Cris, insultes, vols, dégradations de biens… En Occitanie, près de 95% des médecins libéraux estiment avoir déjà dû gérer des situations de violences dans l'exercice de leur activité, dont 37% régulièrement. Seuls 10% des praticiens sont pourtant formés à la gestion de ces situations. C'est ce que révèle une nouvelle enquête menée en février 2024 par l'Union régionale des professionnels de santé (URPS) des médecins libéraux d'Occitanie. Publiée vendredi 8 mars, elle révèle que 75,9% praticiens occitans ont déjà été victimes de violences sur ces trois dernières années. 30% d'entre eux y ont même fait face plusieurs fois par an.
Alors que l'observatoire de l'Ordre des médecins estime à 23% la hausse des violences en 2022 par rapport en 2021, l'URPS d'Occitanie a souhaité "objectiver la situation" sur son territoire. Au total, 441 médecins libéraux de la région ont répondu au sondage. Ils sont en grande majorité des femmes, exercent à près de 64% en cabinet de groupe, et à 54,3% en milieu urbain.
D'après cette enquête, "la gestion des violences est plus récurrente en milieu semi-rural", où exercent 36,4% des répondants. "39% [d'entre eux] indiquent gérer eux-mêmes, ou leurs collaborateurs, des violences chaque jour, plusieurs fois par semaine ou plusieurs fois par mois", contre 36% en milieu rural et 35% en milieu urbain. Toutefois, 78% des médecins installés en milieu rural ont déjà été victimes de violences au moins une fois lors des trois dernières années. Ils sont 76% en milieu semi-rural, et 74% en milieu urbain.
Dans ce contexte, 26% des médecins d'Occitanie affirment se sentir en insécurité régulièrement, note le sondage. Et si 44,1% des praticiens interrogés ne prennent aucune mesure pour se protéger, 32,2% disent éviter d'être seuls, 21,6% ont aménagé spécifiquement leurs locaux, 17% ont adapté leurs horaires et 12,6% ont réduit ou arrêté les gardes.
La crainte de ces violences a pourtant des impacts réels sur leur pratique et leur santé. Pour certains, cela s'exprime par de l"insomnie", de l"anxiété", de la "colère", du "stress" ou une "moins bonne prise en charge des patients après avoir été victime de violences", liste l'étude, citant plusieurs praticiens. 37,5% des répondants estiment, en effet, ressentir un mal-être général, 31,5% une perte de motivation ou de sens, tandis que près de 22% disent réfléchir à la continuité de leur activité (déménagement, changement de mode d'exercice…).
Parmi les violences relevées par les médecins interrogés ces trois dernières années, 71,4% sont des atteintes à la personne. 20,3% sont des atteintes aux biens, tels que des vols ou des dégradations.
Ce sondage de l'URPS d'Occitanie révèle également que les femmes sont davantage victimes de violences que leurs homologues masculins (+15%). Elles portent pourtant moins plainte que ces derniers (-13%). Le nombre de médecins – femmes et hommes - déposant plainte reste globalement faible. Sur les 75,9% praticiens victimes de violences ces trois dernières années, seuls 18% ont fait une telle démarche.
Mais ces violences se sont-elles aggravées ? Pour les praticiens interrogés, le constat est sans appel. Ils sont 82,6% à estimer que, sur ces cinq dernières années, la situation relative à ces violences au sein de la profession s'est dégradée. Près de 35% le pensent même "fortement". "La situation au sein de nos cabinets devient très, très problématique. A noter également une forte hausse des agressions verbales envers nos secrétaires", raconte l'un d'entre eux. "L'ensemble des agents exerçant au sein du cabinet est concerné par les violences, me faisant remettre totalement en question ma légitimité et le sens du métier", ajoute alors un confrère, cité par l'URPS.
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