Geneviève Darrieussecq

Geneviève Darrieussecq : "Je ne ferai pas de miracles, mais je dirai la vérité"

Lors de la traditionnelle passation de pouvoirs, qui s’est déroulée ce lundi 23 septembre au ministère de la Santé, Geneviève Darrieussecq a salué le travail fait par ses prédécesseurs et présenté ses priorités : d’abord, l’accès aux soins, qui figure désormais dans son intitulé de ministre, ainsi que la santé mentale et la prévention. "Je ne ferai pas de miracles", a également déclaré la médecin de profession au sujet du budget de la Sécu pour 2025. 

23/09/2024 Par Louise Claereboudt
Geneviève Darrieussecq

"C’est avec une forte émotion, une certaine fierté, et surtout une immense reconnaissance que je quitte ce ministère aujourd’hui", a déclaré Catherine Vautrin, ce lundi matin, avenue Duquesne, lors de la passation de pouvoirs avec Geneviève Darrieussecq. Après huit mois à la tête d’un ministère "XXL" rassemblant le Travail, la Santé et les Solidarités, Catherine Vautrin s’est vu confier une nouvelle mission par Michel Barnier, au service, cette fois, du Partenariat avec les territoires et de la Décentralisation. 

"De ces huit mois bien trop courts, je tire néanmoins une certaine fierté du travail que nous avons accompli collectivement", a-t-elle déclaré devant un parterre de journalistes et de collaborateurs. En matière de santé, avec Frédéric Valletoux comme bras droit, Catherine Vautrin s’est réjouie d’avoir contribué à améliorer l’accès aux soins en généralisant le Service d’accès aux soins, "aujourd’hui en place dans 92% départements", et d’avoir mis en œuvre la poursuite des investissements du Ségur – "l’un des grands enjeux".

Crédit : Louise Claereboudt

Elle a également tenu à citer la signature d’une nouvelle convention médicale au printemps dernier, qui se met en place. "Ça a été un très gros travail", a-t-elle déclaré en se tournant vers son ministre délégué. "Nous avons également ouvert des chantiers, comme la refonte du métier d’infirmier", qui devra se poursuivre, ou encore "la stratégie décennale des soins palliatifs, tant attendue par nos concitoyens", a-t-elle ajouté. Au cours de ces huit mois, la ministre a, en outre, obtenu, avec Fadila Khattabi, désormais ex-ministre chargée des Personnes handicapées, le remboursement intégral des fauteuils roulants.

Ce sera désormais à Geneviève Darrieussecq de relever l’ensemble de ces défis. "Je sais, madame la ministre, chère Geneviève Darrieussecq, votre engagement personnel sur ces sujets ayant passé des heures ensemble à l’Assemblée nationale. Je sais que vous allez poursuivre ce travail avec, non seulement l’expérience ministérielle qui est la vôtre, mais surtout avec la ténacité landaise qui vous caractérise. Et cette ténacité, à n’en point douter, va être très utile pour la prochaine discussion du PLFSS [projet de loi de financement de la Sécurité sociale]", a lancé Catherine Vautrin, avant de céder sa place au pupitre.

"Novice" en matière de discours de passation, bien qu’ayant déjà passé six ans au Gouvernement entre 2017 et 2023, Geneviève Darrieussecq, 68 ans, s’est prêtée au jeu avec assurance, promettant de s’"atteler" au budget de la Sécurité sociale. "Mais excusez-moi de vous dire que je ne ferai pas de miracles, je ne suis pas une fée, a-t-elle aussitôt prévenu. Par contre, je dirai la vérité. Nous devons tous nous retrousser les manches et travailler en responsabilités parce que moi, ce qui m’importe, c’est d’apporter des solutions à nos concitoyens. C’est le premier des défis."

Les budgets "vont forcément augmenter un peu, mais jamais à la hauteur de ce que tout le monde espérerait", a-t-elle ajouté, pragmatique. L’enjeu est de voir "comment peut-on faire mieux, comment peut-on être mieux organisés". Cela demande "de l’intelligence collective qui, souvent, part des territoires, des élus locaux, des médecins généralistes, des hôpitaux, privés et publics, etc. Il faut que nous travaillions ensemble pour que nous arrivions à relever ces défis", a appelé celle qui a été médecin allergologue en libéral puis à l’hôpital, avant de se lancer en politique. 

Crédit : Louise Claereboudt

 

"L’accès aux soins sera un axe majeur pour moi"

Conseillère régionale d'Aquitaine sous les couleurs de l'UDF (devenu Modem) de 2004 à 2015, puis maire de Mont-de-Marsan, de 2008 à 2017, Geneviève Darrieussecq entre en 2017 à l'Assemblée nationale sous l'étiquette de La République en marche, après avoir soutenu la candidature d'Alain Juppé à la primaire de la droite. Elle est ensuite nommée secrétaire d'Etat aux Anciens combattants dans le Gouvernement d'Edouard Philippe, puis ministre déléguée par Jean Castex. 

En 2022, elle est réélue à l'Assemblée nationale et retourne au Gouvernement, cette fois comme ministre déléguée chargée des Personnes handicapées, avenue Duquesne ; un poste qu'elle conservera jusqu'en juillet 2023. "J’ai beaucoup de plaisir à revenir dans ce ministère, parce que c’est le ministère de l’humain", a déclaré cette fidèle de François Bayrou, ce lundi. A la fois pleine "d’émotion" et "de gravité", Geneviève Darrieussecq a d’abord tenu à saluer le travail fait par ses prédécesseurs à la Santé, mais aussi à évoquer les "enjeux majeurs" qui attendent le secteur. 

