Fusionner DPC et certification périodique : la solution radicale de la Cour des comptes
La juridiction financière constate dans un rapport publié ce mercredi 25 septembre que les deux dispositifs sont à la fois redondants et en partie contradictoires. Elle propose de supprimer l’obligation de DPC au profit de celle de certification périodique qui se met actuellement en place.
Comment articuler l’obligation du développement professionnel continu (DPC), créé en 2009, et celle, nouvelle, de certification périodique, entrée en vigueur le 1er janvier 2023 pour sept professions de santé disposant d’un ordre ? Depuis des mois, la question donne lieu à maintes réflexions, interrogations et supputations. Dans un rapport de 90 pages sur la formation continue des médecins commandé par l’Assemblée nationale, alimenté d’une vingtaine d’auditions et rendu public le 25 septembre, la Cour des comptes propose une solution radicale : supprimer l’obligation de DPC et ne garder que celle de certification périodique.
On sait les fameux Sages de la rue Cambon peu portés sur les excès de dépenses publiques ou les millefeuilles institutionnels. Mais éviter une "absurdité administrative" et des "coûts inutiles" en maintenant un "double système" qu’ils considèrent comme "à la fois redondant et en partie contradictoire" est loin d’être leur seul argument.
Complexité voire contradiction
La juridiction financière indépendante invoque aussi l’intelligibilité du système pour les professionnels et leur adhésion, la confiance des patients et au final la solidité des deux dispositifs de formation continue. Tous ces éléments risqueraient en effet d’être ébranlés si un médecin obtenait sa certification périodique sans valider son obligation de DPC, ou l’inverse, comme l’imagine la Cour des comptes dans un raisonnement qui ne semble pas irréaliste.
Sans même aller jusqu’à l’hypothèse d’une telle contradiction, le rapport donne à voir "une grande complexité". En effet, les portées du DPC et de la certification périodique à la fois se recoupent et diffèrent. Deux des quatre blocs de la certification périodique reprennent le périmètre du DPC : l’actualisation des connaissances et des compétences, le renforcement de la qualité des pratiques professionnelles. Les deux blocs supplémentaires sont la santé du médecin et l’amélioration de la relation avec les patients. Demain, des médecins devront donc se former, dans l’optique de la certification, à ce second thème… pour lequel des formations existent déjà dans le cadre du DPC. Comment alors savoir laquelle des deux obligations une telle action de formation viendra valider ? Faudra-t-il revoir le contenu des blocs ?
Principe de réalité
A la lecture du rapport, transparaît un principe de réalité. Le DPC fait l’objet de critiques (notamment sur l’inadaptation de certaines actions de formation aux besoins du terrain), et il n’est pas validé ni même connu de tous les médecins*… alors pourquoi les accabler, dans un même objectif de formation continue, d’une obligation supplémentaire ? Le contrôle par l’Ordre des médecins de l’obligation de DPC s’améliore, reconnaît la Cour, mais, comme elle l’avait déjà écrit en 2019 et en 2021, il reste insuffisant… alors pourquoi charger l’Ordre d’une autre mission similaire ? Un "tiens" sans doute vaut mieux que deux "tu l’auras" peut-être, semble dire la Cour des comptes.
A l’inverse, une fusion des deux dispositifs permettrait peut-être de mieux évaluer les actions de formation et leur impact, de contrôler avec plus d’efficacité l’obligation de formation continue des médecins et de réguler avec plus d’exigence le secteur des organismes de formation. Sur ce dernier point, la Cour ne s’attarde guère sur d’éventuelles conséquences pour l’Agence nationale du DPC (ANDPC) d’une suppression du DPC. Réfléchissant à un label pour les organismes de formation continue dans le secteur de la santé, elle imagine en tout cas que, "au regard de son expertise en matière de régulation [des organismes], l’ANDPC peut être envisagée pour assurer ce rôle, ce qui supposerait une évolution de ses missions pour qu’y soit intégré le champ de la certification".
Le Conseil d’Etat, déjà…
En attendant son éventuelle fusion avec le DPC, les contours de la certification périodique ne sont pas encore nets, trois années après l’ordonnance qui l’a mise en place, et malgré trois premiers décrets d’application en 2022 et 2024. "Les médecins ne savent donc toujours pas comment la respecter", observe la Cour, implacable. Deux autres décrets sont attendus.
Leur préparation et la mise en place de la certification périodique pourraient constituer une occasion d’avancer sur une fusion avec le DPC, suggère la Cour des comptes. Il lui reste à espérer d’être plus écoutée qu’une autre haute juridiction française. Il y a cinq ans et demi, le Conseil d’Etat avait estimé que la certification périodique avait "vocation à se substituer" au DPC. L’idée était visiblement restée sur la table.
* Lors du dernier cycle triennal 2020-2022, sur la base des données de l’Ordre, seul un médecin sur sept a satisfait à son obligation de DPC, note la Cour des comptes. Selon elle, cette statistique ne signifie pas forcément que si peu de médecins se forment, mais plutôt que certains d’entre eux "ne respectent pas leur obligation de rendre compte des actions auxquelles ils participent".
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