"Le patient d'aujourd'hui évolue dans une société ou tout est évalué, classé, noté. A l'heure où il utilise depuis bien longtemps au quotidien des outils qui lui permettent d'apprécier de nombreux services, comment imaginer qu'il n'ait pas la même exigence vis-à-vis de son médecin ? D'ailleurs, des classements ou des notes commencent à émerger ici ou là, de façon non contrôlée, désordonnée, critiquable et inadaptée. Il est temps que la profession s'en saisisse", a déclaré le Pdt Jean-Paul Ortiz, en introduction d'une conférence de presse de la CSMF, sur le thème de la recertification. Le leader de la Confédération a rencontré le Pr Serge Uzan, chargé par Agnès Buzyn de mener une mission sur un thème largement promu par l'Ordre des médecins. La centrale, qui veut épouser ce mouvement, a souhaité déterminer les objectifs de ce processus, exposer comment on pouvait avancer sur son contenu et son organisation, définir qui devait le gérer et enfin, montrer quels étaient les facteurs de réussite. "C’est-à-dire les facteurs d'acceptabilité" par le corps médical.
L'objectif de l'exercice est d'améliorer la qualité de la prise en charge des patients, de manière uniforme sur le territoire, alors que l'environnement est en mouvement. Toutes les études le prouvent, à l'heure où notre France vieillit et où les maladies se chronicisent, "le maintien des connaissances et le travail en équipe permettent de diminuer la sinistralité (…) L'évolution des différentes technologies qui envahissent nos exercices médicaux, l'apprentissage de nouvelles techniques nous obligent à garantir l'acquisition de ces évolutions à l'ensemble de nos patients, mais aussi à nos correspondants", a estimé le président. Alors que divers modèles sont utilisés dans les pays industrialisés, la France "développe une culture originale, basée sur une analyse des procédures dans un premier temps et qui intègre aujourd'hui, beaucoup plus une analyse des résultats". Pour la CSMF, le terme "recertification" n'est pas le bon, car il sous-entend que le médecin a déjà été certifié, ce qui n'est pas le cas. "Il s'agit plutôt de garantir au patient que le médecin a effectué une démarche de renouvellement et d'actualisation de ses connaissances, mais également de ses compétences en l'intégrant dans sa pratique quotidienne." Une démarche qui doit "faire également l'objet de valorisation". Le socle de la démarche de recertification doit être celui de la FMI, qui a abouti au diplôme de médecine. "Ce socle commun sera dans les années qui viennent, un socle enrichi par le portfolio de l'interne, avec l'ensemble des éléments détaillant la formation initiale qu'il aura reçue", estime le syndicaliste. Dès la FMI, un cycle de recertification doit être défini, une périodicité de 5 à 6 ans (soit 2 cycles d'obligation triennale de DPC) semblant la plus adéquate. "Il s'agit bien d'un processus continu, nécessitant la garantie d'un cycle complet de mise à jour des connaissances tout au long de la vie professionnelle".
Outils déjà disponibles : formation médicale continue, évaluation des pratiques professionnelles dans les établissements de soins, DPC, accréditation des spécialités à risque, certification des établissements de soins, normes ISO notamment dans les secteurs médico-techniques. La CSMF imagine que d'autres outils devront être intégrés à cette recertification telles que des formations cognitives complémentaires tout au long de la vie, des participations à des réunions entre pairs, enseignement, recherche, des réunions pluridisciplinaires, des activités de maitre de stage universitaire, etc. La CSMF imagine une double démarche : individuelle et d'équipe. La "satisfaction patient" sera un élément indispensable, sous forme de critères qui définissent comment le patient perçoit la qualité de sa prise en charge, estime le syndicat. Chaque processus de recertification devra être élaboré par chacune des spécialités à l'intérieur des conseils nationaux professionnels, avec des dimensions globales communes "médecins", intégrant notamment les risques psychosociaux, la participation à des registres, l'intégration de l'innovation dans sa pratique. Le processus sera volontaire pour l'ensemble des médecins installés, mais sera rapidement obligatoire pour les jeunes générations, avec une mise en place progressive. En cas d'insuffisance, un accompagnement personnalisé pour ces praticiens devra être prévu. En outre, l'ensemble des organismes participant au processus de recertification devra être évalué, ensuite l'impact sur les usagers devra être mesuré, et ultérieurement, sur l'ensemble de la population. Qui finance ? Il s'agit d'un choix de santé publique, imposé par la tutelle. Il doit être financé par la collectivité, estime la CSMF. Ce qui concerne soit l'assurance maladie, soit des fonds nationaux ou régionaux. "Les exigences spécifiques à chaque spécialité et à chaque professionnel doivent être financées dans le cadre de l'activité libérale, par le médecin lui-même, et faire l'objet d'un avantage fiscal", plaide la Confédération. En matière de valorisation – pour la partie organisée par l'Etat – le médecin pourrait bénéficier d'une indemnisation financière, comme pour le DPC. Ou bénéficier d'une aide financière, sur le modèle des spécialités à risque dont une partie de leur assurance en responsabilité civile est prise en charge. Pour la partie individuelle, "la valeur des honoraires doit tenir compte de cette charge supplémentaire ou faire l'objet d'un financement complémentaire", estime la Confédération. La recertification pourrait permettre d'accéder à un secteur d'exercice du type "secteur promotionnel", proposé à une époque par la CSMF (compléments d'honoraires encadrés) ou d'accéder à l'Optam pour les médecins du secteur 1. En bref, proposer une évolution de carrière. Qui doit gérer le dispositif ? La CSMF propose la création d'une Commission chargée de la recertification des professionnels de santé, qui garantirait une indépendance de l'ensemble du processus, et tiendrait le rôle de "tiers de confiance". Cette commission réunirait tous les acteurs impliqués, en deux commissions : l'une pour les médecins et l'autre pour les paramédicaux. Elle pourrait être abritée par la Haute autorité de faculté, qui doit occuper un rôle majeur tant pour la FMI que pour la mise à jour des connaissances. L'Ordre des médecins aura à enregistrer tous les cinq à six ans la validation du processus de recertification : "il n'a ni la compétence ni la vocation à être acteur dans la gestion du processus", souligne le syndicat. Les conseils nationaux professionnels (CNP) ou le Collège de médecine générale (CMG) seront mis à contribution pour élaborer par spécialité les objectifs et les outils spécifiques. Mais les CNP "n'ont ni la structure ni la vocation à gérer ce dispositif de recertification". L'Agence nationale du DPC serait le lieu du dépôt du "portfolio" et la Haute Autorité de santé serait l'acteur qui doit élaborer les conférences de consensus permettant de garantir la mise en à jour des connaissances ou les labelliser lorsqu'elles ont été portées par d'autres structures. Pour la CSMF, trois conditions doivent être remplies pour que la démarche de recertification soit suivie par la profession : la confiance dans le processus, la valorisation de la démarche et l'indépendance de l'ensemble. Ce processus pourrait s'intituler : Certificat d'engagement de qualité et de pertinence (CEQP), Evaluation de la pertinence et des pratiques professionnelles (E3P), ou Actualisation des compétences et des pratiques (ACP).
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