#MeToo hôpital : "L'Ordre des médecins a trop souvent protégé les comportements violents", dénonce Agnès Buzyn
Dans un entretien accordé à Paris Match ce jeudi 2 mai, l'ancienne ministre de la Santé s'est exprimée sur le mouvement #MeToo qui ébranle l'hôpital. Un milieu "fermé", "très masculin", où "les harceleurs" sont primés, et les victimes écartées. Elle reproche également l'attitude de l'Ordre, qui "a trop souvent protégé les comportements violents".
"Interne, on me disait souvent : 'ma petite, venez vous asseoir sur mes genoux.'" Dans un entretien accordé à Paris Match, jeudi 2 mai, l'ancienne ministre de la Santé Agnès Buzyn, désormais conseillère-maître à la Cour des comptes, a confié avoir, elle aussi, été victime d'agissements sexistes à l'hôpital lorsqu'elle était étudiant en médecine, mais aussi lorsqu'elle a été nommée professeure PU-PH. "On a essayé de me faire quitter mon service, j'étais mise au placard."
Un "harcèlement" dont elle avait déjà fait part à Egora en décembre. "Ça a commencé le jour où j’ai été nommée agrégée. Je pense qu’il y avait une part de difficulté à accepter une femme dans une spécialité encore très masculine. On ne m’invitait pas aux réunions, on modifiait mes prescriptions derrière mon dos. J’étais obligée de faire des stratagèmes pour soigner correctement mes malades. Le service devenait finalement dangereux pour eux. Et moi, je n’étais peut-être pas armée pour autant de violence", confiait l'hématologue lors de cette rencontre.
"Il est compliqué de trouver sa place dans un milieu très masculin, où la grossièreté et la vulgarité valorisent une forme de virilité", a-t-elle reconnu dans les colonnes de Paris Match, réagissant à l'émergence du mouvement #MeToo à l'hôpital. "Souvent, l'écosystème local 'sort' les femmes agressées pour les mettre ailleurs. La prime va aux harceleurs qui sont protégés", a dénoncé Agnès Buzyn, pointant "l'omerta" qui règne dans cette "bulle".
"Chaque fois que je paye ma cotisation, je rechigne"
"J'ai compris que sans féminisation du milieu on n'en sortirait pas", a-t-elle lâché, en racontant la remarque sexiste qu'a faite le représentant des médecins de son hôpital lorsqu'elle est venue lui demander de l'aide. Agnès Buzyn déplore la faible présence des femmes dans "les lieux de pouvoir", malgré la féminisation de la profession. "Dans la loi de santé de 2019, j'avais réclamé la parité à l'Ordre, que je trouve trop masculin. Le président s'est battu pour que je lui laisse plusieurs années pour y arriver. Selon lui, c'était la faute des femmes occupées avec leurs enfants !"
"L’Ordre a trop souvent protégé les comportements violents, que ce soit chez les harceleurs ou chez les charlatans, en attaquant ceux qui les dénonçaient", a-t-elle également vivement dénoncé. Et d'ajouter : "À chaque fois que je paye ma cotisation, je rechigne, tellement je considère plus l’Ordre comme un syndicat que comme une instance déontologique."
Dans cet entretien, elle a également visé l'Académie de médecine. "Une instance qui compte si peu de femmes n'est légitime sur aucun sujet !", a-t-elle lâché. "Est-ce que les membres masculins se rendent compte à quel point ils sont 'has been' ? C'est un entre-soi qui se coopte entre hommes. Je veux la parité partout !"
[avec Paris Match]
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