"L’accès aux soins sera bien entendu un axe majeur pour moi qui suis élue locale et qui, d’abord, ai été médecin de terrain pendant 25 ans", a-t-elle déclaré, promettant de "mettre toute [son] énergie dans ce domaine". "L’accès aux soins doit être une partie intégrante de l’aménagement du territoire, a-t-elle poursuivi. Quand on aménage un territoire, on doit toujours penser à la santé derrière et à l’architecture de l’accès aux soins dans ce territoire." La ministre a également promis de faire la part belle aux "initiatives locales" : "Ce sujet majeur sera sur mon bureau immédiatement."

Vantant sa très bonne connaissance du fonctionnement du système de santé, Geneviève Darrieussecq a estimé qu’il "doit certainement se décloisonner". "Chacun doit considérer l’autre non pas comme un concurrent, mais comme un compagnon de route", a-t-elle estimé, alors que les discussions autour des transferts de compétences suscitent toujours de vives tensions entre les professions de santé. "Faisons en sorte que nous puissions ensemble construire cet accès aux soins : accès aux soins primaires, secondaires, accès aux urgences, à l’hôpital, à un centre de soins…", a-t-elle appelé de ses vœux. 

Deuxième sujet majeur pour la nouvelle locataire de l’avenue Duquesne : "Le défi démographique." Face au vieillissement de la population, les besoins de soins ne cessent d’augmenter tandis que le nombre de médecins, lui, diminue. Pour répondre à ce défi, la ministre a dit vouloir développer la culture de la santé publique dans le pays. "Nous ne sommes pas, malheureusement, un pays de prévention, nous devons le devenir. […] C’est une politique absolument essentielle et qui nous permettra aussi, non pas de régler, mais d’améliorer l’aspect budgétaire de la santé."

Enfin, dans la continuité des déclarations de Michel Barnier, dimanche soir, Geneviève Darrieussecq a promis de s’emparer du sujet de la santé mentale, le décrivant comme une "grande cause" pour notre pays. "Je serai au rendez-vous de l’attente du Premier ministre bien entendu", a-t-elle conclu, sous les applaudissements. 

"On n’a pas résolu tous les problèmes", confesse Frédéric Valletoux 

Il a été l’un des derniers à parler. Nommé ministre délégué chargé de la Santé et de la Prévention en février dernier, Frédéric Valletoux a officiellement quitté le Gouvernement après deux mois de sursis. Lors de la passation de pouvoirs avenue Duquesne, ce lundi matin, le député Horizons a tenu à remercier ses équipes et à s’adresser à sa successeure. 

Une prise de parole qui n’aura duré que quelques minutes : "C’est la bonne nouvelle, mon temps de parole est proportionnel à ma durée de vie dans ce ministère", a-t-il plaisanté, provoquant des sourires dans la salle. "La mauvaise nouvelle, chère Geneviève, madame la ministre, c’est que Catherine et moi, on te doit un aveu. On n’a pas résolu tous les problèmes", a-t-il ajouté. "En matière de santé, il en reste quelques-uns. Ce ne sont pas des problèmes insurmontables, mais ce sont des sujets qui nécessitent – et ce sera sans doute le cas sous ta férule – d’être pris en main de manière volontariste", a-t-il déclaré. 

Crédit : Louise Claereboudt


L’ancien président de la Fédération hospitalière de France a confié avoir été "passionné et heureux de pouvoir accéder à ses fonctions" à la Santé. "C’est un ministère merveilleux, et c’est aussi un ministère où les dossiers sont complexes. D’abord, la valse des ministres n’a pas facilité la prise en main des dossiers. Je dois confesser que régulièrement, au cours des quelques mois que j’ai passés dans ce 7e étage, mes interlocuteurs traditionnellement me disaient ‘On est contents de vous voir mais vous êtes le 6e ou 7e [ministre] depuis 2022 que l’on rencontre’", a-t-il dit. Et d’ajouter : "Je pense que tu auras toi aussi cette remarque" en s’adressant à Geneviève Darrieussecq. "Le système de santé est un paquebot, l’efficacité des mesures ne se considère que dans la durée. Je te souhaite de pouvoir avoir le temps de mener ces actions qui sont aussi nécessaires."

Frédéric Valletoux s'est dit "satisfait qu’une maire succède à un autre maire" : "Je sais que tu portes en toi cette conviction que le système de santé doit évoluer vers l’ouverture vers les territoires."

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Mais quelle mentalité de geôlier, que de vouloir imposer toujours plus de contraintes ! Au nom d'une "dette", largement payée, co... Lire plus

11 commentaires
2 débatteurs en ligne2 en ligne
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Débatteur Passionné
Médecins (CNOM)
il y a 2 mois
Je vous offre la traduction : - "Je dirai la vérité" = "Je communiquerais comme mes prédécesseurs" - "Je ne ferai pas de miracles" = "Je n'ouvrirai pas le secteur 2 aux médecins généralistes" - "L'e
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4,6 k points
Débatteur Passionné
Médecine générale
il y a 2 mois
Et voilà... continuité de l'idéologie destructrice en marche. Ce n'est pas un médecin de terrain, mais un médecin qui a fuit le libéral pour l'hôpital, puis la médecine pour la politique. Son discours
Photo de profil de Bernard Leve
4,1 k points
Débatteur Passionné
Médecine générale
il y a 2 mois
Si elle veut dire la vérité, qu'elle commence par révéler au bon peuple que tous les gouvernements depuis trente ans ont tout fait, numerus clausus aidant, pour aboutir à la situation dramatique actue
 
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