Ces soignants qui appellent à voter Macron pour faire barrage à l'extrême droite

19/04/2022 Par Sandy Bonin
A moins d'une semaine du second tour de l'élection présidentielle, les soignants sont mobilisés et s'expriment au travers de tribunes ou de communiqués. S'ils ne sont pas tous en accord avec les propositions d'Emmanuel Macron, ils s'accordent à le soutenir pour faire barrage à l'extrême droite.  

 

 

 

"Les valeurs de notre système de santé ne sont pas celles de l’extrême droite." Alors que l'échéance du second tour approche, les soignants se mobilisent pour appeler à voter contre Marine Le Pen. Dans une tribune publiée dans Le Journal du Dimanche, plus de 1.000 professionnels de santé appellent "à faire barrage" au Rassemblement national et à voter en faveur d'Emmanuel Macron. 

"Malgré une communication plus subtile, l’extrême droite n’a pas changé. Elle n’est pas plus rassembleuse ou sociale qu’elle ne l’était il y a 20 ans, au soir du 21 avril 2002. Et plus que jamais, elle porte en germe la destruction de notre État-providence, nos services publics et particulièrement notre système de santé ", écrivent les soignants, dont MG France ou encore la Fédération hospitalière de France, qui rappellent "que le projet de l’extrême droite s’oppose aux principes fondamentaux qui fondent notre modèle social". 

"Nous, acteurs de la lutte contre le Covid, nous voterons sans hésitation contre Marine Le Pen, en mettant dans l’urne un bulletin Emmanuel Macron le 24 avril. Notre vote sera d’abord un combat contre l’exclusion, le sectarisme, l’intolérance, le racisme et la xénophobie, qui ne peut souffrir aucune abstention", abondent d'autres soignants dans une tribune publiée dans le quotidien Libération. 

 

Stigmatisation des médecins étrangers 

Les professionnels de santé dénoncent la volonté de Marine Le Pen de réformer l’Aide médicale d’État (AME) pour la remplacer par un dispositif a minima. "La suppression de l’AME mettrait en danger toute la population en favorisant la propagation de maladies infectieuses en apparence non-urgentes", alertent-ils. Ils déplorent la stigmatisation des médecins étrangers "nos collègues et amis", par le parti d'extrême droite. "Comment accepter l’atteinte qui serait faite à leur dignité en les désignant comme intrus ? Rappelons enfin que 30% des postes de médecin sont vacants à l’hôpital et que plus de 10% de l’ensemble des médecins en exercice régulier ont un diplôme acquis à l’étranger", écrivent les professionnels de santé dans le JDD

"Nous sommes du côté de ceux dont le nom est difficile à prononcer et nous savons que sans les soignants étrangers, le système de santé français ne tiendra pas. Nous savons ce que nous leur devons", ajoutent les soignants signataires de la tribune de Libération. 

 

"Ne nous trompons pas de combat" 

"Oui, notre combat contre le Covid nous a souvent conduits à dénoncer certains choix gouvernementaux que nous jugeons imprudents", admettent les signataires de Libération qui déplorent un "optimisme déplacé" d'Emmanuel Macron face au virus. Ils dénoncent également "la trop faible détermination dont l’exécutif a fait preuve pour combattre le charlatanisme". "Sur ces combats, nous ne lâcherons certes pas. Mais pour ces combats, aussi, nous n’aurons aucune hésitation à faire barrage à la candidate d’extrême droite en mettant dans l’urne un bulletin pour Emmanuel Macron le 24 avril", tranchent-ils.  

"Ne nous trompons pas de combat, sachons mettre de côté nos différences politiques pour écarter une menace existentielle pour notre démocratie. Au-delà des différences d’opinion, et parce que l’essentiel est aujourd’hui en jeu, nous lançons un appel solennel en faveur du seul vote qui permet de préserver nos solidarités : celui en faveur de l’actuel président de la République", concluent les 1.000 soignants signataires dans le JDD, qui estiment que "le vote qui nous attend est un choix entre deux conceptions de la République". 

 

"Porte ouverte aux charlatans" 

Les signataires de la tribune de Libération ne manquent pas de rappeler les propos de Marine Le Pen qui estimait le 10 juin 2020 sur France Inter : "Objectivement, je pense que la crise aurait pu être très largement mieux gérée par Donald Trump."

