Médecins et infirmières vent debout contre la nouvelle procédure de déconventionnement en urgence
Un décret paru au Journal officiel le 29 novembre définit les modalités d’application de la procédure de “déconventionnement en urgence” par une caisse primaire d’assurance maladie lorsqu’un professionnel de santé libéral a commis “une violation des engagements prévus par la convention particulièrement grave ou ayant engendré un préjudice financier pour l'organisme”. Dans son rapport sur la lutte contre les fraudes aux prestations sociales, paru en septembre dernier, la Cour des Comptes recommandait "un déconventionnement d'office" des professionnels de santé fraudeurs sanctionnés à deux reprises. Désormais, en cas “de violation particulièrement grave des engagements conventionnels d'un professionnel de santé”, une procédure de déconventionnement peut être déclenchée par une caisse primaire d’assurance maladie, indique un décret paru le 29 novembre. Selon le texte, cette procédure permet de “justifier, en présence d'un préjudice financier pour l'assurance maladie, le dépôt d'une plainte pénale”. C’est le directeur de la caisse qui décide de ce déconventionnement “pour une durée qui ne peut excéder trois mois”. Ce dernier doit communiquer au professionnel “un courrier indiquant les faits reprochés [par exemple, la surfacturation ou facturation d’actes, biens et prestations fictifs, NDLR], la mesure de suspension envisagée et sa durée”.
A compter de la date de notification du courrier, le professionnel de santé professionnel dispose d'un délai de huit jours pour demander à être entendu, assisté le cas échéant de la personne de son choix, “dans un délai qui ne saurait excéder quinze jours à compter de la même date”. “Il peut également, dans ce délai de quinze jours, présenter des observations écrites”, précise le décret. A l’issue de ce délai, le directeur de l’organisme peut alors décider d’abandonner la procédure de déconventionnement ou “suspendre les effets de la convention à l’égard du professionnel pour une durée qu’il fixe [...] sous réserve d’avoir recueilli l’avis du directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie ou de son représentant désigné à cet effet”. Deux syndicats, la FMF pour les médecins et Convergence infirmière pour les Idel, ont vivement réagi à cette disposition. Pour le Dr Richard Talbot, de la FMF, ce décret fait du directeur de CPAM "l’exécuteur d’une "justice" d’exception faisant fi du principe élémentaire qu’on ne peut à la fois être juge et partie". "De sa propre initiative et sur son seul jugement" il pourra "déconventionner un médecin". Et ce "sans examen contradictoire, sans audition, sans consultation ni de la Commission Paritaire Locale, ni de la Commission des Pénalités", souligne le syndicaliste sur le site de la FMF, dénonçant "une nouvelle manifestation de défiance et de mépris envers les libéraux", ainsi qu'une "entorse" à la convention, puisque la procédure de déconventionnement est décrite à l'annexe 24. Même réaction outrée de Convergence infirmière. "Ce décret, pris en pleine période de crise sanitaire où tous les professionnels de santé sont totalement mobilisés, est absolument scandaleux", s'emporte le syndicat d'infirmières libérales dans un communiqué diffusé ce vendredi. "Les syndicats qui devraient être consultés sont méprisés. Le ministère de la Santé décide seul sans qu’il soit possible de s’exprimer ou de dialoguer." Pour Convergence, le décret "ouvre la voie à toutes les dérives" et renforce le pouvoir administratif "faisant des professionnels de santé des suspects par principe". Le syndicat d'Idel demande son retrait immédiat.
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