L’ancien directeur de Santé publique France affirme avoir alerté sur les stocks de masques dès 2018
Lancée mardi 16 juin, la commission d’enquête de l’Assemblée sur la gestion de la crise entend faire la lumière sur la vaste polémique des stocks de masques. Après avoir auditionné le Pr Jérôme Salomon, directeur général de la Santé, qui s’est défendu de toute mauvaise gestion de ces protections, affirmant avoir suivi les recommandations officielles, hier, c’était au tour de l’ancien directeur général de Santé publique France d’être entendu. Déplorant la “croyance” de nombreux dirigeants dans la “non efficacité des masques” grand public, le Pr François Bourdillon, directeur général de l’agence sanitaire depuis sa création en 2016 jusqu’en juin 2019, a affirmé devant la trentaine de député avoir alerté Jérôme Salomon sur l’insuffisance des stocks de masques de l’Etat. Et, dès septembre 2018. En effet, un rapport de l’infectiologue Jean-Paul remis à Santé publique France en août de la même année préconisait de prévoir un milliard de masques. Cela permettrait de fournir une boîte de 50 masques par foyer comprenant une personne malade, c’est-à-dire 20 millions de foyers en cas d’atteinte de 30% de la population. Pour le Pr Bourdillon, l’état des stocks “ne permettait pas une protection” du pays en cas d’épidémie, d’où l’importance de cette alerte.
Pourtant, seuls 100 millions de masques chirurgicaux ont été commandés à l’été 2019 pour...
reconstituer les stocks. Ces derniers ayant chuté de plus de 700 millions à une centaine de millions suite à la destruction des stocks jugés en mauvais état par le Gouvernement. Parmi ces 100 millions de masques commandes, 32 millions ont été livrés courant 2019, le reste est arrivé en février 2020, alors que l'épidémie de Covid-19 touchait déjà la France. François Bourdillon a également précisé à la commission d’enquête avoir réclamé au directeur général de la Santé une “doctrine claire” sur la destination de ces masques. Officiellement depuis 2013, les hôpitaux et cliniques devaient eux-même déterminer l'opportunité de constituer des stocks de masques pour protéger leur personnel, mais selon l’ex-directeur de SPF, il n’était pas clair si les stocks stratégiques gérés par l’agence sanitaire devaient couvrir les besoins du grand public ou aussi ceux des soignants. "Pas de commandes, pas de masques et pas d'instructions... On a le sentiment d'une gestion un peu à la petite semaine", a réagi le député LR Damien Abad. Également entendue sur ce point, Geneviève Chêne, qui a pris la direction générale de Santé publique France en novembre 2019, a précisé que quand le ministère lui a demandé de commander 1,1 million de masques FFP2, le 7 février, "il y a à ce moment là moins de 10 cas qui sont confirmés en France, on est encore dans une phase très précoce de l'épidémie en France".
Les deux spécialistes de la santé publique ont assuré que Santé publique France était préparée pour gérer cette crise. Même si, reconnaît François Bourdillon, a réduction de 20% des effectifs opérée en quelques années a aussi pu affecter l'efficacité de l'agence. Par ailleurs, ce dernier a également reconnu que l'effort budgétaire réalisé au moment du cyclone Irma en 2017 avait "peut-être impacté ce qui était prévu" pour l'achat de masques et de médicaments antiviraux. [avec AFP]
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