"Comme avec son ami Bolsonaro, Marine Le Pen, face à la pandémie, ce serait la porte ouverte aux charlatans, l’incompétence et l’inconséquence, l’invocation sophiste de la liberté individuelle au mépris des plus vulnérables, le discrédit permanent jeté sur...

l’expertise et le progrès scientifique au profit de fascinations complotistes assumées. Ses valeurs la portent davantage à placer, comme elle a tenu à le faire savoir, un santon de Didier Raoult dans sa crèche de Noël et à acheter des vaccins russes qui n’ont jamais démontré leur efficacité, qu’à protéger nos enfants, nos âgés, nos concitoyens immunodéprimés face aux prochaines vagues", alertent les professionnels du soin.  

 

"Rien ne saurait justifier l’abstention" 

"Pour nous, à l’heure du vote, il n’y aura pas de quitus à l’égard de l’exécutif, mais rien ne saurait pour nous justifier l’abstention face à un péril de cette nature", préviennent-ils. 

Pourtant le vote Marine Le Pen ou l'abstention est un choix de plus en plus envisagé par de nombreux soignants, comme l'explique une autre tribune, menée par le médecin hospitalier André Grimaldi et publiée dans le Journal du Dimanche. Ces auteurs appellent le candidat Macron à prendre des engagements forts pour "convaincre les soignants".  

"Un grand nombre de soignants s’apprêtent à s’abstenir ou même à voter pour une candidate dont le programme inclut la discrimination des personnes pour l’accès aux soins, mettant à mal les valeurs d’égalité et de solidarité de l’humanisme médical, ce qui donne la mesure de l’ampleur du désastre en cours. Les professionnels de santé ont pour mission de soigner pareillement tous les malades quels que soient leur religion, la couleur de leur peau, leurs idées politiques ou leur statut social", alerte cette tribune qui constate que "la colère ou le dépit des soignants s’explique par l’empilement depuis plus de dix ans de promesses, non tenues".  

Le texte étrille la mandature d'Emmanuel Macron. "Le constat à la fin de votre quinquennat est dramatique : l’hôpital public est à genoux après dix ans de rigueur budgétaire associée à un management d’entreprise commerciale, c’est-à-dire d’application du 'toujours plus avec toujours moins' jusqu’à l’épuisement actuel des personnels hospitaliers. Les Français vivent au quotidien des difficultés d’accès aux soins…", déplorent les signataires. 

 

"Il est exclu de privatiser" l'hôpital 

"Si vous voulez convaincre des soignants de voter pour vous, il vous faut dire clairement que le service public hospitalier – mots que vous semblez avoir du mal à prononcer - est un bien commun dont les ressources doivent être sanctuarisées et qu’il est exclu de privatiser", préviennent-ils en réclamant des engagements précis. 

Ainsi, ils exigent que les salaires des soignants soient "au moins égaux à ceux des pays européens voisins". Ils réclament un "quota de personnels soignants présents nécessaire pour assurer la sécurité et la qualité des soins" pour chaque établissement de santé. "Pour cela 100.000 infirmières et aides-soignantes doivent être embauchés et formés dans les hôpitaux (et autant dans les Ehpad)", calculent-ils. 

"La santé doit être prise en charge à 100% par la Sécurité sociale pour les soins de premier recours chez le médecin généraliste et pour les soins hospitaliers, en supprimant dans ces deux cas le 'ticket modérateur'", imposent les signataires de la tribune qui demandent également que "la tarification à l’activité (T2A) soit limitée aux soins programmés et standardisés avec des tarifs correspondant au coût moyen réel des soins". Enfin, les soignants exigent un Ondam "fixé en fonction de l’évolution réelle des besoins et des charges" et non "un budget contraint, mettant systématiquement chaque année les hôpitaux publics en déficit". 

"Les économies en santé ne doivent porter que sur les prescriptions et les actes injustifiés, sur les frais de gestion exorbitants et sur les bénéfices commerciaux excessifs", revendiquent les signataires qui estiment que si ces engagements ne sont pas pris pour convaincre les hésitants ou les abstentionnistes, "les belles promesses et l’appel à la défense des valeurs républicaines ne suffiront pas".  

[Avec Lejdd.fr, Libération.fr et Lejdd.fr

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