Les anticorps anti-récepteurs de la TSH sont très fréquents chez les patients ayant une thyroïdite de Hashimoto avec une orbitopathie

01/06/2016 Par Pr Philippe Chanson

La thyroïdite de Hashimoto ou thyroïdite chronique auto-immune est la plus fréquente des hypothyroïdies dans les zones non carencées en iode. L’insuffisance thyroïdienne est observée chez environ 10 % de la population et sa prévalence augmente avec l’âge. Les patients ont des concentrations élevées d’anticorps antithyroïdiens, une infiltration lymphocytaire de la thyroïde et une destruction des follicules. L’association avec la maladie de Basedow et le fait que la maladie de Basedow puisse évoluer vers l’hypothyroïdie et vice versa indique que les deux désordres sont, sur certains aspects, très liés malgré leur présentation clinique différente. Les anticorps anti-récepteurs de la TSH dans leur variété stimulante ont été les premiers identifiés comme à l’origine de l’effet stimulant de la thyroïde, responsable de l’hyperthyroïdie chez les patients ayant une maladie de Basedow. Mais ces anticorps, qui sont habituellement polyclonaux, peuvent aussi bloquer l’effet de la TSH plutôt que l’activer et l’on sait maintenant que des maladies de Basedow peuvent évoluer vers une hypothyroïdie du fait de la prédominance d’anticorps anti-récepteurs de la TSH bloquants par rapport aux anticorps anti récepteurs de la TSH stimulants. Comme certains patients hypothyroïdiens présentent une orbitopathie comparable à celle observée au cours de la maladie de Basedow, les auteurs c de cette étude se sont interrogés sur la fréquence des anticorps anti-récepteurs de la TSH au cours de la thyroïdite de Hashimoto, et en particulier des anticorps bloquant le récepteur de la TSH. Il s’agissait d’une étude d’observation longitudinale qui a été menée à Mayence en Allemagne qui a inclus 1055 sujets. Il s’agissait de patients suivis dans une consultation conjointe Ophtalmologie/Thyroïdologie. Les anticorps anti-récepteurs de la TSH ont été mesurés avec un bio-essai utilisant les cellules CHO exprimant un récepteur chimérique de la TSH et une luciférase dépendante de l’AMP cyclique. Sur 700 patients consécutifs et non sélectionnés (porteurs d’une thyroïdite de Hashimoto définie comme une augmentation d’au moins 5 fois les titres d’anticorps anti-TPO, avec ou sans anticorps anti-thyroglobuline et une euthyroïdie ou une hypothyroïdie associée à un aspect hétérogène hypoéchogène à l’échographie thyroïdienne), 44 (6 %) avaient une orbitopathie d’origine thyroïdienne patente. Les patients avec thyroïdite de Hashimoto et une orbitopathie thyroïdienne étaient plus âgés, étaient de plus gros fumeurs et présentaient moins d’autres maladies auto-immunes. Tous les sujets témoins étaient négatifs pour les anticorps anti-récepteurs de la TSH. En revanche, les anticorps anti-récepteurs de la TSH étaient positifs chez 30 des 44 patients ayant une thyroïdite de Hashimoto associée à une orbitopathie thyroïdienne (68.2 %) et chez 36 des 656 (5.5 %) des patients ayant une thyroïdite de Hashimoto (p < 0.001). En comparaison des patients ayant une thyroïdite de Hashimoto sans orbitopathie, les anticorps anti-récepteurs de la TSH étaient à un titre supérieur chez les patients ayant une thyroïdite de Hashimoto et une orbitopathie thyroïdienne. Les titres les plus élevés d’anticorps anti-récepteurs de la TSH étaient notés chez les patients ayant une orbitopathie thyroïdienne active et sévère en comparaison de ceux qui avaient une orbitopathie peu importante et inactive. Les odds ratio de positivité des anticorps anti-récepteurs de la TSH pour la risque d’orbitopathie thyroïdienne ajustés pour le sexe et l’âge étaient de 55.9 (IC 95 % = 24.6-127, p < 0.0001) alors que l’odds ratio pour une multiplication par 10 des titres d’anticorps anti-récepteurs de la TSH étaient de 133 (45-390, p < 0.0001). En conclusion, la présence d’anticorps anti-récepteurs de la TSH est fortement associée à l’orbitopathie thyroïdienne chez les patients ayant une thyroïdite de Hashimoto et les anticorps anti-récepteurs de la TSH pourraient contribuer à la pathophysiologie de l’orbitopathie thyroïdienne.

 
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