fonctions ? Ces prises en charge font-elles l'objet d'évaluations scientifiques ? Garantissent-elles la sécurité des soins ?... Entretien avec Dylan Bonnan, docteur en pharmacie de l’université de Bordeaux, doctorant en pharmacoépidémiologie à l’université de Laval (Québec).
Egora : Dans quels pays les pharmaciens exercent-ils déjà de nouvelles missions ?
Dylan Bonnan : Dans la littérature, la prise en charge par les pharmaciens de pathologies bénignes
est désignée par le concept de minor ailment services (MAS), qui sont apparus au Royaume-Uni au début des années 2000, souvent initialement pour pallier le manque de médecins. Des protocoles ont commencé à y être expérimentés pour des problèmes de santé courants, comme des maux de gorge, des infections urinaires ou des candidoses. Le Canada a suivi, avec des protocoles différents selon les provinces. Par exemple, au Québec, il faut que le médecin ait déjà prescrit un traitement par le passé pour la même pathologie. Le pharmacien peut alors faire un Trod angine pour délivrer un antibiotique. Cela existe aussi en Suisse, sur la base d’arbres décisionnels très bien construits.
Ces prises en charge ont-elles fait l’objet d’évaluations scientifiques a posteriori ?
La première revue systématique sur le Royaume-Uni date de 2013, ce qui commence un peu à dater, car les législations évoluent beaucoup. Au Canada, on voit de premiers essais contrôlés randomisés. En
France, l’université d’Angers est en train de monter une étude sur la prise en charge des cystites par les pharmaciens. C’est encore balbutiant, mais toutes les données vont dans le même sens, même si elles sont encore de faible qualité, notamment car il est difficile de mettre en place des groupes contrôles. Cependant, partout, les taux de résolution des symptômes sont conformes à ce qu’on attend, donc c’est rassurant sur l’efficacité.
Et la sécurité des soins est-elle assurée ?
Les taux de reconsultation ne semblent ni anormaux ni inquiétants. Ce serait difficile de comparer avec les taux de reconsultations en médecine générale, car ce sont des prises en charge qui ne sont pas vraiment comparables. L’idéal serait de connaître les taux d’hospitalisation à la suite de ces prises en charge. Mais comme pour ce type de pathologies les hospitalisations sont extrêmement rares, il faudrait avoir des cohortes de patients énormes pour voir quelque chose.
Les MAS permettent-ils de gagner du temps médical ?
Oui, on voit dans la littérature que la prise en charge par les pharmaciens permet de libérer du temps pour les médecins. En revanche, on note aussi que la charge de travail globale des médecins ne diminue pas, car le temps libéré leur permet de voir d’autres patients, notamment pour du suivi.
Comprenez-vous les réticences des médecins ?
Au Québec, je constate que cela fonctionne, car les professionnels se font confiance. C’est normal que cela prenne du temps à s’installer et cela passera certainement par la formation continue en attendant que les nouvelles missions fassent partie de la formation initiale de tous les pharmaciens.
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