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Une proposition de loi s'attaque aux certificats "inutiles" pour libérer du temps aux médecins

Face à la "réduction drastique du temps médical disponible", les députés du groupe La France insoumise - Nouveau Front populaire viennent de déposer une proposition de loi avec l'objectif de "permettre aux médecins de se concentrer sur l'essentiel de leur pratique". Le texte s'attaque surtout aux certificats jugés "inutiles" ou "superflus".

22/04/2025 Par Louise Claereboudt
Politique de santé
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"Si nous manquons incontestablement de médecins, nous devons veiller à ce que les professionnels actuellement en exercice trouvent du sens à leur métier et puissent mobiliser leurs compétences et savoirs au service d’actes médicaux", écrivent plus de 70 députés du groupe La France insoumise - Nouveau Front populaire dans l'exposé des motifs de leur proposition de loi, déposée le 17 avril dernier. Le texte, qui comporte 11 articles, entend libérer du temps médical dans l'objectif d'améliorer l'accès aux soins des Français.

Déplorant le fait que la France est aujourd'hui "incapable de soigner toutes celles et ceux qui en ont besoin" du fait "des politiques menées ces dernières décennies [qui] ont provoqué une réduction drastique du temps médical disponible", les élus de gauche se montrent néanmoins optimistes. La "crise sanitaire" que l'hexagone traverse n'est, pour eux, pas une "fatalité", "car des millions d’heures peuvent être libérées rapidement à destination des patientes et des patients", affirment-ils. Comment ? "En supprimant un ensemble de tâches sans plus‑value sanitaire ni justification médicale, aujourd’hui à la charge des médecins."

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Une approche que ces députés justifient en basant – entre autres – sur des chiffres avancés par le Dr Michaël Rochoy, généraliste et chercheur à l'université de Lille, dans une tribune publiée en février dernier dans Le Figaro. Ce dernier évalue "la perte de temps médical liée aux certificats absurdes à '10 millions d’actes perdus – soit 2 000 généralistes gâchés' chaque année. Il considère que la suppression des principaux certificats absurdes permettrait 'd'augmenter dès demain de 5% le temps médical disponible'", rapportent les députés.

L'article premier de leur PPL vise ainsi à "inscrire dans la loi les seuls certificats médicaux essentiels et pour lesquels il est justifié de demander qu'ils soient établis par un médecin". Lesquels seraient : le certificat de non contre‑indication à la pratique d’un sport, le certificat d'absence en crèche de plus de quatre jours, le certificat d'inaptitude physique au sport, le certificat pour maladie contagieuse, le certificat médical pour demande d'allocation personnalisée d'autonomie ainsi que le certificat médical pour une première demande de prestation auprès de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH). Dans ce dernier cas, un simple formulaire sera nécessaire pour un renouvellement (article 9 de la PPL).

L'article premier vise également à "protéger le secret médical", en empêchant un assureur privé de réclamer à un médecin "la transmission d’informations ou documents médicaux" ou de solliciter un assuré pour "qu'il fasse établir un certificat ou un document médical, par un médecin, autre que le rapport médical détaillé après identification d'un risque par le médecin conseil de l'assureur au travers de l'examen du questionnaire simplifié rempli par l'assuré". Le médecin n'est d'ailleurs pas tenu "de remplir, signer, apposer son cachet ou contresigner un questionnaire de santé produit par un assureur privé", stipule le texte, qui prévoit une amende pour l'assureur qui manquerait à ses obligations "pour qu'enfin cessent ces violations du secret médical".

Dans cette même logique de réduction de la paperasse, l'article 2 supprime l'exigence de présentation d'un certificat de grossesse, additionnel à celui présenté à l'Assurance maladie, dans la fonction publique d'État, territoriale ou hospitalière. La PPL, portée par Hadrien Clouet et Mathilde Panot, crée aussi un bon de transport médical délivré par la CPAM, substituable au certificat établi par un médecin.

Les écoles et crèches dans le viseur

Cette proposition de loi réaffirme aussi que "les seuls certificats scolaires sont ceux relatifs à un retour après une maladie contagieuse, de l'enfant ou d'un membre de sa famille, et de contre‑indication à la pratique sportive". Elle appelle les directions d'établissement à "juger en bonne intelligence du fait qu'un état de santé justifie des dérogations au règlement intérieur et pratiques en vigueur dans l'établissement", par exemple autoriser un élève à boire en classe. Les crèches sont aussi concernées par ce texte, qui veut supprimer les "certificats superflus" pour l’accueil dans ces structures" dès lors qu'un enfant peut faire la preuve de sa vaccination par son carnet de santé".

Le référent technique de la micro‑crèche ou son directeur "ne peut refuser de prodiguer des soins locaux par l'application de crèmes accessibles sans prescription médicale en raison de l'absence de remise d’un certificat médical", peut-on lire. Il ne peut par ailleurs être demandé aux parents d'un enfant malade que soit remis un certificat médical, si ce dernier a été absent moins de quatre jours.

Les articles 7 et 8 de cette PPL autorisent, enfin, la pratique sportive sans certificat médical, pour tous les majeurs, au sein d'associations ou de clubs "affiliés à une fédération ou non". Une disposition déjà en vigueur théoriquement mais pas appliquée partout, précisent les auteurs. La présentation d'un certificat médical reste toutefois nécessaire à la pratique sportive de haute intensité, dans un environnement dangereux, ou à un niveau professionnel, ajoute le texte. Une amende administrative de 500 euros est prévue les structures qui ne joueraient pas le jeu.

Auto‑déclaration des arrêts maladie de courte durée

Autre mesure contenue dans ce texte pour redonner du temps médical aux praticiens : permettre l'auto‑déclaration des arrêts maladie de courte durée. La proposition de loi prévoit que cet arrêt, qui devra être attesté sur l'honneur auprès de la CPAM, ne puisse excéder trois jours consécutifs et neuf jours par année civile. Cela revient "à adopter une logique de confiance envers les assurés sociaux", plaident les députés du groupe La France insoumise - Nouveau Front populaire, selon qui "il est bien documenté que les travailleurs font preuve de présentéisme lorsqu'ils sont malades : en 2019, 28% des arrêts maladie n'ont pas été pris ou partiellement".

"La suspicion ne se justifie pas dès lors que la 'fraude' aux arrêts maladies est un mythe : la Cour des comptes l'estime à 12,8 millions sur 12 milliards d'euros d’indemnités journalières, soit 1% du volume global", poursuivent-ils, estimant que "la suspicion encourage le présentéisme qui n'a que des conséquences négatives". "Il facilite la propagation des maladies et entraîne, dans un second temps, l'aggravation des pathologies, donc un surcoût pour l'Assurance maladie par le recours à des arrêts longs".

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Chirurgie générale
il y a 15 jours
et les ministères inutiles aux titres ronflants pour caser les copains,et qui coûtent très cher: c'est pour quand?
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