L'esprit carabin ne doit plus être une excuse aux violences sexistes et sexuelles, affirment les auteurs d'une tribune
Dans une tribune parue dans Libération le 7 mai, des médecins, soignantes et soignants décryptent “le système” qui mène à ces abus et identifient des pistes pour y remédier.
Un collectif de médecins a publié ce 7 mai dans Libération une tribune pour mettre fin aux violences sexistes et sexuelles “quasi institutionnelles”, subies par des médecins, des infirmiers et infirmières, des aides-soignants et aides-soignantes, des personnels administratifs, à l’hôpital. Hôpital auquel ils sont “attachés”. Parmi les premiers signataires, la Pre Karine Lacombe, cheffe de service à l’hôpital Saint-Antoine (AP-HP), qui a récemment accusé l’urgentiste Patrick Pelloux de harcèlement sexuel.
Les signataires dénoncent un “système”, qui trouve une justification dans “l’esprit carabin”. Soit “cette particularité soi-disant folklorique des études médicales françaises [qui] permettrait d’entendre quotidiennement des phrases comme : ‘Vas-y tiens l’écarteur comme t’écartes les cuisses !”, ou “Je te prends comme cheffe de clinique si tu t’engages à ne pas tomber enceinte !”, illustrent-ils. Mais aussi, “plus récemment ‘maintenant avec #Metoo, on ne peut plus rien faire’”.
Face à cela “nous suivons tous·tes” des préceptes, écrivent les auteurs : “Subir, être témoin et se taire. Cautionner et sourire. Surtout ne pas passer pour des victimes dans ce monde où pour être respecté il faut être fort et dur”, écrivent-ils, “et c’est ainsi que les violences banalisées perdurent, s’aggravent [...]”.
“Adieu à l'impunité”
Les auteurs mettent évidence les ressorts qui empêchent de parler : le parole contre parole ; la dissuasion permanente ; la peur (de l’exclusion, de la mise au ban) ; celle de “se voir empêcher dans sa progression de carrière” : “la confraternité imposée”. Pour y remédier, admettent-ils, “la tâche est immense”, car les hôpitaux sont “structurés avec un système hiérarchique patriarcal verrouillé”, avec des femmes sous-représentées dans les postes décisionnels clés. Et le sort de celles-ci est souvent suspendu au “bon vouloir d’une seule personne, ‘le’ chef de service”.
Ils lancent des pistes pour impulser le changement : faire “un état des lieux” et reconnaître l’ampleur du problème ; Identifier “les verrous de parole, les faire sauter” ; “sanctionner les personnes qui se considèrent comme intouchables”. Pour eux, les institutions doivent “favoriser la prise de parole, la consignation des plaintes, avertir, voire sanctionner, les personnes ciblées par des plaintes et non les exfiltrer”. Ils enjoignent aussi les universités à “s’engager à une protection pédagogique obligatoire pour les étudiant·e·s portant plainte ou témoignant afin de ne pas être pénalisé·e·s dans leur cursus de formation”. Ils prônent aussi un “mode de management horizontal et participatif”, pour remédier, du moins en partie à l’impunité de certains “mandarins”.
“Nous voulons affirmer : ‘Désormais on se relève, on reste, et on en finit avec l’impunité”, écrivent-ils, paraphrasant une tribune de Virginie Despentes publiée en 2020 suite à la cérémonie des Césars. “Soignant·e·s, administratif·ves, patient·es, relevons-nous pour pouvoir dire ensemble : ‘Adieu à l’impunité !”, concluent-ils.
[Avec Libération]
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