Tribune contre l'homéopathie : le CDOM 92 attaque un généraliste
Le Conseil départemental de l'Ordre des médecins des Hauts-de-Seine a décidé de s'associer à la plainte des homéopathes contre un médecin généraliste du département.
Un médecin généraliste, installé dans les Hauts-de-Seine, a reçu un courrier du Conseil de l'Ordre de son département auquel il ne s'attendait franchement pas. En quelques mots, le président du CDOM lui signale que le Conseil a décidé de s'associer à la plainte déposée contre le généraliste par le Syndicat de la Médecine Homéopathique, notamment. Ce qu'on lui reproche ? D'avoir signé la tribune des 124 médecins contre les médecines alternatives.
"Ça me fend le cœur de voir que le CDOM de mon propre département ne me soutient pas et au contraire m'enfonce alors que le débat porte sur la liberté d'expression, déplore le généraliste auprès d'Egora. Notre combat du collectif FakeMed : "parler médecine", diffuser des informations concernant les procédés thérapeutiques insuffisamment éprouvés, et pas du tout attaquer personnellement des confrères homéopathes. Dommage que ça déplaise à certains."
Cliquer pour agrandir "Ce qui nous pose problème, c'est la façon dont les choses se sont passées, explique le Dr Christian Hugue, président du Conseil départemental des Hauts-de-Seine. Ce que nous signalons relève de la confraternité. Les homéopathes sont des médecins généralistes qui ont une démarche particulière. Les autres n'ont pas à les dénoncer publiquement, comme cela s'est fait avec cette tribune." Le Dr Hugue, angiologue à Sceaux, tient à préciser que la plainte concerne la forme, et non pas le fond de la question. "Il n'appartient pas à l'Ordre, ni départemental ni national, de trancher sur l'utilité de l'homéopathie", ajoute l'élu ordinal. En mars dernier, 124 médecins décident de publier une tribune appelant à la rigueur scientifique et alertant sur les risques encourus par les patients qui se détournent de la médecine conventionnelle. La publication fait grand bruit. Elle est rapidement signée par des centaines d'autres médecins, mais aussi très décriée par les défenseurs de l'homéopathie.
Plusieurs syndicats, dont Union Collégiale et le Syndicat de la Médecine Homéopathique, décident alors de porter plainte contre les premiers signataires de la tribune pour non confraternité. Des plaintes sont alors déposées, et les médecins concernés sont convoqués par leurs Conseils départementaux. "Les propos que contient la tribune litigieuse (…) sont offensants, diffamatoires et même insultants envers l'Ordre, les pouvoirs publics, les praticiens ainsi que les patients ayant recours aux médecines visées et autorisées, dépassant ainsi les limites de la liberté d'expression", indique notamment le texte de la plainte déposée. Comme le prévoit la procédure, des réunions de conciliation sont organisées. Mais, dans les cas dont Egora a eu connaissance, les plaignants ont choisi de ne pas s'y rendre, réclamant des excuses préalables de la part des médecins mis en cause. Cette "carence" entraîne une transmission directe des plaintes aux chambres disciplinaires de première instance. La procédure engagée par le CDOM 92 est d'autant plus étonnante que le Conseil national de l'Ordre des médecins a récemment publié une "mise au point" sur le sujet. L'Ordre rappelle qu'un traitement ne peut "en aucun cas être alternatif aux données acquises de la science et à l'état de l'art", mais peut en revanche "comporter une prescription adjuvante ou complémentaire", comme de l'homéopathie, "après avoir délivré au patient une information loyale, claire et appropriée". Le code de déontologie interdit néanmoins "de présenter comme salutaires et sans danger des prises en charge ou des thérapeutiques non éprouvées" ou d'en faire la publicité.
Après les déclarations d'Agnès Buzyn appelant à une évaluation par la HAS des produits homéopathiques, l'Ordre national des médecins a indiqué qu'il en "tirerait les conclusions". Les mentions qui ne correspondent plus "à la réalité de l'exercice" ou qui "n'auraient pas fait la preuve de leur efficacité" pourraient alors ne plus être reconnues. "Le CDOM du 92 adopte une position périlleuse, à contretemps des réactions positives provoquées par la tribune (débat public, prise de position du CNOM, etc.), a réagi l'avocat du généraliste mis en cause, Maître Afane-Jacquart. Quant à la non-participation des plaignants aux conciliations, elle traduit une attitude contradictoire des intéressés. Ceux qui cherchent à faire taire les médecins qui défendent la science et la vérité verront leurs manœuvres se retourner contre eux, j'y veillerai." Sollicité par Egora, le Conseil national de l'Ordre des médecins ne souhaite pas ajouter de commentaire, et s'en tient à ses récentes déclarations sur l'homéopathie. Il précise que, statutairement, les conseils départementaux sont indépendants du Conseil national.
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