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Politiques de santé : "Une rustine sur une jambe de bois"

Alors que se tiennent ces jeudi 30 et vendredi 31 mai à Angers, les 12e Rencontres nationales de ReAGJIR, Egora – partenaire de cet événement - publie en exclusivité une tribune de son président, le Dr Raphaël Dachicourt. Ce dernier s'interroge devant l'inertie des politiques de santé.

29/05/2024 Par Dr Raphaël Dachicourt
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A l’heure où notre système de santé fait face à des difficultés croissantes, dans un contexte défavorable de pénurie de professionnels de santé et de vieillissement démographique, tous les regards se tournent vers les politiques, dans l’attente d’une solution miracle pour améliorer rapidement la situation. Dans ces périodes de crise, la tentation est forte de céder au populisme, tout particulièrement en pointant du doigt les professionnels (corporatistes, désinvestis, irresponsables voire même cupides), pour défausser la responsabilité et tenter d'apaiser la population, première victime des difficultés de notre modèle social.

Cependant, il est important de rappeler que l’accès aux soins n’est en réalité que la partie émergée de l’iceberg des inégalités sociales de santé. En effet, le système de soins dans son ensemble n’a qu’un impact limité de 20% sur l’état de santé de la population contre 30% pour les comportements individuels, 10% pour l’environnement physique et 40% pour les déterminants socio-économiques. Difficile dès lors, de faire peser les inégalités territoriales uniquement sur la question de l’accès aux soins, aujourd’hui prédominante dans le débat public. Mais ces chiffres témoignent d’une réalité plus profonde : la santé ne se limite pas aux soins. Une fois ce constat posé, il semble indispensable de repenser notre approche de la santé par une véritable démarche préventive transdisciplinaire, pour améliorer durablement la santé publique.

Pourtant, alors que ces données sont connues et que la volonté paraît partagée par tous (le terme “prévention” étant sur toutes les lèvres) aucune véritable action globale en ce sens ne semble se structurer. Et pour cause, avec une dette publique et sociale croissante, la réponse politique se concentre davantage sur l’idée de faire subsister le système social plutôt que de le transcender. La volonté de refondation se traduit d’ailleurs par le coup d’épée dans l’eau qu’a été le CNR-santé, n’aboutissant qu’à développer les concertations locales pour stimuler la coopération et ainsi espérer trouver des solutions. En résumé : “débrouillez-vous, les caisses sont vides”. Quel étrange message pour des acteurs locaux déjà submergés dans leur rôle actuel…

Mauvais pari sanitaire

 

La réponse politique sur cette thématique large de la santé se traduit donc aujourd’hui par des balbutiements, au mieux palliatifs, au pire dangereux, faute de capacité financière et structurelle pour amener la véritable refondation nécessaire pour préparer l’avenir. En témoignent les mesures éparses, sans ligne directrice cohérente, annoncées par Gabriel Attal et Frédéric Valletoux en avril dernier, ou encore les négociations des nouvelles conventions entre l’Assurance Maladie et les professionnels de santé libéraux, n’actant au mieux qu’un simple rattrapage de l’inflation. Cependant, si maintenir le système à flot pourrait être considéré comme une réussite d’un point de vue économique, seul un investissement ambitieux permettra de le faire évoluer pour répondre aux besoins de santé. Le choix stratégique de miser sur la réduction des dépenses est un mauvais pari sanitaire, qui aura sans aucun doute des conséquences néfastes sur le long terme. Car, en médecine comme en politique, la prévention implique de s’investir en amont pour limiter l’impact sur la santé et ainsi réduire les besoins afférents.

C’est avec ces réflexions en tête que les jeunes médecins généralistes représentés par ReAGJIR regardent aujourd’hui, perplexes, les débats politiques sur la santé, se demandant s’ils pourront mener à bien leur rôle demain. Ce n’est pas par égoïsme qu’ils appellent l’Etat à investir dans la santé, mais dans une logique de santé publique. Car ils savent que seul un véritable “New deal” en santé permettra de préparer notre système, autrefois considéré à l’avant-garde, aux défis des décennies à venir.

 

 
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