"Le VIH ne nécessite pas une prise en charge médicale" : elle se voit refuser un droit au séjour

30/11/2018 Par Fanny Napolier
Santé publique
C'est sur la base d'un étrange point de vue que l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii) a refusé la demande de droit au séjour d'une patiente : le VIH ne nécessiterait pas de prise en charge médicale. A la veille de la Journée mondiale de lutte contre le Sida, la Cimade alerte.

Mme X est une femme d'origine camerounaise, résidant en France depuis 2010. Elle est malade du sida. En juillet 2017, elle est convoquée par l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii) au sujet de sa demande de renouvellement de son titre de séjour. La loi française prévoit qu'un étranger résidant habituellement en France puisse obtenir, sous conditions, un titre de séjour pour raisons de santé. Six mois plus tard, elle reçoit l'avis du Collège des médecins de l'Ofii. "Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'Ofii émet l'avis suivant : l'état de santé du demandeur ne nécessite pas une prise en charge médicale", indique l'avis. Le document précise : "Au vu des éléments du dossiers et à la date de l'avis, l'état de santé de l'intéressé peut lui permettre de voyager sans risque vers le pays d'origine." Pourtant, lors de sa convocation, la patiente avait été examinée par une équipe médicale de l'Ofii attestant qu'elle était suivie, sous traitement, et qu'elle devait le prendre "à vie". Face au tribunal administratif de Paris, la patiente a produit la copie de cinq certificats médicaux attestant qu'elle est personnellement suivie par le service des maladies infectieuses et tropicales du groupe hospitalier universitaire Bichat-Claude Bernard pour une infection VIH, qu'elle a commencé un traitement antirétroviral en 2011 et qu'il "n'est pas envisageable de pouvoir interrompre le suivi et les soins requis par cette pathologie sans mettre gravement ses jours en danger".  A ces pièces, la patiente a ajouté plusieurs attestations et certificats médicaux produits par les médecins qui la suivent depuis 2011. Deux de ces documents ont été critiqués par l'Ofii, estimant qu'il est "manifeste qu'ils ont été rédigés pour les besoins de la cause et qu'il s'agit en réalité de certificats médicaux de complaisance". Des accusations de fraude réitérées sur les réseaux sociaux ces dernières heures.

Dans sa décision rendue début novembre, le tribunal administratif de Paris a annulé l'obligation de quitter le territoire, estimant que "le préfet de police se limite à se référer à l'avis du Collège des médecins de l'Ofii (…) alors que cet avis est contredit par toutes les autres pièces du dossier". Il a enjoint le préfet à délivrer une autorisation de séjour et à réexaminer la situation de la patiente dans un délai de deux mois. Plus généralement, la Cimade relève que le taux d'avis en faveur de la poursuite des soins en France pour les personnes qui demandent un droit au séjour a chuté en 2017. "De 75% en 2013 avec les Agences régionales de santé sous la tutelle du ministère de la santé, il est désormais à 52% pour 2017, première année où c’est l’Ofii, agence sous la tutelle du ministère de l’Intérieur, qui décide du sort des personnes étrangères malades", relève la Cimade en s'appuyant sur un récent rapport de l'Ofii.

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