Interdiction de tomber enceinte, plafond de verre... 300 soignants dénoncent la misogynie à l'hôpital
“Parmi les 8.733 nouveaux inscrits à l’Ordre des médecins en 2018, 59% étaient des femmes. Et si 53% des postes de praticiens hospitaliers à temps plein sont occupés par des femmes, elles ne représentent pourtant que 22,2% des effectifs des professeurs d’université”, déplorent les signataires d’une tribune publiée dans Le Monde.
Initié par Anna Boctor, pneumo-pédiatre et ancienne chef de clinique des Hôpitaux de Paris, et Lamia Kerdjana, anesthésiste-réanimatrice, ancienne chef de clinique des Hôpitaux de Paris et présidente du syndicat Jeunes médecins Ile-de-France, ce texte s’attaque à de nombreux clichés qui, malgré la féminisation du métier, perdurent au sein des hôpitaux français.
A commencer par un cliché, “bien ancré dans l’esprit populaire”, qui est qu’une femme ne peut être qu’ “infirmière ou secrétaire, mais pas médecin ou chirurgien”. En 2018, selon une étude menée auprès de plus de 3.000 médecins hospitaliers, “69% des femmes déclaraient qu’elles auraient fait une carrière différente si elles avaient été un homme et 43% avoir déjà fait face à de la discrimination liée à leur sexe au travail”.
Trop souvent victimes de discriminations liées à la grossesse (une femme médecin sur trois selon une étude publiée en mars 2019 par l’intersyndicale Action praticiens hôpital), les signataires expliquent avoir notamment été “nombreuses” à s’être vues interdire par leurs chefs de “tomber enceintes durant deux ans pour avoir le poste” de chef de clinique en CHU. “Comme si la décision pour une femme d’avoir un enfant pouvait revenir à un chef de service !”, s’insurgent-ils.
“Certaines ont pleuré après un violent entretien avec leur chef de service à l’occasion de l’annonce de leur grossesse. D’autres ont subi des réflexions culpabilisantes quant à la charge de travail laissée aux collègues, voire ont subi une surcharge de travail avant ou au retour de leur congé maternité, parce qu’elles devaient ‘payer’”, rapporte le collectif, qui précise que 6% des femmes médecins ne prennent pas ou écourtent leur congé maternité “à cause de la pression ressentie, ou pour ne pas passer à côté d’une progression de carrière”.
Certaines font parfois même face à des contrats qui prennent fin “en toute illégalité et impunité, à cause d’une grossesse”. D’autres (au moins 15%), à des situations de harcèlement qui aboutit à une sanction prononcée à l’égard du coupable que dans 7% des cas. Les signataires de la tribune appellent de fait à mettre fin à cette “misogynie systémique”, “aussi bien pour les femmes que pour l’avenir de l’hôpital”. Nombreuses sont celles qui, en effet, “ont décidé de quitter l’hôpital public, qui pourtant se meurt, en raison de ces discriminations”.
Ils demandent ainsi de briser le plafond de verre, d’établir le remplacement des femmes en congé de maternité, d’allonger le congé paternité, “qui doit être de la même durée que celui des mères afin de ne pas disqualifier les femmes”, mais aussi la révision des critères de sélection pour devenir universitaire afin qu’ils soient “transparents, évalués et surveillés avec sanctions à la clé”.
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