La pollution atmosphérique : un "nouveau" facteur de risque d’insuffisance cardiaque
« La pollution atmosphérique fait partie du top 10 des facteurs de risque de mortalité. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 7 millions de décès en 2020 sont en rapport avec la pollution extérieure et intérieure. En France, 48 000 à 60 000 morts / an sont attribués à la pollution atmosphérique. Le phénomène est croissant : on constate une augmentation de 20% des décès entre 1990 et 2018, due, notamment aux particules fines (PM) » souligne le Pr Pierre Gibelin, cardiologue (université de Nice). Il existe deux types de polluants : les gaz et les particules fines. Parmi les gaz, le plus important est l’ozone mais aussi les oxydes d’azote (NO, NO2, Nox) produits par les moteurs thermiques, les COV dont le benzène (peintures, solvants, parfums, colle), le CO (transport), le SO2 (chauffage, transport), les hydrocarbures aromatiques polycycliques dont le benzopyrène (essence, diesel). Les PM se répartissent entre les PM<10µm (ou PM 10), les PM<2,5µm (ou PM 2,5), les ultrafines, les nanoparticules. Elles sont les principaux polluants au niveau cardiovasculaire. De 70 à 80% de la mortalité due à la pollution est d’origine cardiovasculaire, 11 à 15% d’origine pulmonaire (BPCO) et 6% par cancers. Une étude (Kindi et coll, Nat Rev Cardiol 2020) indiquant une association entre PM 2,5 et mortalité par infarctus et AVC, confirme l’absence de seuil (courbe linéaire) ce qui a incité l’OMS à l’abaisser à 5. Une étude rétrospective (Simoes F et Gibelin P, Scientific Report 2022) incluant 43 400 patients a porté sur la pollution et l’IC en région Paca. L’observatoire régional des urgences (ORUPACA, 47 centres d’urgence) a rassemblé les données de pollution quotidienne (Atmosud, 84 capteurs) de 357 zones de la région. Les résultats ont montré une association significative entre les pics de pollution (O3, NO2, PM) et l’admission aux urgences pour décompensation cardiaque ou oedème aigu du poumon (OAP). L’effet de chaque polluant est significatif (PM2,5 : risque relatif de 16% ; O3 : RR de 14% ; PM10 : RR de 13% ; NO2 : RR de 11%). Selon le polluant et l’intensité de la pollution, le pic d’admission peut être le jour même où le lendemain, ou encore deux pics (précoce et tardif) sur une dizaine de jours suivant une courbe en U ou un pic retardé vers J3 soit en U inversé. Une autre étude, danoise (Lim et al, Am Heart Asso 2021), incluant 22 189 infirmières de plus de 44 ans, suivies de 1999 à 2014, a montré un risque accru d’IC pour une augmentation de 5µg/m3 de PM 2,5 (RR 1,17), de 8µg/m3 de NO2 (RR 1,12), ainsi que du bruit de 9,3 dB, la pollution sonore ayant été étudiée également. Les mécanismes en jeu pouvant entraîner les maladies CV « La pollution entraîne une inflammation aiguë et chronique, surtout avec les particules fines. Elle favorise l’hypercoagulation, augmente le risque thrombotique et l’agrégation plaquettaire. Elle engendre une vasoconstriction. Une élévation de 10 µg/m3 de PM 2,5 augmente la pression artérielle de 8,5 mmHG. Elle a également un effet pro-athérogène avec une augmentation de l’épaisseur intima media et du score calcique », conclut le Pr Gibelin.
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