Macron veut "sortir du financement à l'acte" pour "mieux rémunérer" les médecins qui assument des missions supplémentaires
Présentant ses vœux "aux acteurs de la santé", le Président de la République a présenté un plan pour sortir de la "crise sans fin" dans laquelle est plongé le système de santé. En ville, il a dit vouloir rémunérer davantage les médecins qui participent à la PDSa, prennent de nouveaux patients ou forment des internes. Il plaide également pour le développement des délégations d'actes, avec des pharmaciens ou des infirmières "en référence" pour les patients sans médecin traitant. "Le médecin traitant doit être la porte d'entrée, mais pas le verrou du système de santé", a-t-il affirmé. Crise des urgences et de la pédiatrie, grève des médecins libéraux et des biologistes… C'est dans un contexte extrêmement tendu qu'Emmanuel Macron a pour la première fois souhaité adresser des vœux "aux acteurs de la santé", depuis le CH Sud-Francilien de Corbeil-Essonnes ce vendredi matin. Face à la "crise sans fin" du système de santé, révélée et exacerbée par le Covid avec le sentiment d'une "perte de sens" des soignants, l'objectif pour le Président de la République est d'enclencher sans plus tarder une réorganisation du système de santé. De la pénurie de temps médical au cloisonnement ville-hôpital, les problématiques ont été identifiées dès septembre 2018 avec la stratégie Ma santé 2022, a-t-il souligné. Mais, "si le diagnostic était juste, le traitement, 'indépendamment du covid, n'était pas suffisant", a reconnu le Chef de l'Etat, annonçant vouloir "aller plus vite et plus fort". Pour autant, "la réponse n'est pas forcément plus de moyens", a-t-il insisté, rappelant que le budget de la santé avait déjà été augmenté de 50 milliards d'euros en trois ans. Parce que la crise est "complexe" et "multifactorielle", "on va mettre une décennie à tout changer en profondeur". "D'ici là, la situation va plutôt se dégrader en termes de démographie médicale, a-t-il pointé, soulignant que "ces dernières années", la France avait perdu 6000 médecins généralistes. "On est à un peu moins de 100000 MG aujourd'hui. Le problème, c'est que nous aurons environ 80 000 MG en 2025 si ceux qui doivent partir à la retraite partent. Près de la moitié des médecins ont plus de 60 ans." En attendant que la suppression du numerus clausus produise ses effets, "dans 5 à 8 ans", "il n'y a pas de recette miracle". "Notre défi collectif, à court terme, c'est de dégager du temps de médecin, de dégager du temps de soignant face au patient, et de repenser notre organisation collective."
Emmanuel Macron a rappelé l'objectif d'embauche d'ici à la fin de l'année 2024 de 10000 assistants médicaux, contre près de 4000 actuellement. "C'est un vrai succès du plan Ma santé 2022. Ça libère du temps médical", s'est-il félicité. Occultant la question du C, pourtant au cœur des revendications du mouvement de grève de Médecins pour demain, le Président a affiché son intention de "mieux rémunérer les médecins qui font la permanence des soins et qui prennent en charge de nouveaux patients. C'est là-dessus que nous allons concentrer les efforts financiers des négociations conventionnelles", a-t-il insisté. A l'hôpital comme en ville, le Président dit en effet vouloir "sortir d'un financement à l'acte" pour aller vers un "financement à la mission", citant encore la formation des étudiants ou, pour les spécialistes, l'organisation de "consultations avancées dans des zones sous-denses". "Nous avons besoin de notre médecine libérale, je crois à ce modèle, mais on doit mettre fin à la divergence qui s'est installée. Il faut mieux récompenser ceux qui veulent travailler ensemble" et assument une "responsabilité territoriale". "Les généralistes sont le visage le plus familier de notre système de santé", a-t-il continué, promettant de "revaloriser leur rôle" : en rémunérant davantage ceux qui prennent plus de patients, en "multipliant les aides", en supprimant les actes inutiles "comme certains certificats" ou encore en développant la télémédecine. "Le seuil de 20% d'activité en télémédecine n'est pas une bonne idée", a lancé Emmanuel Macron. "Le médecin traitant doit être la porte d'entrée mais pas le verrou du système de santé", a estimé le Président, appelant à associer davantage les autres professionnels de santé, à développer plus massivement les IPA et à simplifier les délégations d'actes. Il faut pouvoir "recourir à d'autres professionnels de santé" –"sages-femmes, pharmaciens, infirmiers"- pour des renouvellements d'ordonnances de patients chroniques, du dépistage, de la vaccination… Toutes ces évolutions de compétences devront être identifiées d'ici le 1er mars. "S'ils sont malins", les médecins délègueront les actes simples aux paramédicaux Il faut que chaque citoyen puisse accéder dans son bassin de vie à une offre de soins, avoir quelqu'un en référence, ça peut être un paramédical, un médecin spécialiste, en ville ou a l'hôpital", a-t-il expliqué. Rappelons que dans son programme santé, le candidat Macron avait en effet souhaiter permettre la désignation par le patient de pharmacien ou d'infirmier "référent" pour des "actes simples". Les CNR santé, qui seront systématisés dans les territoires, devront bâtir d'ici la fin de l'année une feuille de route. "L'ensemble des professionnels vont s'engager sur une réponse en termes de soins." Le Président a fixé un objectif clair : d'ici la fin de l'année, les 600 000 patients en ALD sans médecin traitant devront s'en voir proposer un. "Plus exactement, je veux que ces patients chroniques aient accès à une équipe traitante (...) et quand il n'y a pas suffisamment de médecins, que ces médecins puissent déléguer à des paramédicaux et qu'on n'ait pas des gens qui n'aient accès à personne et compte tenu des rigidités de notre système ne peuvent pas même pas se faire renouveler une ordonnance auprès d'un infirmier ou auprès du pharmacien. C'est absurde. On n'a pas le droit de faire ça. On doit sortir de ce face à face. Il y aura toujours des médecins référents, généralistes et spécialistes, dans ces coalitions d'acteurs de territoire. C'est à eux de s'organiser pour trouver du temps. S'ils sont malins, ils délèguent les actes qui ont moins de valeur aux paramédicaux." La "logique" pour Emmanuel Macron, "c'est que beaucoup de nos médecins généralistes devraient déléguer deux ou trois renouvellements d'ordonnance par an à l'infirmier de référence, au pharmacien de référence pour n'avoir que des rendez-vous réguliers". Enfin, Emmanuel Macron a abordé la problématique des rendez-vous non honorés. "Un travail sera engagée pour responsabiliser les patients avec la Cnam", a-t-il annoncé.
Emmanuel Macron a exigé une meilleure organisation du temps de travail dans les hôpitaux "d'ici au 1er juin", en donnant plus d'autonomie à chaque service, pour leur permettre de garder les soignants qui les quittent et de les rendre plus attractifs. Il a déploré une "hyper-rigidité" dans l'application des 35 heures et un système qui "ne marche qu'avec des heures supplémentaires". Sur le modèle des assistants médicaux en médecine de ville, il souhaite que des personnels administratifs viennent en appui des soignants directement dans les services. Un tandem "administratif et médical", constitué sur la base d'un "projet", va être instauré à la tête des hôpitaux. Une manière de conférer une place plus importante aux médecins, dont beaucoup critiquent la dérive bureaucratique de la gestion hospitalière. Dès le prochain budget de la Sécurité sociale, le président de la République souhaite la "sortie" de la T2A pour les établissements hospitaliers, publics comme privés. "Il faut qu'il y ait une part structurante de la rémunération qui repose sur des objectifs de santé publique qu'on négocie à l'échelle d'un territoire", a-t-il estimé.
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